Hors des frontières françaises, Roy réalise à quel point le monde dans lequel il vivait n'était qu'illusions et mensonges. Blessé et avec pour seul allié, Seth, il choisit de se lancer dans une guerre sans fin contre son père en rejoignant un groupe...
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ROY
J'ouvris les yeux dans une petite chambre qui ressemblait étrangement à la mienne. Mais l'odeur des draps n'était pas la mienne. Ces effluves d'épices ne pouvaient appartenir qu'à une seule et unique personne. Celle de tous mes maux. Neils Dumont.
Dans les draps vides de sa présence, les flashs me revinrent. La réalité me rattrapa à une vitesse effroyable. Isaac n'était plus de ce monde. J'avais perdu le dernier membre de ma famille. Et j'en étais parfaitement responsable. De là où elle se trouvait, Agathe devait me percevoir comme le pire frère au monde. Je ne lui en voudrai pas de le penser, je le pensais aussi. À vrai dire, si je n'avais pas une très bonne raison de rester ici, j'aurais quitté les Insurgés dans la nuit.
Mais il y avait Seth.
Père savait qui avait tué Isaac et je voulais ce nom même si j'avais quelques idées sur le sujet. Edgar de Lussigny ne se salissait jamais les mains, c'était un fait. Je n'avais jamais pensé qu'il irait jusqu'à tuer son héritier. Pourtant, Isaac était mort.
Soit il s'était fait assassiner par l'un des hommes de mains de père dans le plus grand des secrets. Soit il avait laissé ce plaisir à Charles. Les Fantômes devaient en être fiers mais il n'y avait pas eu la moindre revendication de leur part, phénomène intriguant. En tant qu'organisation sanguinaire, tout prétexte était bon pour faire la une des journaux. Surtout la mort de l'héritier des industries de Lussigny.
Quoiqu'il en soit, le tueur serait mort avant la fin de l'année et mon père subirait le même sort. Un parricide. Pas une histoire très glorieuse mais au point où j'en étais, rien ne pourrait jamais plus redorer mon nom et mon image. Je n'étais que Roy, le mercenaire sanguinaire, la brute, lefauve. Et mon père allait comprendre sa douleur. Il ne méritait pas une mort rapide mais plutôt d'une lenteur extrême. J'allais réduire son empire à néant, soulever le peuple contre lui, soulever les plus riches contre lui jusqu'à ce qu'il soit démuni et seul. Le jour où il aurait tout perdu, je serai là pour l'accueillir et lui prendre sa vie comme il avait pris celle de mon frère.
Je n'allais plus jouer selon leurs règles mais selon les miennes. Et la seule règle chez moi était qu'il n'y en avait pas.
D'une allure trainante, je traversai les longs couloirs menant au centre d'entrainement des Insurgés après m'être habillé et douché. Seth avait glissé un mot sous la porte ce matin qui me réclamait ici. Rien d'étonnant à ce qu'on ne me laisse pas le temps de faire mon deuil, mais j'aurais aimé un peu de répit quand même. Je n'avais pas le droit de me montrer faible, juste de rester impassible aux derniers évènements. Il fallait que tout le monde continue de voir en moi quelqu'un de puissant, de menaçant.
Le centre d'entrainement se trouvait à l'autre extrémité des chambres, au bout du terrain délimité par des rangées et des rangées de haies mal taillées. Pour l'atteindre, il fallait braver la brise fraiche de fin septembre en marchant dans une allée caillouteuse. Le froid rendait mes mouvements plus lents et douloureux. Ma cuisse n'était toujours pas rétablie et je ne la ménageai pas vraiment alors la plupart du temps, je me déplaçai en boitant à moitié. Il y avait trop à faire pour que je me permette de me reposer.
