Chapitre 17.

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Nathan me précède. Il habite à la sortie de la ville. Je n'aime pas laisser ma bagnole, alors je le suis.
J'avoue que je suis un peu angoissé. Il m'attire : aucun doute là-dessus. Après, suis-je prêt à franchir le pas ? Je n'en sais rien encore.

- Tu vas rester dans ta voiture ? me demande-t-il appuyé à ma portière.

- Non. J'arrive, dis-je en sortant.

- Si tu es trop stressé, nous pouvons repartir en ville, me propose-t-il.

- C'est juste que je n'ai jamais fait ça. Suivre un mec, cela m'angoisse.

- Moi non plus, je n'ai pas l'habitude de cela, Mattys. Et ce n'est d'ailleurs pas ce que je suis en train de faire. En ce moment, je propose à un mec de venir à la maison pour discuter, boire un coup. Tu t'attends à autre chose ?

- Tu crois que les filles se posent autant de questions ?

- Je ne sais pas. Je n'en connais pas beaucoup. Tu demanderas à Isa. Viens.

Il me fait signe d'entrer. La porte donne directement sur une pièce de vie relativement grande. Style industriel. Très lumineuse, chaleureuse. Avec un poêle à bois. Un canapé d'angle. Une grande, très grande télé. Une cuisine.

- C'est l'appart de mon cousin, précise-t-il en voyant mes yeux ébahis. Il est à l'étranger pour un an. J'en profite.

- Sympa. L'appart... et ton cousin.

- Veux-tu boire un truc ? Bière, jus de fruits, soda ? me propose-t-il.

- Bière, s'il te plaît.

- Assieds-toi. Avec ou sans verre ?

- Sans, merci. Je peux fumer ? A la fenêtre.

- Tu peux même à l'intérieur. Éric, mon cousin, est un fumeur. Détends- toi Mattys. Tu étais plus accessible sur le site. Drôle. Curieux. Excitant. Alors que là, tu es coincé, timide.

- Je suis désolé. Je vais partir.

-Non, attends !J'ai une idée. Prends ton portable et écris-moi. Je veux apprendre à te connaître. Si tu es plus à l'aise par écrit, ça me va !

- J'accepte l'idée. Merci Nathan. On commence ?

- Ouep.

M: Je suis bizarre. Je n'ai pas une confiance énorme en moi.

N: Face aux gens ?

M: Oui. Derrière un écran, c'est plus facile... de cacher ses émotions.

N : Tu en as peur ?

- Je suis devenu un expert en camouflage. Mon père et mes frères détestent les homos . "Les tentouses"comme ils disent, expliqué-je en passant sans même le réaliser au langage oral.

- Donc, tu te caches tout le temps ? continue-t-il de la même manière.

- A force, je ne suis même plus sûr de ce que je suis. Tu as l'air d'être tellement à l'aise avec tout ça, lui fais-je remarquer.

- Que cela te déstabilise... tu es avec moi. Tu peux enlever ta carapace. Je ne juge pas. Lâche toutes tes questions. Profites-en.

- Même si elles sont trash ? osé-je.

- Surtout celles-là. Je me les suis posées aussi, tu sais.

- D'accord. Tu as déjà embrassé un mec ?

- Bien sûr. Plusieurs même. J'assume mon homosexualité depuis plus d'un an. Je n'ai pas de relations longues.

- Et... As-tu ? demandé-je, rougissant.

- Eu des relations sexuelles ? Oui, répond-il sans aucune gêne. Passives.

- Ça fait mal ? Tu n'es pas obligé de répondre.

- Je pense que c'est comme pour une nana. Tout dépend du partenaire. Juste une précision et d'importance : Capote toujours.

- Et tu as déjà...

- Sucé ? Oui. Pas toi ? As-tu déjà embrassé un mec, Mattys, me questionne-t-il à son tour.

- Non...jamais...

- On dirait que tu as honte ? Tu sais, je connais plein d'homos. Si tu veux qu'on se voit, tu en rencontreras. Tu en trouveras bien un avec qui tu aies envie ?

- Humm... me contenté-je de dire.

- Tu es un sacré connard, s'exclaffe-t-il. Tu as envie ? C'est ça ?

- Je ne sais pas si c'est une bonne idée en fait... je vais rentrer.

- Ne sois pas idiot ! Viens là.

Et il me tire sur le canapé, en rigolant.

***

A l'extérieur, je fume en me repassant dans la tête les moments précédents. Je suis bien. Je ne pensais pas ressentir ce bien-être . Nathan a de l'expérience. Il a été très doux, très patient. Je me suis enfin senti à ma place. J'ai adoré ses bises, ses caresses. Il ne m'a rien imposé.

- Ça va ? me demande-t-il, en me rejoignant.

- Oui. Tu vas attraper froid, j'arrive.

- Et pas toi ? Tu peux fumer à l'intérieur. A moins que tu le fasses pour m'éviter...

- Non.

Il est allongé sur le lit, me regardant le rejoindre. Je n'ai pas envie de partir. Je me couche à ses côtés, sans rien dire.

- J'avais peur que tu ne t'enfuis, chuchote-t-il.

- En fait, c'est drôle car je me disais que je n'avais pas envie de partir.

- Et bien, reste alors. Tu es un drôle de mec. Tu es pareil avec les filles ?

- Comment suis-je ?

- Tu donnes l'impression de mesurer chaque mouvement, d'être en apnée. Je me trompe ?

- Chez moi, je dois être à l'image de ce que veut mon père. Comme mes frères. Lourds, vulgaires, agressifs.

- Tout ce que je déteste, commente-t-il.

- Au lycée, je joue au badboy arrogant qui prends et jette les filles.
J'en peux plus. Je m'épuise à tenter de tout contrôler.

- Et il se passerait quoi si tu disais merde ?

- Oh sûrement une raclée monumentale et il me retirerait du lycée.

- Il te reste un an pour finir le cycle, vas- tu tenir ?

- Je ne sais pas. Je te remercie...

- Ce n'était pas une corvée ! Tu es très excitant. Et plutôt doué pour une première fois !!

- Fous- toi de moi, ne te gêne pas !

- Ce n'est pas le cas. Et si c'est juste un manque de pratique, on peut arranger ça !! A toi de me montrer ce que tu sais faire.

- Avec un grand plaisir.

Il est sept heures, je me lève, lui fais une bise sur le nez. Mon père ne tolère pas que je ne sois pas à la maison après huit heures. Même si c'est pour ne rien foutre.

- Continue à dormir. A bientôt.

- Sois prudent. Un sms pour me rassurer, je bosse cette nuit.

- Je ne regrette pas d'être venu. J'y vais.

Je monte dans la bagnole, et je prends la route vers chez moi. Je n'ai pas osé demander à Nathan s'il comptait qu'on se revoit. J'aimerai qu'il me présente des mecs. Comme tout à l'heure, je me sens revivre. Et je ne sais pas pourquoi je me mets à beugler de bonheur dans ma bagnole. Si j'ai eu des doutes, ce n'est plus le cas. Ce que j'ai ressenti en embrassant Nathan me le confirme. Je n'ai jamais éprouvé cette excitation avec une fille.

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