Au nom du Père

17 - Waterford : 8 novembre 2019

L'obscurité absolue enveloppa bientôt les trois compères, et si cela n'avait pas été des lunettes à infrarouge de Lucas, nul ne serait parvenu à se frayer un chemin à travers les passages de roc étroits quasiment impraticables qui les mèneraient jusqu'au repère des merrows. Ben avait pris la tête du groupe, et pour une fois, au plus grand bonheur de Stiles et de Lucas, il se complaisait dans le silence. Une tension confondue à l'adrénaline du combat à venir vibrait maintenant entre les trois amis et seul le calme ambiant leur permettait d'apaiser leurs esprits et leurs muscles nerveux.

S'ils ne pouvaient pas voir ce qui se passait autour d'eux, Stiles, Ben et Lucas pouvaient tout de même sentir cette insupportable odeur de varech et de poisson mort qui embaumait de plus en plus la cavité à mesure qu'ils s'enfonçaient dans le littoral. Stiles n'était même plus en mesure de respirer par le nez tant ces émanations empestaient et il sentait déjà qu'elles lui montaient à la tête. Il lui tardait vraiment de plus en plus de de récupérer cette lance magique et de quitter cet endroit au plus vite.

Enfin, le passage finit par s'élargir pour laisser place à différents niveaux de galeries sous-terraines. D'un mouvement du bras, Lucas fit signe à ses compagnons qu'il partait de son côté pour aller accomplir sa part du travail et il disparut derrière une façade tandis que Stiles et Ben continuaient leur exploration.

Une immense aire dégagée s'ouvrit bientôt devant eux et Stiles put voir des merrows pour la première fois en cet endroit. Le sol rocailleux s'étendait encore sur une trentaine de mètres avant de se jeter dans un bassin aux eaux noires et visiblement très profondes qui ne pouvaient survenir que d'un seul autre plan d'eau : l'océan. Là, dans cette nappe, deux dizaines de formes humanoïdes se baignaient en riant et en chantant sans savoir qu'elles étaient observées par des hommes venus voler leur bien le plus précieux.

Comme Stiles doutait de la diplomatie de Ben et qu'il présumait que la vue du lance-flammes risquerait d'intimider les merrows et de leur faire faire perdre toutes leurs chances de convenir à un accord mutuel,  le jeune Winchester décida de prendre l'initiative de confronter ces créatures. Il passa devant Ben en lui signifiant de cacher sa volumineuse arme, puis il s'avança de quelques pas pour se mettre bien en évidence tout en restant à une distance respectueuse de ce peuple reconnu pour son animosité. Lentement mais sûrement, tous les rires, les chants et toutes les discussions se turent et des dizaines de paires d'yeux, qui eux n'avaient rien d'humains, se posèrent sur lui. Il n'y avait plus de retour en arrière possible, maintenant.

-Bonjour, souffla nerveusement le garçon, qui réalisa seulement à ce moment qu'il n'avait préparé aucun discours de présentation en prévision de ce moment. Je...Je m'appelle Stiles, et je ne viens pas ici pour me battre. Je voudrais seulement...j'aurais besoin de votre aide. Y a-t-il un responsable parmi vous ?

Pendant de longues secondes de supplice, l'ensemble de la caverne sombra dans le silence le plus total. Stiles en vint à craindre que les merrows ne comprenaient pas leur langue, donc qu'ils prenaient leur incrustation dans leur demeure comme une provocation et non comme une tentative d'engager la conversation, mais au bout de presque une minute de tourment silencieux, une créature au magnifique corps de femme émergea du plan d'eau pour se diriger d'un pas lent et langoureux vers les nouveaux venus.

-Je serai la porte-parole de mon peuple, dit-elle d'une voix languissante et alléchante qui dégageait une telle confiance en elle que Stiles en grinça des dents. Vous avez un sacré culot d'entrer ainsi sur notre territoire et d'oser nous demander notre aide. Qu'est-ce qui vous fait croire que nous accepterons de vous assister, mes jolis ?

Stiles et Ben ne pouvaient pas bien discerner les traits de la merrow avec leurs lunettes infrarouges, mais s'ils avaient eu le courage (ou bien la stupidité) de les enlever, ils ne doutaient pas que leurs yeux auraient rencontré ce que chacun considérait comme étant le corps de la femme parfaite. La merrow elle-même ne semblait pas douter de ses charmes à voir ses roulements de hanches et ses regards enjôleurs.