Au nom du Père

48 - Port Arthur : 20 novembre 2019

Sam et les autres occupants du jet étaient faits comme des rats, et à voir le sourire narquois qui étirait ses lippes et qu'il ne cherchait même pas à dissimuler à l'ennemi, Chuck était tout autant conscient qu'eux de leur situation. D'un geste de la main, Le chasseur avait fait signe au pilote et au copilote de rester tapis dans le cockpit pendant qu'il cherchait un moyen de tourner la situation à leur avantage, ce qui n'était pas une mince affaire, et qui pouvait même s'avérer tout simplement impossible compte tenu de la puissance de leur opposant. Il s'était également assuré qu'Emily et son assistant restent derrière lui dans l'espoir que Chuck se concentre uniquement sur lui et épargne la vie des deux autres occupants de la cabine. Aux dernières nouvelles, sa mère se reposait toujours dans la chambre, mais la porte close l'empêchait de savoir si elle avait pris conscience de la présence de leur ennemi. Sam pria intérieurement pour qu'elle n'interfère pas dans l'affrontement qui aurait imminemment lieu entre Dieu et le chasseur. Au moins, de cette manière, elle avait une chance de survivre à cette confrontation.

-Tu en fais une drôle de tête, Sam, sourit moqueusement son adversaire en s'avançant vers lui. Tu ne t'attendais pas à me voir ici, j'imagine. Eh bien en fait, j'ai pris pour acquis que vous deviez vous ennuyer à attendre sagement dans cet avion pendant que le reste de l'équipage vivait les véritables aventures, alors j'ai eu pitié de vous et j'ai décidé de passer vous dire bonjour pour passer un peu le temps.

-Qu'est-ce que tu leur as fait, Chuck ? demanda Sam d'une voix sourde, rongée par une soudaine vague de terreur à l'idée que Stiles, Dean et le reste des agents du SAS avaient pu écoper de la colère de Dieu avant eux. Où sont-ils ?

-Oh, ils doivent être sur le chemin du retour, à l'heure qu'il est, répliqua innocemment son interlocuteur en haussant les épaules. Ils sont parvenus à sauver mes deux prisonniers sans aucun heurt et ils se réjouissent du fait qu'ils soient arrivés à me déjouer aussi facilement. Imagine un peu la tête qu'ils feront lorsqu'ils entreront dans ce jet, tous fringants et triomphants de la réussite de leur dernière mission, pour découvrir vos cadavres jonchant le sol et moi comme unique comité d'accueil ! Ce sera hilarant ! Pas besoin de vous dire que cette scène ne manquera pas d'apparaître dans mon prochain roman !

À mesure que Chuck parlait, focalisé sur l'invention et la description de scénarios en prévision d'un nouveau projet littéraire, Sam avait lentement poussé Emily et son assistant vers la porte de la chambre où logeait Mary. L'ébauche d'un plan commençait à se former dans sa tête, et même s'il était risqué, voire complètement fou, il s'agissait peut-être de leur seul moyen de survivre jusqu'au coucher du soleil. Ça, bien sûr, c'était s'il n'empirait pas carrément la situation avec sa chance habituelle.

-Tu as vraiment peur de perdre à ce point-là, hein, Chuck ? lança le cadet Winchester en tâchant d'étirer lui aussi ses lèvres en un sourire railleur, ce qui eut pour effet d'attirer sur le champ l'attention de son puissant adversaire, qui cessa d'un coup ses élucubrations pour le menacer d'un regard chargé de fureur et de frustration. C'est pour ça que tu nous attaques seulement par des voies détournées et que tu refuses de la jouer franc-jeu avec nous : tu sais que tu es destiné à perdre le combat quoi que tu fasses. Tu as bien dû t'y faire à l'idée, à l'heure qu'il est, non ? Tu vois le temps filer, le combat final approcher, et rien de ce que tu tentes contre nous ne parvient à altérer le cours des prophéties. Tu es fini, Chuck, et ta présence ici ne fait que témoigner davantage l'ampleur de ton désespoir face à ton inéluctable défaite.

-Oses-tu vraiment me parler sur ce ton, pitoyable humain ? gronda Dieu, et Sam put très clairement sentir l'avion et tout le monde qui les entourait bouger sous ses pieds sous le poids de la rage du Seigneur. C'est moi qui t'ai créé, pauvre insecte ! Je t'ai façonné pour que tu deviennes exactement celui que tu es aujourd'hui, j'ai guidé chacune de tes actions, chacun de tes choix pour que nous en arrivions à ce moment précis, alors crois-tu réellement avoir le moindre pouvoir sur moi ? Tu n'es rien qu'un grain de poussière dans l'étendue des mondes qui sont à mes pieds !