Chapitre 22 ; Ecsta - Sea

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Quelques jours plus tard.

La pittoresque île de Hvar, enlacée par une muraille du XIIIe siècle, vaut certainement la peine d'être vue. Cependant, dès notre arrivée, nous devons nous rendre à l'évidence que l'animation très festive de son port fait mauvais ménage avec le mal de crâne que nous héritons de ces deux jours de festival. Volontairement, nous avons perdu des points de vie, involontairement nous avons gagné trois amis de voyage. Devon, Leah et Travis, trois Australiens avec qui nous avons sympathisé dès lors que les demi-lunes ont opéré leur magie de nous propulser dans la même dimension qu'eux. Une fois revenus sur terre (au sens propre), nous avons continué à nous trémousser en rythme sur les « umpso umpso » entre les figuiers illuminés aux couleurs psychédéliques. De nuit, la lagune était éclairée par des faisceaux aux motifs changeant, perçant la surface de l'eau par une projection de lumières silencieuses, laissant s'exprimer depuis la rive les murs d'enceintes flambant neuves. Deux jours plus tard, je les entends encore rugir à intervalle régulier sous mes tympans.

L'activité de la charmante Hvar n'étant pour l'instant pas au diapason avec notre mal de crâne carabiné, nous décidons de dîner tous ensemble dans un petit restaurant. Notre trio d'Australiens préféré suit la même descente que nous vers le sud du pays et nous nous sommes mis d'accord pour poursuivre le voyage ensemble quelques jours. Devon et Leah, couple de jeunes mariés et Travis, frère et meilleur ami de Devon, se sont payé le luxe de passer trois mois en Europe pour sillonner les meilleures scènes électro. Tous trois originaires de Melbourne, je partage avec eux mes souvenirs d'Australie pendant que Roxane profite d'avoir enfin des interlocuteurs dignes de ce nom pour échanger sur ses goûts musicaux.

À la nuit tombée, les petites ruelles de la ville fortifiée s'emplissent d'une forte odeur de grillade. L'eau à la bouche, nous nous installons à une table et commandons toutes les spécialités locales : des moules grosses comme la paume de ma main, servies complètement ouvertes sur une longue assiette en métal, des petits poissons grillés entiers et recouverts d'une persillade relevée, une salade de poulpe tiède et le fameux « caviar rouge des Balkans » : la sauce Ajvar, exquis mélange de poivrons et d'aubergines mijotées qui accompagne le plus souvent les viandes, mais s'apprécie aussi très bien tartiné sur un morceau de pain.

Repus et fatigués, nous nous dirigeons vers la maison que nos copains louent sur l'île. En chemin, ils nous proposent de passer la nuit sur leur clic-clac, ce que nous acceptons avec plaisir. L'offre pourtant excellente de profiter d'une nuit de confort ne mentionnait pas un léger détail : la climatisation donne juste au-dessus du canapé-lit. De telle façon que l'air sec et glacial nous donne l'impression de dormir dans une chambre froide. Pour me protéger du froid, je me couvre d'un gros pull et d'une couette supplémentaire, si bien, que quand je me réveille en sursaut d'un mauvais rêve, je suis à la fois grelottante et en nage.

Cette fois-ci, le rêve est encore bien présent à ma mémoire, c'était la fête d'anniversaire de Marc.

Un grand appartement, beaucoup de monde, une ambiance très joviale. Parmi les invités, des connaissances, des collègues, de la famille éloignée, melting-pot de personnalités que je connais pour la plupart. Tant bien que mal, j'oscille entre le bar et les bises, sauf que je me sens très malade. Même dans le rêve, je me rends compte de la dualité inconfortable entre la sueur et le froid. Je me sens faible. Je ne comprends pas pourquoi je suis là ni pourquoi je me sens si mal. Tout est au ralenti. Je parviens à me traîner dans le couloir jusqu'à trouver une chambre calme où me cacher et me reposer. J'ausculte mes yeux noircis dans le miroir de la salle de bain et m'installe sur le lit un instant.

Marc, qui passait dans le couloir, me surprend là ; entre dans la chambre et commence à me questionner. Mes réponses n'avaient pas l'air de le satisfaire, alors il m'attrape par le bras et commence à me frapper.

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