Je hochai la tête à son approbation et lui ajustai l'oreiller dans le dos. Blessure à l'abdomen, il ne fallait pas tirer sur les abdominaux à moins d'aggraver la blessure et la douleur. L'armoire à pharmacie était à côté des douches, mais je passai à la cuisine me laver les mains et prendre une bouteille de whisky. Il en aurait besoin... Je remontai, la tension m'écrasant comme une mouche sur une vitre, puis retournai dans la chambre, installant tout le matériel sur la chaise que j'avais mise à côté du lit. Je m'assis sur le lit devant Levi et lui tendit la bouteille. Il la saisit et en but plusieurs gorgées d'une traite avant de me la tendre à mon tour. J'hésitai quelques secondes avant d'en boire quelques gorgées. Je réussis à lui enlever son pull sans trop le faire grimacer et sortis une gaze à imbiber de whisky et à appliquer sur la plaie. Là, il grimaça.
"... Putain de merde..."
Râla-t-il. Je commençai à sortir le fil et l'aiguille recourbée. Je regardais sa peau, hésitant à devoir la planter et le faire encore souffrir, mais à ce niveau-là c'était soit il souffrait pour ne plus souffrir, soit il souffrait un peu moins pour que ça s'infecte, le fasse encore plus souffrir, et qu'il-... J'envisageai toutes les possibilités avant d'en venir à cette rapide conclusion: il fallait que j'y aille. Ma main tremblait. Il posa la sienne sur la mienne. Je comprenais à peine ce qu'il disait tant il soufflait ses mots.
"... confiance en toi... réussir."
Je le regardais un court instant. Ma main s'arrêta de trembler. Je commençai point par point jusqu'à la fin où il souffla douloureusement. Je posai à mon tour ma main sur la sienne après lui avoir mis des bandages. Puis, inconsciemment, je me redressai et lui posa un baiser sur le front. Après m'en être rendu compte, je m'éloignai vivement. Merde...
"Il-... Il vaut mieux que tu ne bouges plus pendant un... un certain temps, je dormirai en bas."
Bégayai-je, de nouveau rouge de honte. Je tirai la couverture sur lui pour qu'il n'ait pas froid.
"Je ne vais pas te virer de ta propre chambre, c'est à moi de partir."
Souffla-t-il, fatigué.
"Non, non, tu es épuisé et tu ne dois plus bouger.
- Reste, il fait froid en bas."
Je secouai la tête.
"Non, non, cela ira pour moi."
J'allais ouvrir la porte pour sortir lorsqu'il m'interrompit de nouveau.
"Je suis resté avec toi lorsque tu n'allais pas bien.
- Et?
- ... Et... je ne vais pas bien."
Avoua-t-il en détournant la tête. Je pourrais jurer l'avoir vu rougir à cette instant. C'était craquant. Je soupirai, laissant tomber, puis retournai à ses côtés. Je m'assis sur le lit.
"De toutes façons, je suis ton caporal et c'était un ordre, donc je n'avais pas à me justifier de... de ça."
Là c'était définitif, il rougissait.
~
Elle se doutait que je n'avais pas demandé cela en tant que caporal, loin de là. Ce soir... J'étais tout sauf un simple supérieur.
"Oui, oui, tu es mon caporal."
Répondit-elle, se doutant un peu que je voulais juste me trouver une excuse bidon pour justifier ma demande quelque peu étrange. Autant ce soir je n'était pas un caporal, autant être son caporal... Sonnait bien.
"Par contre je ne peux pas dormir une fois de plus dans mon uniforme, je vais le froisser. Donne-moi une minute et je reviens!"
Expliqua-t-elle vivement en saisissant un habit et en sortant précipitamment de la chambre. Elle n'avait pas tort. Mais ces minutes semblaient durer une éternité. La poignée se tourna, la porte grinça et s'ouvrit. Petra était là, un peu gênée. C'était la première fois que je la voyais sans son uniforme. Elle portait un large pantalon de pyjama bleu et la chemise qui allait avec, sous un cardigan jaune. Charmant petit ensemble qui lui allait comme un gant. Me rendant compte que je l'observais sans retenue depuis une bonne minute silencieuse, je me raclai la gorge et me décalai pour qu'elle puisse s'allonger à côté de moi. Elle hésita quelques secondes.
"D'accord, d'accord..."
Je me tournai vers le mur et la sentit s'installer derrière moi après un instant. Une interrogation apparut dans mon esprit, m'empêchant de m'endormir tout de suite. Qu'étions-nous chacun par rapport à l'autre? Nous nous occupions de l'autre, nous nous disputions, et parfois... Nous dormions ensemble. Elle me tutoyait même depuis quelque peu, m'appelant par mon prénom loin de ses camarades. Nous nous cachions du reste du bataillon, en fait. Personne ne savait que nous étions aussi proches l'un de l'autre. Proches? Nous étions... Proches? Ah bah... oui. En si peu de temps Petra était devenue une des personnes auxquelles je tenais le plus, sinon la personne à laquelle je tenais le plus. Lorsque j'avais cru mourir, mes pensées étaient allées vers elle, et elle m'avait redonné la force de combattre, et la force de croire au nouvel espoir surgi dernièrement.
Je l'entendais respirer dans mon dos, et pensais à ce que j'avais de plus précieux: l'entendre respirer. Lorsqu'elle dormait, elle avait le souffle léger d'une enfant recroquevillée derrière ses petits poings à fossettes. Ses petits yeux fermés et sa bouche ronde me rappelaient ceux d'un enfant autrefois comme elle. Je n'avais pas besoin de me retourner pour l'imaginer, pas besoin de la voir pour la trouver mignonne, et pas besoin de la toucher pour savoir que sa peau était douce et tiède. Pourtant je le voulais. J'avais envie de me retourner, la voir et la toucher, l'entendre et lui parler, la voir sourire et... L'embrasser. Ses lèvres semblaient exquises à chaque sourire qu'elle me faisait et pouvoir les embrasser encore et encore devait être semblable à voyager bien au-delà des nuages pour contempler le soleil. C'était elle, le soleil. Et j'aurais voulu qu'elle soit mon soleil. Si j'étais son caporal, après tout, elle pouvait bien être mon soleil, non?
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Et si y avait-il un espoir? (Romance Rivetra)
FanfictionDepuis qu'elle était soldate, Petra avait toujours refusé de dépasser une certaine limite avec ses camarades, et surtout avec son supérieur, le caporal Levi. Consciente de sa vie effaçable d'un claquement de doigt titanesque, elle était restée droit...