10 novembre 1733, Versailles
Les jours s'écoulèrent tandis que la duchesse restait dans sa chambre. Chaque jour, un valet lui apportait des fleurs des jardins du château. Chaque jour, Sophie les refusait surtout en apprenant qu'elles venaient de la part de son époux.
– S'il apporte autant de présents, c'est qu'il doit se faire pardonner de quelque chose et qu'il est donc coupable. Ramenez tout cela, je n'en veux point.
Louis XV avait organisé différents bals, espérant voir sa belle-sœur et donc discuté avec elle. Son intendant l'informait que jamais elle ne sortait si ce n'était pour se promener dans les jardins malgré le froid. Philippe, quant à lui, restait dans son bureau, à travailler. Il cherchait avec l'aide de la police les responsables du massacre de Forbach. Lorsqu'il voyait ses serviteurs revenir avec les cadeaux qu'il offrait à son épouse, il ruminait et se penchait un peu plus sur ses recherches.
Un jour, alors qu'il recevait les lieutenants de police pour avoir leurs retours, les portes s'ouvrirent en grand. Philippe se leva instinctivement en voyant Sophie, décoiffée, les yeux rougis et sa robe toute froissée. D'un geste, il renvoya tous les hommes et se plaça devant son bureau, n'osant faire un pas vers elle. La duchesse leva la main qui tenait une lettre et bégaya quelques mots avant de s'effondrer sur le sol en pleurs. Philippe courut jusqu'à elle et l'attrapa dans ses bras. Se balançant d'avant en arrière, il murmurait des mots doux pour tenter de la calmer et ainsi en apprendre plus sur la teneur de cette lettre.
– Sophie, parlez-moi... Je ne peux vous aider si je n'ai pas d'informations.
– Ma sœur... Anne-Charlotte. Elle... Elle se trouvait à Forbach au moment... Au moment où tout ceci s'est passé. Ils ont tout brûlé. Elle est... Morte. Oh Philippe.
Elle pleura encore plus contre lui, la respiration saccadée. Philippe prit des mains la missive et la lut rapidement. Elle datait d'il y a dix jours mais avait mis du temps à arriver jusqu'à la Cour. Philippe, froissa la lettre dans ses mains, sourcils froncés et entoura un peu plus sa femme.
– Elle n'avait que dix-neuf ans, Philippe. Elle avait... toute la vie devant elle. Pourquoi... ? Pourquoi la vie est-elle si dure ?
– Je suis tellement désolé Sophie. Je vous jure que je ferais tout pour retrouver les coupables et les châtier comme il le faut. Croyez-moi quand je vous dis que je n'étais pas au courant. Jamais de ma vie je ne penserai attaquer la région de ma femme. Votre région est la mienne. Au nom de la France entière, je m'excuse.
Il releva son visage pour qu'elle le regarde et se pencha vers elle pour l'embrasser tendrement.
– Vous devez être forte Sophie et vous ressaisir. La perte d'un proche est difficile mais nous allons avoir un enfant et il faut lui montrer à quel point sa mère est une grande duchesse.
Sophie le regarda, les yeux brillants et eut un faible sourire. Il avait raison. Pour sa sœur décédée, pour ses frères et sœurs qui restent et pour son enfant qui allait naître, elle devait rester forte. La Cour de France n'aurait pas raison d'elle. Si elle avait su résister jusqu'ici de tous les coups bas, elle résisterait à cette épreuve de la vie. Dieu l'aiderait, elle en était persuadée. La jeune femme posa son visage contre le torse de son époux et murmura un « Merci ».
– Je veux que vous sachiez que peu importe ce qui se passe, je serai là pour vous.
– Pardonnez-moi d'avoir douté de vous mon ami. J'aurais dû vous écouter et vous croire.
– Vous étiez en colère et triste. Il est donc normal pour vous d'avoir agi comme vous l'avez fait, dit-il en embrassant sa tempe.
Le couple resta encore quelques instants dans cette posture avant de se relever et de décider de sortir marcher dans le grand parc.
***
– Sire, nos soldats ont assiégés Pizzighettone. Nous sommes actuellement en train d'établir un blocus avec l'aide de la Sardaigne afin que nous soyons victorieux, déclara l'un des ministres.
– Combien de temps peuvent-ils tenir ?
– Je dirais un bon mois. Après tout dépend de quand le reste de nos troupes vont arriver pour l'assaut.
Un grand silence se fit dans la pièce tandis que Louis était posté devant la fenêtre. Les murmures commencèrent à résonner.
– Qu'en est-il de ce massacre à Forbach ?
– La jeune sœur de son Altesse est décédée tragiquement alors qu'elle tentait de sauver le plus grand nombre de personnes. Nous aimerions dire que c'était un groupe de mercenaires qui avait quitté nos rangs quelques jours auparavant. Mais il semblerait que le duc votre frère avait raison.
– Le duc d'Aumont est responsable ?
– Ses soldats le sont. Etait-il au courant ? Nous ne le savons Votre majesté.
– La duchesse en veut-elle toujours à la Cour et à notre personne ?
– Sire, son Altesse la duchesse d'Aquitaine ne pourra jouer la médiatrice avec son duché de naissance. Le duc François est furieux d'après nos sources et a décidé de soutenir ouvertement la Prusse et les Italiens. Il nous a donc déclaré la guerre.
– Elle va nous poser des problèmes. Si la Cour soutient l'épouse de mon frère, alors perdrons le soutien de nos nobles, murmura le roy.
– Que souhaitez-vous faire Votre majesté ?
– Soit, le pape annule le mariage. Soit, nous annulons ce mariage d'une autre manière.
Louis plissa les yeux en regardant un couple marcher le long des allées de ses jardins. Il était temps de séparer son frère et sa femme afin qu'elle soit détestée par la Cour.
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Les Secrets du Duc d'Aquitaine
Historical FictionSi vous saviez ma chère, le nombre de personnes présentes au mariage de Monsieur frère du roi ! C'est que l'événement était de taille, probablement le plus important de l'année. Que dis-je, de l'année ? Du siècle au moins ! Philippe d'Aquitaine, frè...