Porte de la Nouvelle Arkonna, orbite de Jupiter, système de Solaris
Debout devant la baie, je regarde la barge de sortie s'éloigner du vaisseau. Bientôt, elle est indiscernable à l'œil nu. Le portail, lui, est juste derrière nous. Et devant, au loin, se dessine le gigantesque globe orange de cette planète que les humains appellent Jupiter. La station de New Arkonna se découpe juste devant, minuscule cube noir.
Tout ce que font ces humains est si laid. Et pourtant...
— Vaisseau non identifié en approche, m'informe la voix du vaisseau.
Une personnalité électronique pré-enregistrée, ne comptant que quelques routines de comportement. Les navires adannath n'ont pas d'âme. Mais pour un ædhel, même comme moi, toute vie possède une forme d'énergie. Ce vaisseau y compris. Je m'y suis un peu attaché, mine de rien.
— Je te souhaite une bonne fin de voyage, murmuré-je en rabattant ma capuche sur ma tête. Puisses-tu atteindre les confins de l'espace.
Peut-être même que ce vaisseau trouvera Tyrn-ann-nagh.
Avec ce shynawil de camouflage, je me fonds dans n'importe quel environnement mal éclairé. Aux yeux limités des adannath, ça suffira.
Et évidemment, le vaisseau ne me répond pas.
*
Un choc sourd. Puis, quelques instants plus tard, les étincelles jaillissent, vertes et or, alors que les humains découpent la porte. Le couloir, comme le reste du vaisseau, est plongé dans le noir. Dissimulé par ma cape de camouflage, j'attends contre le mur, silencieux, les bras croisés. J'ai coupé tous les systèmes et la température est descendue à moins 150°, comme l'indique le petit thermomètre indépendant sur le sas. Il n'y a presque plus d'oxygène, ni de gravité artificielle.
La porte tombe lourdement. Des silhouettes flottantes s'engouffrent lentement : ils portent tous des armes et des torches.
— Il fait noir comme chez le diable, ici, grogne l'un d'eux dans son scaphandre. Amenez la grosse lampe !
Un soldat les précède, canon en avant. Je les observe en silence. Je peux rester un certain temps sans respirer, à condition d'économiser mes forces. Et bien sûr, le froid extrême n'est pas un problème, pour un dorśari. J'y suis habitué, et mon shynawil me protège.
Faudra pas que ça dure trop, quand même.
Mon shynawil, qui a connu des jours meilleurs, est troué.
Je les laisse explorer le vaisseau vide. Quand ils ont tous disparu dans le couloir, je m'engouffre dans leur sas. C'est difficile de progresser sans se dévoiler : j'accroche mes griffes sur les aspérités des parois, et cela fait un certain bruit. Heureusement, il n'y a plus personne pour l'entendre.
De l'autre côté, le sas est fermé. Je suis obligé d'attendre que ces hommes reviennent.
— Équipe d'exploration, revenez, entends-je crépiter sur le sas. On a trouvé quelque chose d'étrange sur la caméra thermique. Et les capteurs chimiques ont discerné une espèce de substance volatile inconnue.
Je tends l'oreille, soudain en alerte.
Rhach. Ils ont utilisé une caméra thermique...
Les hommes repassent en flottant devant moi.
— Qu'est-ce qui se passe ? On n'a rien trouvé, dans ce vaisseau. Il est complètement vide ! Vous parlez d'une menace d'ordre bactériologique ?
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LA CHAIR ET LE MÉTAL (Ne me mords pas)
Science FictionLa proie : "On l'appelle Obscur, incarnation vivante des ténèbres. Un cœur plus noir que la nuit elle-même. Cœur ? Ce monstre n'en a pas." Le chasseur : "Je l'appelle Faël, celle à la blanche chevelure. La proie la plus appétissante que je n'ai eu s...