Chapitre 18-1

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Les premières minutes filèrent comme le vent. L'attention et le regard entièrement focalisés sur Nicolas, guettant le moindre signe de réveil, je ne les vis pas passer. Puis les doutes, les questions et l'angoisse firent leur grand retour occultant presque l'inconfort croissant de ma position.

L'humidité remontant du sol commençait à s'infiltrer à travers mes vêtements déchirés, mis à mal par ma métamorphose, me glaçant jusqu'aux os. Gelée, je décidai de me lever mais l'air froid qui m'accueillit n'était pas plus agréables. Résignée, j'enroulai mes bras autour de moi essayant de gagner vainement un peu de chaleur, regrettant de ne pas pouvoir me blottir contre Nicolas. Je l'avais enfin retrouvé, mais nous étions tout autant séparés qu'avant. Allait-il retrouver ses esprits ou demeurer cette bête sauvage et incontrôlable ? Que lui était-il arrivé ? Toutes ses questions tournaient en rond dans ma tête, quasiment au même rythme que mes pas.

Un bruit résonna soudain, écho de pas légers et discrets venant dans ma direction. Circonspecte, je cessai de m'agiter en quête illusoire de chaleur et attendis de voir apparaitre mon mystérieux visiteur. Lorsque le visage de Lyn apparut au détour du couloir je me détendis aussitôt, heureuse de la voir.

— J'ai fait au plus vite dès que j'ai appris que cette andouille d'Aaron t'avait laissé seule en bas. Ça va ? Tu ne t'es pas déjà changée en esquimau ?

— Pas loin, lui répondis-je en frissonnant.

— Tu m'étonnes ! Tu es à moitié à poil ! Ah ces mecs, je te jure ! ronchonna-t-elle en me tendant une pile de vêtements impeccablement pliés.

Je m'en saisis avec impatience et reconnaissance et, faisant fi de toute pudeur, commençai à ôter mes vieilles fringues sans attendre. Après tout, mes sous-vêtements avaient survécu eux, sinon j'aurais probablement hésité.

— Je ne sais pas s'ils seront à ta taille ? J'ai presque dû menacer Grant pour qu'il daigne me donner quelque chose de leur stock de secours.

— T'inquiète, du moment que c'est couvrant et chaud, le reste je m'en fou ! lui dis-je avec la plus grande sincérité alors que je glissais avec bonheur mes jambes dans le tissu molletonné d'un pantalon de survêtement.

Ce dernier, ainsi que le tee-shirt et le sweat noir coordonnés étaient trop grand d'au moins une taille. Mais comme je venais de l'affirmer à Lyn quelques secondes plus tôt, c'était le cadet de mes soucis. J'étais en train de lacer mes vieilles baskets élimées, quand mon second problème majeur c'est manifesté avec force bruit.

— Pour ça aussi j'ai ce qu'il te faut, me dit Lyn avec un petit sourire en me tendant un sac en toile.

A l'intérieur s'y trouvait une couverture roulée, un sandwich entouré de cellophane, une bouteille d'eau et une pomme.

— Merci beaucoup, tu es vraiment parfaite ! lui dis-je en me jetant sur le sandwich.

— Pas tant que ça. La bouffe, c'est Thomas qui y a pensé, m'avoua-t-elle en me tendant un second sac, visiblement plus grand et plus rempli que le précédent. Ça c'est pour Nicolas, ajouta-t-elle en le posant par terre. Comment va-t-il ?

Le ton et la tension dans sa voix trahissaient son inquiétude presque autant que son langage corporel, dos à la cage.

— Toujours inconscient pour le moment. Grant n'a pas fait les choses à moitié apparemment.

— Ne t'inquiète pas, il n'a jamais tué, ni plongé personne dans le coma. Il va se réveiller.

— Reste à savoir... comment ? répondis-je d'une voix funeste.

— Tu veux que je reste avec toi ?

— Non merci, c'est gentil, lui répondis-je après une légère hésitation.

De la compagnie aurait été un plus non négligeable, mais je savais aussi que lorsqu'il émergerait, quel que soit son état, il ne voudrait pas de spectateurs. D'autant moins un autre prédateur dans la pièce. Lyn acquiesça d'un simple signe de tête, visiblement soulagée par ma réponse.

— Tiens, me dit-elle en me tendant un téléphone portable. C'est l'un des appareils de secours de la communauté. Il te suffira d'appuyer sur cette touche pour joindre Grant directement. Thomas et Aaron sont avec lui. Appelle-les dès que Nicolas se réveille. Sinon, ils viendront te relayer dans deux heures. Tu es sûre que tu ne veux pas que je reste ?

— Oui certaine. J'ai besoin... nous avons besoin d'être seuls et puis, tu n'as pas vraiment envie de rester, affirmai-je avec un petit sourire, lui signifiant que je comprenais et ne lui en tenais pas du tout rigueur.

— Le voir comme ça... et j'ai peur que ma présence ne fasse pire que mieux...

— Je sais, et tu as raison. Va te reposer. On aura certainement besoin de toi lorsqu'il ira mieux, affirmai-je avec une assurance que j'étais loin de ressentir.

Elle hésita encore quelques secondes, puis après m'avoir fait un bref signe de la main assorti d'un petit sourire, tourna les talons et disparue dans le couloir. Je finis mon sandwich, puis repris ma place devant les barreaux en m'asseyant sur la couverture déroulée. La visite de Lyn m'avait fait du bien, mais être enfin seule m'apaisait. Je sentais que le moment qui allait suivre serait crucial, rien ne devait interférer.

Ce fut tout d'abord un soupir, puis une plainte, sourde et terriblement angoissante qui me tirèrent du demi-sommeil dans lequel j'avais sombré sans même m'en rendre compte. La plainte se mua vite en cris puis en grognements tandis que ses paupières se soulevaient. Ses yeux cherchèrent aussitôt mon regard et ses prunelles mordorées se rivèrent aux miennes tandis qu'il se redressait lentement. Je le laissai s'approcher, jusqu'à entourer les barreaux rouillés de ses mains. Comprenant qu'il était absolument impératif de rester immobile, je ne bougeai pas malgré mon instinct et mes sens qui me criaient de fuir. Un grondement sourd et menaçant s'échappa de ses lèvres lorsqu'il appuya sa tête contre la grille, humant l'air comme un animal.

— Nicolas, c'est moi Rose, tu me reconnais ?

Son regard inexpressif ne cilla pas, me fixant toujours de sa lueur sauvage. Il ne paraissait pas me reconnaître mais semblait plus calme et moins agressif que dans les souterrains.

— Nicolas, tu es en sécurité, repris-je en levant tout doucement la main pour ne pas l'effrayer.

Il se mit aussitôt à gronder mais je ne suspendis pas mon geste pour autant et dans un mouvement rapide mais doux vins poser ma main sur la sienne. Sa réaction fut aussi fulgurante que violente. Malgré les barreaux il inversa aussitôt ma prise et emprisonnant mes doigts entre les siens commença à me tirer vers lui, ses crocs claquants de manière menaçante. Je m'arque boutai et luttai contre lui mais c'était peine perdue, il était beaucoup plus fort que moi. C'est alors que mon poignet n'était plus qu'à quelques centimètres de ses crocs que mon instinct de survie pris le dessus. Au lieu de tenter de me dégager je calai mes pieds contre le bas de la cellule et posai ma seconde main sur son bras avant de libérer ma louve.

Je laissai mon aura éclater comme un feu d'artifice et recouvrir complètement celle de Nicolas. Ce dernier n'était plus là. Seul son loup était aux commandes et il n'obéissait plus à rien ni à personne.

— Si, à moi ! rugis-je en projetant mon ordre d'Alpha vers lui tel un boulet de canon.

Il n'y avait pas d'amour, de compassion ou de pitié dans cette commande, son loup n'aurait pas été en état de les comprendre. Ce n'était qu'un ordre brut, une obligation de soumission immédiate et heureusement, il y répondit. Je sentis le contrôle et l'humanité revenir progressivement, chassant l'aura rouge et malsaine entourant Nicolas. Sa prise sur mon poignet se relâcha et il se laissa tomber au sol dans un hoquet étranglé. Essoufflée et percluse de douleurs je me laissai retomber à mon tour, cherchant à reprendre mes esprits et pieds dans le monde réel, tout en priant de toute mon âme pour que cela ait fonctionné.

— Rose ?

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Les vacances sont finies alors me revoilà :-) Avec un rythme plus régulier et soutenu, promis ^.^ J'espère que ce chapitre de reprise vous aura plu ? Suite, normalement, mercredi :-)

Des bisous <3

Whisper - Ombre Fauve Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant