30 : Plan

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Anael échangea un regard avec Sophia, qui s'était arrêtée à ses côtés. Elle ne semblait pas être aussi gênée qu'Anael par la dé-transformation d'Orel qui le laissait nu comme un ver, cependant ses iris sombres de Gazelle reflétaient une certaine inquiétude, à l'instar de l'Ours. L'herbivore expira bruyamment par les naseaux, invitant Orel à poursuivre en évitant tout de même de le regarder.

L'Aigle inspira.

— La bonne nouvelle, c'est qu'on est près de chez nous. La ville est à quelques kilomètres, au plus. La mauvaise... C'est que des Reptiles sont là aussi. Ils sont sur notre trajet et semblent nous chercher. Il faut qu'on se concerte pour savoir ce qu'on va faire... Redevenez humains.

Anael faillit rétorquer, puis se souvint qu'il avait une gueule d'ours et qu'il ne pouvait donc pas articuler. Il hocha donc simplement la tête et s'enfonça dans un buisson.

Il reprit forme humaine, puis s'extirpa sans problème des sangles et autres harnachements pour atteindre le sac qui contenait ses affaires. Il s'habilla en vitesse et ressortit, vêtu d'un t-shirt un peu trop petit et abîmé par la route ainsi que d'un jeans. Ses pieds nus effleurèrent les brins d'herbes sous ses yeux, car il gardait son regard rivé au sol, gêné. Dans sa main, il tenait les sacs d'Orel et de Sophia, ainsi que celui de Maïwenn dans l'autre. Les autres bagages étaient bien cachés dans le buisson, ils reviendraient les chercher en fonction de ce qu'ils feraient ensuite.

— Orel, tes affaires, lança Anael en maudissant ses joues, qui prenaient une teinte cramoisie.

Ses yeux contemplaient les pâquerettes avec application. Il entendit l'Aigle écraser quelques brindilles pour s'approcher, entendit son souffle, sentit sa main lui ôter le sac de ses doigts crispés. Puis Orel lâcha un simple « Merci » et s'éloigna, laissant Anael reprendre une fréquence cardiaque acceptable.

Il balança, quelques secondes plus tard — histoire de s'assurer qu'il n'apercevrait pas Orel encore à demi dévêtu — son sac à Sophia, encore Gazelle. Elle le réceptionna d'une corne strillée et le remercia d'un signe de tête, avant de s'éclipser dans les fourrés.

— C'est bon, je suis habillé, prévint Orel depuis l'autre côté de la clairière. Tu peux arrêter de compter les brins d'herbe.

— Tu voulais quand même pas que je te regarde, marmonna Anael en relevant la tête sans affronter le regard d'Orel.

— Non, quelle question, se crut obligé de répliquer l'Aigle en détournant les yeux, virant à la douce teinte rosée qui rappelait celle des pommettes de l'Ours.

Ce dernier se racla la gorge.

— Bon, où est Maïwenn ? Il faut la mettre au courant aussi, se pressa d'ajouter Anael.

— Je suis sûr qu'elle les a sentis à un kilomètre. Elle va bientôt revenir, mais elle n'est pas aussi rapide qu'un oiseau.

Anael hocha la tête, le regard rivé au fond de son sac. Accroupi, il sembla en inspecter le contenu. Orel s'approcha et s'assit à ses côtés.

— Tu regardes quoi ?

— Hem, je... Je cherche des chaussures.

— Pas besoin. J'en ai pas mises non plus. On reste ici le temps que la Renarde revienne. Après, on avisera.

— C'est vrai, répondit l'Ours en refermant la tirette de son sac usé et plein de poussière — ainsi que de poils bruns.

Il s'assit à son tour et étendit les jambes, penchant le tronc vers l'arrière, pour basculer le visage vers le ciel. Il était bleu, sans nuage... Mais il sentait le vent le frôler, une brise fraîche qui devait sembler glaciale aux humains. Mais pas pour lui. Il n'avait jamais froid... Et les rayons dorés de l'astre au zénith lui caressaient la peau, apportant une chaleur bienvenue.

Eclipse ~ la guerre de la Morphiax [BxB] (FINIE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant