Stepbrother

5. Les Lopez

Maman tourne la tête vers moi et ouvre la bouche :

-Ambroise ! Va te changer tout de suite.

-Tu n'as pas de robes ? continue Charly.

-Un kimono ça compte ?

Ma mère passe une main sur son visage tandis qu'Idris sourit dans son coin, ravi du spectacle.

-Va au moins mettre une jupe ma chérie, soupire maman.

Je lève les yeux au ciel et remonte péniblement dans ma chambre. Je troque mes vêtements pour une jupe noire patineuse et je rentre un tee-shirt dedans. Je descends les escaliers en laçant mes Converse tout en grommelant dans mon coin.

Je passe rapidement devant Charles et maman et je pousse la porte d'entrée pour sortir de la maison. Je me dirige vers les voitures et monte directement dans la BMW mais Idris me rejoint rapidement et s'assoit à la place du conducteur.

-Tu t'es trompé de siège.

-C'est ma voiture. Mais tu peux aller dans celle des vieux si tu veux, répond-il en défaisant les deux premiers boutons de sa chemise.

Je vois Charly, Angèle et maman se diriger vers la Mercedes grise ; je n'envisage même pas l'idée d'y aller. Ilan monte sur les sièges arrière de la voiture et le brun démarre en suivant les parents.

-Tu as fait fort ce soir, déclare-t-il lorsqu'il s'arrête à un feu.

-On a toujours respecté le code vestimentaire des Lopez, ajoute Ilan.

-Pourquoi ? Ils ne sont pas de la famille royale tout de même ?

-Non mais Cassandre veut qu'on s'habille convenablement quand on va chez eux.

-Ils ne sont pas censés être amis ? dis-je en me tournant vers Idris.

-Papa et Cassandre les ont rencontrés lors d'un défilé de mode.

-Une bonne brochette de riches, ça ne change pas de d'habitude.

Le brun sourit en coin et se gare devant une maison - ou plutôt un palace. Je sors de l'auto et découvre l'immense bâtiment.

J'entre dans la demeure à la suite d'Ilan et aperçois des tables remplient de nourritures, des serveurs et beaucoup de personnes. Ils sont tous habillés très chiquement, avec des grandes robes signées par des créateurs de luxe ou des costumes valant au moins cinq cents euros. Moi qui croyais que ça allait être une soirée tranquille, je commence à comprendre pourquoi maman voulait que je m'habille autrement qu'avec un jean.

Heureusement que j'ai pensé à prendre la jupe dans ma valise.

Mes moyens financiers ne me permettent de n'acheter des vêtements que dans les grandes surfaces, alors de là à avoir des pièces de luxe... De toute manière avec mon salaire de babysitteuse, je n'ai même pas assez de sous pour faire du shopping, ni m'acheter un nouveau téléphone, ni une voiture... bref la liste est longue.

Je cherche maman des yeux et la vois discuter avec une femme habillée entièrement de jaune et d'orange. C'est un parfait coucher de soleil ambulant. Autour de moi, tout le monde me dévisage et je soutiens leurs regards jusqu'aux derniers pour ne pas perdre la face.

Je me dirige alors vers le buffet pour profiter un maximum de cette fête. Pendant que je le dévalise, j'aperçois une fille qui a trois assiettes dans les bras. Elle aussi me voit et me sourit en s'approchant de moi pendant que je rafle tous les plats que j'ai sous la main.

-Eh bah toi, tu sais te faire remarquer !

-Tu parles de mes habits ou du nombre d'assiettes que j'engloutis ? je demande en riant avec elle.

La fille doit avoir mon âge, elle a des yeux gris très expressifs et elle est un peu plus grande que moi. Elle est métisse, sa peau est magnifique et ses cheveux sont courts et noirs, coupés en un carré parfait. Elle porte une jupe patineuse - mais je devine qu'elle ne l'a pas achetée au même endroit que moi - avec un top à paillettes.

-Au fait, moi c'est Cleo, se présente-t-elle.

-Ambre.

On reste silencieuse et j'en profite pour observer les personnes autour de nous.

-C'est ma mère qui a organisé cette soirée, déclare-t-elle d'un coup.

-Waouh... pas mal la baraque.

Cleo me raconte qu'elle vit ici depuis toujours avec son frère et ses parents. Ils organisent fréquemment des soirées pour montrer leurs richesses - je reprends ses propres mots - et pour créer de nouveaux contacts. En riant, je lui dis à mon tour que je suis en vacance chez ma mère et que moi par contre, je n'ai pas un rond.

A un moment donné, la femme habillée en coucher de soleil vient vers nous.

-Ma chérie, tu es là. Qui est ta nouvelle amie ?

-Elle s'appelle Ambre, maman.

C'est sa mère ?

Je fais un minable « bonsoir » et regarde Cleo qui regarde sa mère qui me regarde. Mal à l'aise, je leur dis à plus tard et m'éloigne en les laissant seules.

Alors que je marche vers les toilettes qui sont indiquées par des flèches, j'aperçois Idris avec un autre garçon. J'oublie les sanitaires - de toute façon j'y allais pour me cacher - et les rejoins.

-Idris tu n'as pas vu ma mère ?

-Tu parles de Cassandre Lefèvre ? questionne l'étranger en devançant son ami.

-Oui... comment sais-tu ça ?

Le gars a des cheveux noirs de jais et des yeux vairons, l'un bleu et l'autre vert. Lui aussi est grand et il est pas mal du tout.

-Vous vous ressemblez beaucoup. Elle doit sûrement être avec ma mère ; elles sont proches, m'explique-t-il avec un magnifique sourire.

-D'accord, merci... ?

-Simon Lopez.

-Tu as une sœur qui s'appelle Cleo ?

-Comment... ?

-Je l'ai rencontrée un peu plus tôt au buffet.

Et parce que vous avez la même couleur de peau et aussi les mêmes traits du visage.

-Ça ne m'étonne pas, chuchote Idris en souriant.

Je lui mets un petit coup dans l'épaule mais il ne réagit pas et c'est à ce moment-là que je vois maman arriver vers nous, accompagnée du coucher de soleil ambulant.

-Ambre, te voilà ! s'écrie-t-elle.

Elle prend le bras de la Femme-soleil et fait des gestes de la main tout en parlant.

-Clémence, je te présente Ambroise, ma fille. Et Ambre, je te présente ma chère amie Clémence.

« Ma chère amie » ? Je n'ai jamais entendu parler de cette Clémence. Elle ne doit pas être si chère que ça.

-Nous nous sommes déjà rencontrées, elle faisait la connaissance de Cleo.

La Femme-soleil a des cheveux bruns, remontés en un chignon strict et ses yeux sont d'un bleu perçant.

-Et puis maintenant elle fait la connaissance de Simon, conclut maman.

Quelque part une cloche sonne, me sauvant, et les personnes migrent vers les tables installées à travers la salle. Je repère Cleo qui me fait signe, déjà assise à une table et je m'élance vers elle puis la remercie de m'avoir gardée une place.