Les Chroniques de Livaï ~ EruRi Only [+13]

Qui laisse une trace, laisse une plaie #1

L'expédition se déroule bien pour l'instant, mais Keith Shadis semble avoir des ambitions démesurées, et se lance avec ses hommes dans des terres inconnues dangereuses. Erwin est dans le doute et ne sait pas s'il doit appuyer son supérieur ou le freiner pour le bien général, car lui-même rêve de découvrir ce qui se trouve au-delà de l'horizon...

Chapitre 316 des Chronique de Livaï

Les recrues sont endormies, enroulées dans leur couverture. Seuls les vétérans sont encore debout. Rassemblés dans la lumière des torches, nous discutons du programme de demain. Hanji nous a rejoints. Elle est allée vomir dehors, apparemment, elle ne supporte pas l'ivresse. Pour ma part, j'ai l'esprit clair.

Cela me dérange un peu, ce cercle. C'est comme si nous complotions dans le dos de Keith... Ce n'est pas tout à fait cela... Il se trouve dans ses quartiers et ne sait rien de nos propos. Mais c'est une chose dont nous devons discuter. Car malgré notre succès d'aujourd'hui, je ne me sens pas tranquille. Hanji est d'accord avec moi ; s'il y a déjà tant de titans par ici, ils seront sans doute plus nombreux quand nous descendrons davantage au sud. Nous aurons un chariot de moins à protéger, mais notre allure ne pourra pas être trop rapide. Je dois convaincre le major de laisser une partie des troupes ici.

Livaï me demande ce que je compte faire si ça tourne mal. Il va vite en besogne. Je ne peux pas m'opposer à la volonté du major, mais je peux au moins lui demander de revoir ses ambitions à la baisse. Mike hausse un sourcils et me demande si ça me coûte de devoir le faire. Evidemment. J'ai autant envie que lui de voir des terres inconnues. Mais je ne veux pas réitérer la catastrophe de la dernière expédition. Si Hanji et moi sentons que cela va dégénérer, nous ferons pression pour faire demi-tour. Si cela ne marche pas... Livaï me lance de ne pas me laisser marcher sur les pieds et de faire valoir mon point de vue. Il ne veut plus revoir tant de morts inutiles... Je le comprends...

Se séparer d'une partie de nos effectifs nous permettra de passer davantage inaperçus et d'aller plus vitre ; en contrepartie, nous aurons moins de force de frappe en cas d'attaque. La protection des autres reposera essentiellement sur nous. C'est un dilemme.

Les anciens se penchent en avant, vers moi, et la lueur des flammes rend leurs visages graves. Je devine à leurs expressions qu'ils me suivront si cela s'avère nécessaire. Je me sens coupable... comme si je trahissais Keith... Mais c'est le but contraire que je poursuis. Il a déjà accepté d'endosser totalement le résultat de notre dernière sortie - alors que j'en étais en partie responsable -, je veux lui éviter d'avoir à essuyer un autre échec. Même si je dois m'opposer à lui frontalement, bien que j'aimerais l'éviter... Sa soudaine audace m'inquiète, je me demande ce qui l'a décidé à prendre tant de risques alors qu'auparavant il était si prudent, voire timoré...

Gelgar s'étire, les joues rouges et les geste imprécis, et s'écroule sur Nanaba qui le repousse doucement sur son paquetage. Elle lui déplie affectueusement sa couverture et notre ami s'enveloppe dedans, insoucieux à présent du danger qui nous guette. C'est bientôt l'heure du couvre-feu général. Hanji et Moblit rejoignent leurs camarades, et nous-mêmes nous apprêtons au repos. Livaï reste assis sur son sac, comme à son habitude, même si je sais qu'il fera l'effort de dormir quelques heures, quand tout le monde aura sombré dans le sommeil. Moi-même, je me sens somnolent. Pas à cause du vin, je le tiens très bien. Mais la perspective de me mesurer à Keith sur le terrain m'angoisse. Je ne serais pas contre un verre de plus...

J'éteins les torches de la salle. Le froid envahit soudain les lieux. L'hiver s'est à peine évanoui, je l'avais oublié. Ici, dans cette ruine mal isolée sur un promontoire, les soldats peuvent attraper des coups de froid très facilement. Je frissonne, à moitié à cause de la température. Je pourrais décider de monter dans mes quartiers privés, plus chauds, mais l'idée de les laisser tous là, après leur avoir presque fait prêter serment de me soutenir en cas de conflit, me déplaît. J'étale ma couverture, et m'allonge à côté de Mike, qui peine aussi à trouver le sommeil. Ces couvertures ont toujours été trop petites pour nous... Je tente de trouver une bonne position et d'oublier la pierre dure et froide sous moi...

Un frottement de tissu bruisse doucement derrière moi, et un pan de couverture tombe sur mon épaule. Je sais à qui elle appartient. Il sait quand je ne vais pas bien et trouve toujours un moyen de me soulager, d'une façon ou d'une autre. Comme il n'est pas à l'aise avec les mots, c'est plus souvent par des petits gestes qu'il prend soin des autres.

Reste comme tu es, Livaï, c'est si précieux... Essaie seulement de te reposer et de ne pas t'enrhumer !