Quelque part dans la bordure du Bras d'Orion
La jeune fille dévorait les victuailles devant elle avec appétit. Depuis quand n'avait-elle pas mangé ? Six jours, deux mois, une année ? Tout l'équipage – ou presque – avait été rassemblé autour de la table, la fixant en silence. J'échangeai avec Ren un regard nerveux. Qui était cette fille ?
— Tu es sûre que tu ne te souviens plus de rien ? lui demandai-je encore une fois.
Elle secoua la tête.
— Non, désolée. Tout ce dont je me rappelle, c'est... une attaque. Beaucoup de bruit, de la fumée... des cris. Ensuite, plus rien.
Elle avait une façon de s'exprimer bizarre, que je comprends à peine. Ce n'était pas du Commun. Elle ne portait aucune augmentation cybernétique, aucune marque, si ce n'est cette horrible scarification imprimée au fer rouge sur sa nuque. Le glyphe de Dorśa, indiquant qu'elle a été leur esclave. C'était tout ce qu'on savait.
Étrangement, Ren comprenait mieux le langage de la nouvelle que moi. C'était lui qui posait la plupart des questions.
— T'ont-ils donné un nom ?
La fille ne se rappelait plus du sien.
— Non, répondit-elle en secouant sa flamboyante chevelure rousse. Je ne sais même pas de qui vous parlez.
De nouveau, Ren me lança un petit regard. La jeune inconnue commençait à piquer du nez.
— Raema, tu peux l'amener dans ta chambre ? Je crois qu'elle a besoin de se reposer.
Pas Douée, qui jusqu'ici fixait la nouvelle passagère sans discontinuer, sembla émerger de sa transe.
— Tout de suite ! Tu viens ?
La fille suivit docilement. Elle n'avait pas l'air d'avoir peur d'Angraema.
— Je peux te prêter mon lit, si tu veux. J'ai deux chambres, une ici, et une sur le cair de ma mère... de toute façon, je m'entraine pour devenir sidhe. J'ai pas le temps de dormir ! Et à partir de ce soir, j'entre en retraite au temple pour un mois.
La voix grave de Pas Douée disparut dans les couloirs.
— La pauvre. J'espère que ta fille ne va pas trop l'embêter...
Ren baissa les yeux sur sa coupe de gwidth. Nous étions désormais tout seuls à table. Les ældiens, que ce soit Mana et ses filles, le jeune prince ou même Tanit, semblaient éprouver peu d'intérêt pour cette nouvelle passagère. Quant à Dea, autrefois si humaine, elle ne quittait plus la salle des commandes, s'immergeant dans une communion d'un niveau inatteignable pour nous, simples êtres animaux, avec Elbereth, l'entité consciente du vaisseau.
— Cette humaine est sous l'effet d'un puissant dwol. Peut-être même un geis... Il faudrait voir avec Mana. Elle pourra sans doute faire quelque chose.
Mana. J'ignorais si mettre cette malheureuse jeune fille entre ses griffes constituait une bonne idée.
— Elle a peut-être tout simplement subi le contrecoup d'un sommeil cryo trop long. C'est l'un des effets de ces vieilles machines. C'est pour ça qu'on ne les utilise plus...
— On ne l'a pas trouvée dans un caisson cryo, me fit remarquer judicieusement Ren, mais dans une caisse de transport dorśari.
Les dorśari. Encore eux.
— Ren, peux-tu m'en dire plus sur cette faction ældienne ?
Il coula un regard circonspect dans ma direction.
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LA CHAIR ET LE MÉTAL (Ne me mords pas)
Fiksi IlmiahLa proie : "On l'appelle Obscur, incarnation vivante des ténèbres. Un cœur plus noir que la nuit elle-même. Cœur ? Ce monstre n'en a pas." Le chasseur : "Je l'appelle Faël, celle à la blanche chevelure. La proie la plus appétissante que je n'ai eu s...