Chapitre 16.

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Mattys m'attendait à l'heure convenue, tout sourire.

— Aurais-tu dompté Chris, après Joe, princesse ? me demande-t-il, tout sourire.

— Pourquoi tu dis cela ?

— Tu es vivante, lui aussi. Et pas de sms, remarque-t-il. Simple déduction.

— Il a été cool. En résumé, je suis ta nana, ça change tout.

— Exactement ce que je disais. Je vais bientôt ne plus servir à rien.

— Si, tu es mon mec. Si ce n'est plus le cas, je redeviens une cible. A gagner ou à abattre. Au choix.

— Bon. Alors je vais rester encore un peu ! dit-il en rigolant.

— Tu as intérêt.Tu me ramènes ou j'appelle Oliv ?

— Je te ramène, princesse. Par contre, demain, je ne peux pas. J'ai un rendez vous.

—Tu sais, je peux prendre le bus. C'est grave ton rendez vous ?

— Je n'espère pas. Je vais voir un mec avec qui je discute depuis quelques semaines.

—Je suis contente pour toi. Sois prudent...avec lui.

—T'inquiète pas. On va se retrouver dans un lieu public, pour cette première fois.

— Ça me rassure. Sois discret, par rapport à ta famille.

— Je te promets, princesse.

La journée du lendemain s'est passée de la même façon. Sans problème. Pas de remarques.
A croire que les autres s'habituaient à me voir avec Mattys.
Seul Joe continuait à ne pas me mettre à l'aise. Il n'avait fait aucune nouvelle remarque aucun geste ou regard déplacé. Pourtant, par prudence, j'évitais de rester seule avec lui.

— J'y vais, princesse. Tu attends Oliv, on est d'accord ?

— Oui. Tu me saoules. Et toi, fais gaffe.

— Promis. A demain matin.

***

(Mattys)

Elle n'est pas croyable. Elle s'inquiète pour moi, comme si j'étais son mec. Dire que je lui ai pourri la vie. Je suis vraiment un connard ! Juste pour que les autres me laissent tranquille.
En attendant, en quelques jours, elle a réussi à se faire apprécier. Elle a un tel aplomb.

En attendant pour moi, c'est le grand jour. J'ai enfin eu le courage de m'inscrire sur ce site de rencontres. Cela semble stupide, mais dans une petite ville, rencontrer en toute discrétion un gars, est trop risqué. Si mon père découvre mon petit secret, je suis mort.

Le mec avec qui j'ai rendez vous se nomme Nathan. Il a 18 ans. Nous discutons depuis presque quinze jours. J'avoue que je stresse. C'est une première fois pour moi. Aussi bien pour un rendez-vous avec un inconnu qu'avec un mec.
On a rendez vous dans un café, au centre dans une ville à vingt cinq kilomètres d'ici.

M : Je suis devant. Tu es où ?

N: Derrière toi.

Je me retourne. Il est là. La photo n'était pas truquée. Ses yeux sont deux billes bleues pleine de malice.

— Salut. Je suis un peu à la bourre, m'excusé-je.

— Non, j'arrive à l'instant. On va s'asseoir ?

— Ouais. Ça a l'air d'être sympa ! Tu viens souvent ?

— Régulièrement. Je suis d'ici. Dans ce café, ils sont tous tolérants. C'est rassurant pour des premiers contacts. Tu veux boire quoi, un café ? Une bière ?

— Un café, s'il te plaît. Oui. C'est ce que je te disais, l'autre soir... Je ne suis pas très courageux. Dans ma ville, les homos sont très mal tolérés. Je veux juste finir mon année scolaire, après je serai majeur. Je choisirai.

— Ce n'est pas une question de courage, Mattys, mais de circonstances. Autour de moi, il y a pas mal d'homos. Je les connaissais mais je ne savais pas. Beaucoup se cachent.

— Je suis dans ce cas, remarqué-je. C'est une situation absurde. Au lycée, je fais un jeu de fou.

— Explique-moi cela dit-il en appuyant son menton sur son poing d'une façon très sexy.

— Je joue au badboy. Il est plus facile, plus enviable d'être celui que l'on craint que celui qu'on humilie. J'ai peur que tu partes en courant, en entendant cela.

— Non, ne t'inquiète pas.  Continue.

— Au lycée, je suis un salopard depuis plus d'un an avec une fille. Isa. Je joue le badboy, le rôle que je me suis moi-même donné. Elle subit mes moqueries, mes tentatives d'attouchements. Elle ne se laisse pas faire. Il y a à peine un mois, je lui ai fait une proposition. Elle fait semblant de sortir avec moi, et en échange, je la protège. Depuis plus personne ne l'emmerde. Et moi, je ne ressens plus cette pression constante de mon entourage. Je ne veux plus faire semblant d'avoir envie d'une fille. Mon corps ne veut pas.

— Et tu te dis pas courageux, s'étonne-t-il ? Et la fille, elle a accepté ?

— Oui. C'est génial. Avec elle, je suis moi-même. En toute confiance. Et elle, elle prend de l'assurance.

— Tu lui as dit pour ce soir ? Oui, bien sûr, sourit-il comme si c'était une évidence. Et je crois en plus qu'elle devait être heureuse pour toi, pas vrai ?

— Je n'en suis pas sûr. En fait, elle avait surtout peur pour moi.

— Sérieux ? Appelle-la pour la rassurer, si tu veux.

— Non merci. Tu veux boire un autre truc ?

— Non. En fait, j'avais dans l'idée qu'on aille se balader. Le courant passe bien entre nous. Qu'en dis-tu ?

— Cela me convient tout à fait. Nathan, il faut que je te dise un truc. Je n'ai aucun doute sur mon homosexualité. Mais...

— Tu n'as jamais été jusqu'au bout, j'avais compris. Je ne vais pas t'agresser, Mattys. J'aimerai prendre le temps de te connaître.

— Ça me semble être une bonne idée. Discuter. Bouger. Sortir. Tu es encore au bahut ?

— Non. Je bosse dans un bar discothèque. Barman. Sympa. Je rencontre plein de personnes. Par contre je bosse souvent le weekend.

— Tu vis chez tes parents ?

— Non, plus maintenant. J'ai un petit appart mais c'est chez moi. Me fais- tu confiance suffisamment pour y venir avec moi ?

— J'en ai très envie. La confiance est là. Je n'ai pas peur, je crois que je pourrais te maîtriser si tu as des mauvaises intentions. Mais ce n' est pas pour cela que j'ai envie de te suivre.

— Pourquoi ?

— A cause de ton regard, dis- je en rougissant de honte. Tes yeux sont comme deux îles. Très sexy.

— Ne rougis pas Mattys. Je ressens la même chose. Je vais payer, et on y va.

— Je dois fumer une clope... De suite.

— Trop d' émotion ? se moque-t-il.

— Ouais.

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