47 : Frissons

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Le soleil grimpait dans le ciel, éclairant les Ruines de ses rayons neufs, dans une belle teinte tamisée. Il se reflétait dans les cheveux noirs d'Anael, enflammait les boucles rousses de Maïwenn, illuminait les mèches dorées d'Orel et disparaissait dans les tresses ébènes de Sophia.

Ils trottinaient doucement, en silence, le long des murs de béton craquelé et des pans de pierres fêlées. Le petit groupe progressait dans une absence de son presque religieuse, qui laissait frétiller leur anxiété, tant cela leur faisait penser qu'un ennemi pouvait surgir à tout instant devant eux.

Anael respirait de manière régulière. Il forçait son esprit à se concentrer sur sa course, sur le trajet qu'il devait suivre : les éclaireurs leur avaient tracé un passage vers le campement des capitaines Reptiles, ou du moins sur quelques centaines de mètres. Ils ignoraient jusqu'où ils pourraient aller sans combattre, mais pour l'instant, ils avançaient.

J'ai presque envie qu'ils nous sautent dessus, cette attente est horrible. Ils pourraient sortir de n'importe où.

Il serra les dents et se borna à suivre des yeux les mouvements hypnotiques du dos de Maïwenn, qui courait devant. En guerrière aguerrie, elle portait son regard calme et tranchant sur tous les détails de leur environnement et veillait à ce qu'aucune mauvaise surprise ne se dessine à l'horizon, dans la mesure du possible. Elle était leur pilier dans cet environnement hostile.

Les battements sourds de son coeur résonnaient dans ses oreilles, si fort qu'il avait peur de ne pas entendre quelqu'un approcher. Anael secoua la tête et plissa les yeux.

— Là. Stop.

Le chuchotement brutal de Maïwenn les fit freiner sec. Ils se tapirent derrière un tas de pierres effondrées qui avaient sans doute autrefois été un mur, la respiration soudain plus rapide. Leurs combinaisons accrochèrent la poussière de béton lorsqu'elle s'envola vers le ciel sous le souffle déplacé par leur mouvement. Orel et Anael se retrouvèrent bien trop proches l'un de l'autre et celui aux mèches noires sentit brutalement sa température corporelle augmenter, mais il ne pouvait plus bouger de peur de déloger un fragment rocheux ou de faire du bruit. Le mur glacé collé à son dos, une jambe malencontreusement posée entre celles de l'Aigle et leurs cuisses en contact... Anael ferma brièvement les paupières et inspira profondément. Il avait une conscience accrue de la présence de son voisin aux cheveux d'or. Le moindre souffle, le moindre frôlement... Il entendait tout et le ressentait intensément là où ils se touchaient.

Leurs épaules s'effleuraient lentement, alors que leurs poitrines se soulevaient de concert. De l'autre côté d'Anael, Maïwenn et Sophia retenaient leurs respirations et la rousse jetait de fréquents regards à côté de leur abri, l'oreille attentive.

Les bruits de la nuit étaient perturbés par de lointaines rumeurs de combats. Des cris, des feulements, grognements en tous genres résonnaient dans l'air humide.

Et les humains ? S'ils nous voient ? Nous entendent ?

Anael secoua doucement la tête. Ce n'était clairement pas le moment ! Qui savait ce qui se cachait non loin et avait alerté la Combattante du groupe ? Certainement pas un humain inoffensif.

Il dégaina un poignard en silence et serra ses doigts autour du manche, crispé.

Des pas. Des pas légers, souples, où de petites griffes tintaient contre le macadam. Une respiration extrêmement discrète qu'Anael ne perçut qu'à grand peine, mais il ne put déterminer la taille de l'être qui l'émettait.

Au loin, derrière un mur écroulé, une tache noire plus sombre que la nuit alentours se détacha et sinua silencieusement entre les éboulis. Anael retint son souffle. Si l'être venait par ici, il les verrait à coup sûr.

Eclipse ~ la guerre de la Morphiax [BxB] (FINIE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant