Chapitre 39 ;

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Allongée, au fond d'un lit doux, mes pensées ne m'appartiennent plus.

Elles flottent autour de moi, lèchent les murs et caressent les bords des miroirs.

Je me vois d'en haut.

Désormais, je ne subis plus mon corps qui se déforme.

Je vole, je cours, je dors éveillée.

Je ne comprends que trop bien ce qui se passe.

Mes pauvres cellules sont trop faibles pour maintenir mon âme vagabonde.

Mes yeux sont mi-clos et mes réflexions sont fades.

Je rigole bien de me savoir si mal.

Mon estomac se tord en dessous de moi.

Je ne désire plus que cet état de lévitation.

Je ne suis plus une enfant, mais je ne serai jamais une adulte. Cet état de semi-existence dans lequel je vais me retrouver bloquée indéfiniment. La malédiction réservée aux personnes trop conscientes pour se laisser porter. Figer ma propre vie avant d'en faire un cauchemar.

J'entends mon cœur battre. Il peut bien battre cet imbécile. Un jour comme tous les autres, il cessera.

Mais je compte bien lutter, pour essayer de contenir la vie qui ne désire plus fréquenter mon enveloppe corporelle.

Lutter pour la maintenir dans une petite boite opaque au-dessus de mon épaule.

Elle pourra bien crier, se débattre, hurler.

Elle ne sera que le témoin de ma chute volontairement lente.

Tout ça pour qu'un matin, je me réveille de bonne humeur, réconciliée temporairement avec ce bordel monstrueux.

Ces matins-là, aussi rares qu'éphémères, quand tout semble envisageable.

Si seulement ma volonté allait plus souvent dans ce sens.

Il est bien plus aisé de s'acclimater à la fange, le bonheur nécessite entretien quotidien.


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