Ren, les yeux agrandis, restait immobile. Ses lèvres bougeaient toutes seules, sans qu'il puisse sortir un seul son. Quant à moi, je sentis mes jambes se dérober. Mes petits. Cerin, Nínim et Caëlurín. Ils étaient à l'intérieur, sous la garde d'Isolda et de Tanit.
J'avais perdu ma voix. Lorsqu'elle revint, ce fut sous la forme d'un horrible hurlement, qui se mua en pleurs frénétiques.
Ren, lui, avait tourné son regard acéré sur Priyanca Varma.
— Qu'avez-vous fait ? commença-t-il d'une voix blanche.
Varma fit un pas en arrière.
— Soldats de la République, faites votre travail, ordonna-t-elle, alors qu'un bataillon d'intervention cernait Ren. Incapacitez-le, mais ne le tuez pas. Je le veux vivant !
Le susnommé, dos à la rambarde, plissa les yeux. Il n'eut pas le temps de faire plus. J'avais déjà été mise en joue par Priyanca Varma, qui pointait un CERG miniaturisé sur ma tempe.
— Soyez raisonnable et rendez-vous, Ren, lui intima-t-elle. Ou vous perdrez votre femme. Vos enfants sont sains et saufs : je les ai fait mettre en lieu sûr. À l'heure qu'il est, ils doivent déjà être en route pour Invicta. Si vous coopérez, ils vous seront rendus – du moins, pourrez-vous les voir.
— Mais qu'est-ce que vous voulez ? demanda Ren d'une voix glaciale. Pourquoi faites-vous cela ? Nous ne sommes pas vos ennemis.
— Je suis désolée, Ren, admit Varma d'un ton qui démentait ses propos. C'est vrai que vous me paraissez bien intentionné et plutôt coopératif, pour un ældien. Mais le Président estime que vous et ceux de votre race représentez un danger trop grand pour qu'on vous laisse libres de voguer dans l'espace. Tout comme vous, vos pairs ayant émis le souhait de se rendre seront appréhendés et tenus sous bonne garde, où ils aideront par leurs capacités spéciales la bonne marche de l'Holos. Les autres seront éliminés, comme tout contrevenant à la loi républicaine.
— Un zoo ! hurlai-je. Vous allez les mettre au zoo ! S'il y a bien quelque chose que vous n'obtiendrez jamais des ældiens, c'est qu'ils se plient à vos lois stupides !
Varma me regarda froidement.
— En fait, nous avons d'autres plans pour eux.
Leurs cœurs. l'Holos n'avait pas abandonné l'idée de les utiliser comme source d'énergie pour le CERG !
— Qu'adviendra-t-il de nos enfants ? demanda Ren, très calme.
— Nous les étudierons afin de mieux comprendre leur fonctionnement et les bénéfices éventuels d'une hybridation – contrôlée, bien entendu – humain/ældien. Vous avez parlé de reproduction, tout à l'heure, Rika... Si nos chercheurs en confirment le bénéfice, il est possible que je m'y colle moi-même et fasse le sacrifice de me faire inséminer par votre Ren – artificiellement, bien sûr. Vous avez obtenu la capacité d'effectuer des configurations grâce à cela, non ?
— Pas du tout, la corrigeai-je, révoltée. Si tous les humains ayant eu des rapports sexuels avec des ældiens avaient obtenu ce pouvoir, alors l'humanité serait à même de faire des configurations depuis longtemps, idiote !
Varma me mit une claque, dont la brutalité me retourna la tête. Ren avait fait un pas en avant, menaçant. Il fut arrêté par une pression de l'Amirale sur ma tempe.
— Vous m'êtes sympathiques, tous les deux, grinça-t-elle. Ne m'obligez pas à vous faire du mal.
— Vous allez nous en faire, de toute façon ! objectai-je, incapable de me taire.
Je croisai le regard de Ren.
Vas-y, lui intimai-je. Ne t'occupe pas de moi.
Il fallait qu'il sauve les enfants du sort atroce que l'Holos leur destinait. Tant pis si moi, j'y restais.
Mais une nouvelle déflagration retentit. Un des troufions, que le fait de tenir un ældien en joue avait fait perdre la tête, avait tiré. La poitrine de Ren fut transpercée par un rayon gravitationnel qui y laissa un trou béant, pile à l'endroit du cœur.
— Non ! hurlai-je alors que mon compagnon s'affaissait en arrière.
Son corps disparut, tombant dans l'immense fausse du réacteur derrière lui, avec tous mes espoirs.
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LA CHAIR ET LE MÉTAL (Ne me mords pas)
Science FictionLa proie : "On l'appelle Obscur, incarnation vivante des ténèbres. Un cœur plus noir que la nuit elle-même. Cœur ? Ce monstre n'en a pas." Le chasseur : "Je l'appelle Faël, celle à la blanche chevelure. La proie la plus appétissante que je n'ai eu s...