Chapitre 12. Axel

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Samedi.

A bord de la mini Cooper à lignes roses de ma cousine, qui m'a souri comme une abrutie quand je lui ait expliqué pourquoi est-ce que j'avais besoin de sa caisse, je conduis jusqu'au centre-ville à une vingtaine de minutes. Je me sens comme un géant dans une boîte d'allumette, ainsi qu'un empoté qui peine à garder ses mains stabilisées sur son volant.
Tandis que Julia, elle, dans une foutue robe noir cintrée qui ne m'aide pas à rester concentré sur la route, sourit discrètement en découvrant le paysage verdoyant de la région. Sa frange brune qui vole doucement au gré de l'appel d'air produit par nos fenêtres ouvertes.

Elle paraît paisible, sereine. J'ai l'air au bord de l'infarctus, complètement raidi sur mon siège.

-Il est à peine dix-huit heures trente, tu veux aller boire un verre avant de dîner ? lui proposais-je, avec l'espoir de me détendre autour d'une bière.

Je n'avais pas proposé de rencard à une fille depuis ma rencontre avec Anaïs, il y a plus de quatre ans de ça en arrière. Et concrètement, ça me fou un stress affolant.

-Ouais, carrément.

-Cool, lui souriais-je, crispé.

Un silence plus ou moins confortable s'installe dans l'habitacle. Pendant qu'elle admire les kilomètres interminables de prairies qui surplombent l'océan en contre-bas, je ressasse bien malgré-moi la première fois que j'ai invité Anaïs quelque part.

Je devais avoir à peine vingt-ans, elle dix-neuf. On s'était rencontrés une semaine plus tôt à l'anniversaire d'un type avec qui je bossais à l'époque dans un magasin de bricolage, qu'elle connaissait du lycée. Le feeling est tout de suite passé, elle était belle, timidement souriante derrière un regard chocolat malicieux. On a discuté à l'écart des autres invités une bonne partie de la soirée. Elle m'a parlé d'un navet à l'eau de rose qui venait de sortir avec une telle insistance que je ne risquais pas de manquer l'allusion. On a échangé nos numéros et le week-end suivant, je l'invitais au cinéma.

Un rencard banal, même plutôt décevant puisqu'elle l'avait écourté tout de suite après la séance. Une histoire de partiel le Lundi matin. Une bise amicale distante et un « merci, bonne nuit » plus tard, je regagnais mon studio étudiant pour terminer la soirée solo en croyant ne plus jamais avoir de ses nouvelles.
Mais miraculeusement, quelques jours plus tard, elle me proposait d'aller boire un verre ensemble dans un nouveau bar à concerts. Ainsi de suite pendant deux semaines, jusqu'à ce que je me tente à l'embrasser pendant une visite guidée barbante dans un musée où elle m'avait traîné. Je m'ennuyais à mourir mais elle souriait sans cesse et ses pupilles pétillaient d'admiration, ce qui m'a visiblement suffi pour tomber sous le charme malgré l'ennui récurrent lors de nos rendez-vous, dont elle choisissait toujours le programme.

Mais en dépit de cet ennui et de l'ensorcellement maléfique sous lequel j'étais, je ne me suis jamais senti aussi nerveux que c'est le cas aujourd'hui lors d'un de nos rencards. Sans que je ne saisisses pourquoi est-ce que Julia à cette conséquence sur moi.

-Allo la terre ?

Je cligne des yeux quand une paire de doigts claquent devant eux, me ramenant au présent.

-Hein ? bafouillais-je. Désolé, je... Quoi ?

-Je te disais qu'il y avait un bar à cocktails juste là, sur la plage, me dit Julia en le désignant sur sa droite. Ça te dit ? Ca a l'air sympa.

-Ouais, bien sûr.

Je change de direction pour rejoindre le parking du l'établissement, l'esprit ailleurs. J'ai beau essayer de comprendre ce qui différencie mes rencards avec Anaïs à celui-ci, mon cerveau pédale dans le vide. La seule chose qui est évidente, c'est que je n'ai plus du tout la même confiance en moi qu'à l'époque.

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