4. ???

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- Salut, me murmura une voix douce.

C'était la voix d'une fille d'environ mon âge, qui avait des cheveux noirs mi-longs, avec de beaux yeux sombres. Son regard était profond, j'aurais pû m'y perdre pour toujours.

- Salut... lui répondis-je.

- Tu n'as vraiment pas l'air en forme.

En disant cela, elle s'alluma une cigarette. Je remarquais qu'elle portait un jean slim, des chaussures noires à talons et une veste en cuir. C'était très simple, mais ça rendait magnifique sur elle, elle était si belle. Elle tira une taffe et me la tendit.

- T'en veux?

Je regardai sa main, puis son visage, puis sa main à nouveau et lui pris la cigarette. Je la portai à ma bouche et inspirai. Je retenai ma respiration quelques secondes et expirai toute la fumée dans un soupir de soulagement.

Je penchais ma tête en arrière, comme pour relâcher toute la pression que je semblais accumuler depuis si longtemps avant de lui retendre.

Elle la reprit et la porta à sa bouche plusieurs fois avant de me demander :

- Alors, qu'est ce que tu fais ici?

- J'en sais foutre rien. J'étais à la soirée d'Alica... D'Alicie... Ali.. Putain... Je peux p'us dire son nom. En gros, une pute qui a tenté de me raser l'an dernier.

- Elle doit te détester.

- Je la déteste aussi, t'inquiète.

- Alors pourquoi aller à sa soirée?

- Parce que sinon j'suis pas au courant de tout c'qu'il s'y passe et j'ai l'air d'une cruche..

Elle ria légèrement à ce mot. Je la regardai, un léger sourire aux lèvres. Je lui repris la cigarette pour reprendre quelques bouffées avant de continuer.

- Et je crois que j'ai plus de mec.

- Ah.

Elle marqua un temps d'arrêt.

- Est-ce que c'est si grave que ça ? reprit-elle.

Je voulus y réfléchir mais mon cerveau était sur off alors je répondis un bref "non", sans conviction.

Après de longues minutes, je repris la parole.

- Dis-moi... soupirais-je. Ça t'es déjà arrivé de te rendre compte que tout ce en quoi tu croyais depuis longtemps... C'était de la merde?

- Genre le Père Noël?

Je riai nerveusement.

- Genre le Père Noël, ouais.

- Oui. Le prince charmant. J'y crois pas. Le grand amour, c'est que du vent.

Même s'ils ne m'étaient pas adressée, ses mots me touchèrent en plein cœur. Je sentis les larmes remonter à les yeux.

- T'as sans doute raison...

Elle écrasa son mégot sur le trottoir et se redressa.

- Tu as l'air d'avoir besoin de quelqu'un pour te remonter le moral.

Elle me tendit la main.

- Tu veux faire un tour?

De l'autre, elle le montra une grosse moto rouge pétant garée à deux mètres de là, que je n'avais même pas aperçu.

J'avais toujours rêvé de faire de la moto, mais selon mes parents, seuls les "racailles", les "voyous" conduisaient des motos.

Alors en m'imaginant leur faire un gros doigt d'honneur, je pris la main de cette mystérieuse inconnue et montai derrière elle.

Elle démarra et commença à rouler. Je lui serrais la taille, je n'avais même pas de casque. Mes cheveux s'emmêlaient dans le vent, mais je m'en foutais. L'alcool dans mon sang me faisait adorer ce moment, alors que j'aurais dû être terrifiée, j'étais en pleine euphorie, et le risque de mourir si je la lâchais m'indifférait.

Je sentais mon coeur battre à toute allure dans ma poitrine... Je me sentais vivante. Plus vivante que jamais.

J'avais envie de hurler, et c'est ce que j'ai fait.

Nous étions sur l'autoroute, à 150 km/h, et je me suis mise à hurler ma joie dans un grand cri qui n'a pas eu l'air de gêner mon chauffeur.

La vitesse, l'adrénaline... je ne voulais plus jamais descendre. Mais j'avais bien conscience que ce moment devait prendre fin.

Après la balade, je lui indiquai la route vers chez moi.

En s'arrêtant, elle regarda ma maison, perplexe.

- Qu'est ce qu'il y a? lui demandais-je, toujours dans son dos.

- T'avais dit que t'habitais une maison.

- Et? C'est une maison.

- On est dans le quartier riche, et ça c'est un manoir.

- Je ne l'ai pas choisie.

C'est vrai. Je n'avais pas choisi ma maison, ni les voitures garées devant, ni la piscine derrière, j'avais ce sentiment que rien ne m'appartenait, que je n'étais pas chez moi ici.

Je commençais à déprimer en descendant de la superbe moto lorsque la fille aux cheveux noirs me retint le bras.

- Je t'ai mis quelque chose dans la poche, si tu as besoin.

Elle me fit un clin d'oeil, qui me passa inaperçu, car je sentis son pouce me carasser tendrement la main l'espace d'un instant.

Elle me lâcha, redressa sa moto et partie dans un grondement terriblement attractif.

Je l'observais partir avant de mettre la main dans la poche de ma veste, pour y trouver un petit papier avec écrit dessus :

"Jade - 555-XXX"

Était-ce le papier qu'elle donne aux gars pendant les soirées? Son vrai numéro? Son prénom ?

- Jade... répétais-je, seule dans ma rue.

Je me retournai vers cette si grande maison et marchai jusqu'à la porte -non sans difficulté.

Malgré cette montée d'adrénaline, l'alcool était toujours là et faisait bien effet. Je retirais mes talons pour mettre un pas devant l'autre et diminuer mes chances de tomber.
Je gravis quelques marches pour arriver devant la porte d'entrée.

Je cherchai mes clefs dans ma poche, sans les trouver.

Merde.

Je les avais perdues?

Sans doute.

Je fis le tour de la maison pour lancer un caillou sur la fenêtre de ma soeur, avant de me souvenir qu'elle avait quitté la maison depuis bien longtemps.

Je voulais faire ça parce qu'elle le faisait lorsqu'elle était au lycée, et me répétais, à chaque fois que je lui ouvrais, qu'un jour elle ferait pareil pour moi. En attendant, elle a quitté la maison juste avant mon entrée au lycée.

Au final j'ai ouvert le cabanon du jardin pour y chercher un tournevis, et j'ai démonté la poignée de la baie vitrée.

Entrer par effraction chez nous était d'une facilité... Heureusement que j'ai désactivé l'alarme avant de partir.

Je jetai mes chaussures dans un coin, ma veste dans un autre, et m'écrasai sur mon lit. J'avais toujours le papier dans la main.

Je le relus une dernière fois à voix haute :

- Jade.

Cette fille m'avait définitivement fait de l'effet. Je devais la revoir.

Where Life BeginsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant