Mercredi.
J'inspire une longue bouffée d'air chaud quand la voiture s'arrête enfin devant mon immeuble, après un interminable voyage effectué dans un quasi silence total opprimant. Max a siffloté quelques airs de musique par-ci par-là, ma sœur nous a fait le résumé du dernier bouquin en date qu'elle lit, essayant vainement de relancer une quelconque conversation pour combler les blancs et faire oublier la maladresse de sa fille, qui s'est endormie devant son dessin animé pour le reste du trajet. Tandis que Julia est restée blottie contre la portière sans ouvrir la bouche une seule fois, esquissant un ou deux rictus à l'occasion quand je caressais sa cuisse ou embrassais ses cheveux.
Verdict ; le premier jour post-vacances, aka le premier jour d'une nouvelle vie comme elle l'appel, commence assez mal.
-Ça vous dit de venir manger à la maison ce week-end ? nous propose Zoé quand on décharge le coffre de nos bagages.
Je questionne Julia du regard pour m'assurer d'avoir son approbation avant de donner la mienne, mais elle paraît perdue dans un monde parallèle, bien loin.
Monde où je donnerais cher pour entrer afin de comprendre ce qu'il se passe dans sa tête en ce moment. Rien de bon j'en ai bien peur.
-Ça te tente mon ange ? suis-je obligé de la relancer après un coup d'œil intrigué de ma sœur, qui vient visiblement de réaliser à son tour que quelque chose ne tournait pas comme ça le devrait.
En prenant tout juste conscience qu'on lui adresse la parole, Julia revient parmi nous en cessant de fixer l'horizon pour nous dévisager l'un après l'autre.
-Hein ? Hmm, oui, ouais bien-sûr, avec plaisir.
Elle se forge d'un sourire crédible mais j'y crois moyennement. Ma sœur, elle, n'y voit que du feu. Elle s'enthousiasme en prenant Julia dans ses bras, puis m'offre un câlin tout aussi étouffant avant de remonter dans la voiture.
On salue Max, embrasse rapidement Louise toujours plongée dans un sommeil de plomb, et la voiture disparaît au milieu de la circulation dans des bruits de klaxons auxquels on répond d'un signe de la main depuis le trottoir.
Nous voilà seuls. Et revoilà ce foutu silence affligeant avec.
J'essaie de ne pas m'imaginer le pire, comme le fait qu'elle pourrait finalement avoir la trouille ou pire ; qu'elle regrette d'avoir accepté de me suivre ici et qu'elle veuille rentrer à Port-Avenue sur le champs. Sauf qu'avec la tête dépitée qu'elle fait depuis plusieurs heures, ça devient compliqué de garder espoir que tout ira bien.
-Bon, je te fais découvrir ton nouveau chez toi Cruella ? tentais-je, pas très sûr de moi.
Bizarrement, presque par enchantement, ses pupilles azur retrouvent leur lueur irradiante des derniers jours et un lent sourire se dessine sur ses lèvres. Un vrai cette fois.
-Tu sais pourquoi je t'aime le demeuré ?
Sous mon incompréhension face à ce revirement total de comportement, elle se dandine jusqu'à moi et s'accroche au bas de mon tee-shirt pour m'offrir un bisou furtif.
-Parce que tu trouves toujours les mots qu'il faut pile au moment où j'en ai besoin.
-Sans le savoir de toute évidence, constatais-je, légèrement désarçonné. Qu'est-ce que j'ai dit que t'avais besoin d'entendre exactement ?
-Simplement que j'étais chez moi.
Je fronce intérieurement les sourcils mais elle coupe court à ma réflexion, et notre conversation par la même occasion, en me volant un deuxième baiser avant d'attraper gaiement la poignée de sa valise, se dirigeant déjà vers la porte de l'immeuble en pavanant ses cheveux dans son dos.

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Holidays
RomanceIls méritaient bien quelques jours de vacances. Elle venait de perdre son travail. Il venait de se faire larguer par celle avec qui il s'imaginait faire sa vie. Quoi de mieux qu'une maison en bord de mer pour se remonter le moral ? Ce qu'ils igno...