(Nathan)
Je le regarde dormir. Mattys a l'air si paisible. Il m'a impressionné tout à l'heure : touchant et particulièrement doué. Je n'en ai pas envie mais je dois le réveiller : il est presque cinq heures.
— Mattys. Réveille-toi, lui chuchoté-je en lui caressant la tête tendrement.
— Nan ! répond-il, boudeur. Pas envie de partir.
— Mattys. Il est presque cinq heures. Tu as une heure de route.
— J'arriverai en retard...
— Arrête ! Tu m'as promis, dis-je énervé.
— Excuse moi. Bien sûr que je vais y aller. Ce n'est pas pour cela que j'en ai envie. Fais moi un câlin.
— Tu sais très bien ce qui va se passer si j'accepte. Je ne veux pas que tu sois battu à cause de cela.
— Il trouvera une autre raison... Je prends un café et je pars, dit-il sèchement en se levant.
Sa voix est devenue froide. Je ne sais même pas s'il s'en est rendu compte.
Si je mettais fin à notre histoire, il ne serait plus en danger ! Je me mens à moi même : C'est trop tard, il ne fera pas machine arrière. Je le vois dans sa façon de se tenir. Il n'affrontera pas son père mais si celui-ci découvre la vérité, Mattys ne niera pas.
Il est toujours immobile, devant son café, remuant la cuillère.
J'entends mon portable vibrer sur le plan de travail.
Puis le signal pour un message. Curieux, je vais voir.Julien : Appelle-moi !
Julien est le copain de mon cousin, celui qui me prête l'appart.
Mattys me regarde avec inquiétude.
— Qu'est-ce qui se passe ? me dit-il. Tu es tout blanc !
—L'ami de mon cousin. Il veut que je l'appelle.
— Fais-le, alors, insiste-t-il.
— Je le ferais tout à l'heure, t'inquiète.
— Fais-le tout de suite. S'il te plaît.
— D'accord, dis-je.
— Julien ? dis-je à la voix qui décroche quelques instants plus tard.
— Nathan. Oh putain, mec, je suis content que tu sois réactif. Éric a eu un accident, dit-il essoufflé.
— Quoi ? Calme-toi, Julien. Explique-moi ce qui se passe.
— Il a dévissé... Il a fait une sacrée chute. Il est dans le coma, Nath. Ses parents ne répondent pas... Je ne peux rien faire ici. Tu sais, toujours pareil, je suis pas de la famille. Il faut que tu viennes.
— Julien. Je n'ai pas le fric, avoué-je honteusement.
— Je m'occupe de cela. Ne traîne pas. Je regarde pour les vols possible et je réserve. Surveille ta boite mail. Le toubib arrive.
Et il raccroche. Je suis debout, choqué. Éric est dans le coma. Je sens les bras de Mattys autour de ma taille.
— Nathan ? Parle-moi.
— Éric, mon cousin a eu un accident. Il est dans le coma. Julien, son ami n'arrive pas à joindre ses parents. Mon oncle et ma tante. Il faut que j'y aille.
— Où ?
— En Argentine.
— Quoi ? Quand ?
— Julien s'occupe de réserver mon vol. Il ne peut rien faire. Légalement. Moi si. Éric m'a laissé une procuration. Je suis désolé, Mattys.
— De quoi es-tu désolé ? Il est important pour toi. Et il a besoin de ta présence. Tu reviendras. Je vais y aller. Tu as des choses à régler.
— Mattys. N'oublie pas ta promesse. Je t'appelle. Ou passe au bar, je leur donnerai des news. Embrasse-moi.
— Je ne préfère pas. Fais attention à toi.
(Mattys)
Je m'en vais. Je sais que je me comporte comme un connard. Refuser qu'il m'embrasse ! Comme si c'était de sa faute, je pile et fais demi tour. Je pénètre chez lui sans même frapper. Il est assis par terre, en larmes. Je me glisse à ses côtés. Tout simplement.
— Pardonne-moi, lui chuchoté-je.
— Reste avec moi, s'il te plaît. Un peu...
— J'ai le temps. Tu as essayé de contacter ses parents ?
— Ils ne répondront pas. Éric et moi, sommes des gens peu respectables pour eux. Julien n'est rien au regard de la loi. Juste son compagnon.
— Et il t'a donné une procuration ? Pourquoi pas à son mec ?
— Il a été échaudé par son ancien copain. Moi, je suis son cousin et je suis gay. Je ne le lâcherai jamais. Mais je m'en veux de te laisser toi, chuchote-t-il.
— Je ne suis pas dans le coma et Oliv me soutiendra. Pour le reste, je vais avoir plus de mal. Je vais faire fonctionner ma boite à souvenirs. Prépare ton départ. Sereinement. J'irai bien.
— Embrasse-moi.
— Oui. Pour ma boite à souvenirs. Tu vas me manquer. Donne des nouvelles.
Il est plus de six heures, je suis sur la route. Je veux être à l'heure, je suis trop fragile, je craquerai.
Comment vais-je résister en l'absence de Nathan ? Je suis un égoïste. Il a peur pour son cousin et moi je pense juste que je vais être seul.
J'avais misé sur sa présence pour tenir jusqu'à ma majorité. Mi- juin. Je ne vais pas y arriver sans lui.
Je me gare, à l'heure. Pas de lumière. Je file droit dans ma chambre. Ne pas le rencontrer, surtout, ne pas le rencontrer.
Je l'entends descendre.— Ah ! le petit con a compris la leçon !
Et il rigole. Je serre mes poings, mes ongles enfoncés profondément dans ma peau. Je n'y arriverai pas. Quand j'entends la porte d'en bas claquer, signe qu'il est parti, je desserre mes poings. Je sors mon portable.
M : Je peux te voir tout à l'heure ?
O : A dix heures. Dans ton coin ou chez moi ?
M : Mon coin.
O : Tu es chez toi ? Il t' a touché ?
M : Je suis dans ma piaule. Je ne l'ai que croisé. Je ne vais pas y arriver.
O : Bien sûr que si. On sera là avec toi.
M : Nathan doit partir en Argentine. Un souci familial. Je ne vais pas y arriver.
O : Arrête de dire ça, petit. Sois fort. Évite-le. Dès que tu peux y aller tu fonces et tu m' appelles.
(Oliv)
Je ne peux rien faire de plus. Si je débarque chez son père, c'est Mattys qui le paiera d'une manière ou d'une autre. Je dois avoir des infos. Je vais appeler Nathan.
— Nathan ?
— Oliv ? Qu'est-ce qui se passe ?
— C'est ce que j'aimerais savoir. Mattys est mal. Tu crois que c'est le moment de te tirer en Argentine ? Après hier soir ? l'agressé-je
— Je ne peux pas faire autrement. Mon cousin a eu un accident là- bas. Il est dans le coma. Je suis le seul à pouvoir le faire rapatrier ici.
— Il le sait ? Tu lui as expliqué ?
— Bien sûr. Tu crois que je pourrais faire cela sans lui expliquer ? Il allait bien quand il est parti.
— Il est très doué pour camoufler sa douleur. Je vais m'en occuper, Nathan. Va voir ton cousin. Je vais l'aider.
Si toutefois il me laisse faire.
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Différents et Alors
RomantizmDeux adolescents, presque adultes. Deux lycées différents. Deux villes différentes. Leur point commun : ils découvrent tous les deux leur attirance indéniable pour les garçons. Des vies, des familles différentes, des éducations différentes. Et pour...