En août, un autre Paris renaît, aussi doux que rare. Les rues chaudes se déroulent sous mes pas comme un sourire sur un visage d'enfant. Le vent du soir caresse les terrasses vides et les Parisiens ont enfin droit à un environnement supportable. Me revoilà à errer dans le quartier des Batignolles, rentrant à pieds depuis la Madeleine après avoir dîné chez papa. « Song to Woody » de Bob Dylan en boucle dans mes écouteurs. Je marche lentement, comme ralentie par une gravité inhabituelle. J'essaye de sonder mon cœur, savoir comment je me porte, vraiment.
L'enchaînement des derniers mois a été un chaos sans nom, un fouillis de ronces et de roses, superbe et déchirant à la fois. Où en suis-je de mes réflexions sentimentales ?
Depuis mon retour de vacances, j'ai la tête chamboulée. Plus vraiment envie de voir Alexandre. Une fois ou deux de nos sauteries nocturnes, la semaine de mon retour, ont suffi pour me rendre à l'évidence que je me suis lassée.
Au cours de notre dernière nuit blanche, j'avais passé un long moment à observer Alexandre assoupi dans le lit à mes côtés. La lumière orange qui émanait de la rue colorait sa peau diaphane ; ses sourcils froncés et ses lèvres joliment ourlées, qui devaient pourtant plaire à tant de femmes, ne m'ont provoqué aucune émotion. J'avais soulevé délicatement le drap et pris le temps d'apprécier son corps divinement sculpté, ses doigts longs et puissants qui s'agrippaient d'habitude si bien à ma gorge reposaient là inertes, près de son sexe encore gonflé par le feu de nos ébats. Rien de désagréable à regarder, j'en conviens ; mais toujours aucun signe de tendresse. J'avais juste envie d'un corps, de temps en temps, pour assouvir mes désirs sexuels, d'une peau contre laquelle me lover. Entendre une respiration combler la déchirure du silence que j'avais provoqué en virant Marc.
Depuis le premier jour, Alexandre a été une bonne pioche, un casse-croûte efficace pour combler le silence, faire passer le temps, faire passer le mal. J'ai eu de la chance, il est vrai, de tomber sur un amant d'une telle qualité, aussi beau à regarder que plaisant à satisfaire. Mais de jour, le charme s'évanouit. Je ne désire pas le connaître sous quelconque autre forme que dévêtu dans mon lit.
Il y a bien eu cette fois où nous nous sommes arrêtés boire des shots dans le petit bar en bas de l'appart'. Le barman nous a demandé nos noms : Alexandre et Alexandra. Tous les deux Alex. J'ai trouvé ça pathétique. Depuis, je me suis arrangée pour ne plus jamais le voir en dehors de mon appartement.
Comme il ne m'a pas du tout manqué pendant les vacances, il m'a été vraiment aisé de simplement arrêter de l'inviter chez moi à la fin de son service. Sans plus d'explications. Accord tacite passé entre deux corps qui en ont eu assez de se découvrir. Qui ont envie d'autre chose, de refaire tourner la roue, sans provoquer de drame. Finalement, qu'est-ce que c'est simple, de se séparer sans sentiments.
Un bonjour, un au revoir.
Une découverte, une satisfaction, un échange et puis merci.
Pas de rancœur, pas de jalousie, pas de manque.
En fait, la seule différence que je remarque depuis que j'ai arrêté de voir Alexandre, c'est que je dors des nuits entières, des nuits de sept heures. C'est sûrement pour ça que je me sens reposée et plus sereine.
André par contre, attise toujours autant le désir tapi dans mon bas-ventre. J'ai encore, et plus que jamais, envie de lui. Envie de sentir le poids de son corps contre le mien, ses mains entraver les miennes, envie de me laisser dominer par ses gestes que je devine divins. Ce désir ne m'a pas lâché depuis le premier cocktail qu'il m'a servi au Comptoir en juin dernier. Ni le temps, ni les vacances, ni Alexandre n'ont atténué le feu qui me consume en sa présence, que son regard bleu aux éclats d'or suffit à raviver. Je n'ai pas communiqué avec lui depuis des semaines, espérant que cette rupture dans la routine de nos flirts m'aiderait à me défaire de ce sentiment de frustration. J'espérais qu'à mon retour, je le verrais d'un œil nouveau : détaché et tout en maîtrise.
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Love
ChickLitOn en connaît tous des histoires d'amour qui commencent bien et qui finissent mal. Mais des ruptures qui commencent bien, vous en connaissez beaucoup ? Et bien, c'est le cas pour Alexandra. Après avoir claqué la porte sur trois années de vie de c...