35 : Bascule

418 66 10
                                    

C'est une sensation étrange, que celle qui vous maintient entre la conscience et l'inconscience.

Anael ne savait pas trop dans quel état il se trouvait. Etait-il en vie ? En train d'agoniser ? En tout cas, il ne souffrait pas. Etait-ce bon signe ?

Il se souvenait d'une sensation de complétude, comme s'il avait, ne fut-ce qu'un instant, uni toutes les facettes qui le composaient. Qu'avait-il réellement fait, dans cet entrepôt ?

Maintenant, il se demandait ce qu'il voulait faire. Rester comme ça, seul avec ses pensées ? Se réveiller, entouré d'ennemis ? S'endormir pour de bon, arrêter les souffrances, arrêter cette vie qui a si mal commencé et qui se finirait sans doute de la même manière ?

Il y avait quelque chose de plus, mais il ne savait plus quoi. Il oubliait quelque chose. 

Ses parents ? Morts.

Sa famille ? Il n'en avait jamais eue.

Alors quoi ? Des amis ? L'étaient-ils vraiment, des amis ? Avait-il le droit de les appeler comme ça ? Avait-il confiance en eux ? Et comptait-il, lui, pour eux ?

Anael n'avait pas envie de répondre à ses questions, il n'avait plus envie de réfléchir, plus envie de se battre contre la pesanteur qui l'aspirait vers les abysses... et la mort ?

Non, il y avait quelque chose. Quelque chose qui lui hurlait qu'il devait remonter à la surface. Mais quoi ?

Des yeux bleus. Oui, il les voyait, ces yeux bleus... Mais pourquoi est-ce que des yeux bleus allaient lui donner envie de revenir ? Il était si fatigué...

C'était les yeux de quelqu'un. De qui ? De quelqu'un d'important... de... d'un ami ?

Des yeux bruns, profonds et amicaux. Des iris vert feuillage. Des yeux bleu azur, des yeux remplis d'inquiétude, il lui semblait. D'inquiétude pour quoi ? Pour qui ?

Son coeur battait soudain plus vite. Il se rappelait, maintenant... Il devait revenir, pour tenir une promesse jusqu'au bout. Pour revoir ses... ses... amis.

Encore plus vite. Il lui semblait voir deux couleurs se scinder en son coeur, se propager d'un côté de son corps chacune, le bleu à gauche et le mauve à droite. Les battements les envoyaient dans tous ses muscles. La douleur revint aussitôt et il se mit à crier. Tout son corps brûlait, comme si, après avoir été gelé, on le passait dans les flammes.

Ses paupières étaient closes, mais il lui semblait voir défiler toutes les dernières heures devant ses yeux. Son cerveau bloqua sur une phrase et Anael sentit ses poumons se remplir brusquement d'air, avec une souffrance telle qu'il lui semblait qu'ils allaient se déchirer.

Arrête de te cacher.
Assume.

Inspiration. Expiration. Douleur.

Arrête de te cacher.

Explosion. Cri.

Assume. 

Vie. 

***

— Il se réveille.

Anael ne pouvait plus bouger. Il lui semblait qu'il s'était changé en statue de pierre... Ou alors l'épuisement le clouait au matelas, ce qui était plus plausible.

Ses paupières s'ouvrirent difficilement et il cilla. La lumière du jour traversait les parois de la tente et, lorsqu'il put distinguer des silhouettes, il eut un sourire épuisé.

— Oulà, il est malade, il a souri !

Sophia éclata de rire et faillit se jeter à son cou, mais Maïwenn la retint d'une main.

Eclipse ~ la guerre de la Morphiax [BxB] (FINIE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant