Au nom du Père

5 - Bunker : 4 novembre 2019

Les membres de la famille Winchester avaient l'impression de vivre la plus belle journée de leur existence. Le retour de Mary se célébrait dans une joie et une béatitude qui n'avait jusqu'à présent jamais été autant mise à l'honneur dans le bunker. Pour une fois dans leur vie, Sam, Dean et Stiles avaient enfin l'impression que les mauvais jours étaient passés et qu'il ne leur restait plus qu'à profiter de la vie et de la deuxième chance que Dieu avait bien voulu leur accorder.

Sam et Dean, surtout, ne lâchaient pas leur mère un seul instant et s'accrochaient à son ombre comme par peur de la voir disparaître s'ils osaient se distancer le moindrement d'elle. Mary ne semblait néanmoins pas s'en indisposer et elle discutait joyeusement en compagnie de ses deux fils sur tous les sujets qui leur passaient par la tête, allant de la dernière apocalypse qu'ils avaient affrontée aux habitudes alimentaires de Sam lorsqu'il était bébé. Vraiment, les deux frères n'avaient jamais été aussi près de toucher au bonheur.

Seul Stiles restait un peu en retrait. Ce n'était pas qu'il ne partageait pas le bonheur de ses compères à l'idée d'enfin pouvoir connaître sa grand-mère paternelle, mais c'est que plus il songeait à la raison de la résurrection de Mary, plus il en venait à redouter un juste retour des choses. Dieu n'avait certainement pas pris le risque de bousculer l'équilibre du monde simplement pour faire plaisir à ses loyaux soldats, ce qui signifiait qu'il ne tarderait probablement pas à revenir à la charge pour demander quelque chose en échange de la vie de Mary et le garçon ne savait pas s'ils seraient en mesure de rendre la monnaie de sa pièce au maître de l'univers sans perdre quelques plumes en chemin. Sam et Dean avaient déjà assez donné dans les aventures funestes et les missions mortelles, ils méritaient plus que quiconque une retraite douillette et sans tracas, et la dernière chose que Stiles souhaitait, c'était que Dieu ne vienne gâcher cette prospérité qu'ils connaissaient enfin au prix de tant de sacrifices.

Il était néanmoins tout à fait hors de question que le garçon ruine les retrouvailles entre son père, son oncle et sa grand-mère avec ses craintes encore infondées, mais Stiles savait parfaitement que le nœud dans le creux de son estomac n'avait jamais tort. Après quelques heures à forcer la plaisanterie avec sa famille, il voulut donc prendre congé en soulignant qu'il leur faudrait un repas digne de ce nom pour fêter le retour de Mary et que, comme le réfrigérateur était vide et que c'était à son tour de faire les courses, il se devait d'aller faire un tour en ville pour faire le plein de victuailles.

-Reste donc avez nous, petit ! tenta de le convaincre Dean alors que le jeune homme se levait de sa chaise et faisait mine de sortir de la salle de séjour, où ils s'étaient établis tous les quatre pour passer la journée. J'ai appelé Cas tout à l'heure et il devrait arriver en fin de journée. J'ai qu'à lui passer un autre coup de fil et il s'arrêtera sur son chemin pour faire les courses.

-Nah, Cas va avoir passé suffisamment de temps sur la route ces derniers jours pour devoir en plus se taper nos commissions. La ville est juste à côté, Dean, et ça ne me prendra qu'une heure tout au plus. En plus, ça vous donnera un peu d'intimité entre mère et fils pour reprendre le temps perdu.

Le garçon se retira en saluant une dernière fois les membres de sa famille d'un signe de la main, mais tandis qu'il se dirigeait vers sa chambre pour aller y pêcher son manteau, Dean le rejoignit en l'interpellant à mi-voix.

-Tu sais que t'as pas à t'exclure de nos conversations, gamin, lui lança-t-il lorsqu'il arriva à sa hauteur. Elles te concernent autant que nous, et même si la situation peut paraître plus qu'étrange, c'est bel et bien réel et Mary n'est pas près de repartir, c'est moi qui te le dis.

-Je le sais bien et ça me comble de joie, je te jure, qu'on nous offre à tous une seconde chance grâce à la résurrection de votre mère, mais j'ai seulement besoin de sortir un peu pour réfléchir à ce qui s'annonce.