Satellite Night
Système de Tanibris
Il y a deux forces antagonistes chez les nôtres : une nature bestiale et primaire, et l'autre, qui aspire aux idéaux les plus hauts. La bête nous torture, mais lorsqu'on cède enfin et qu'on la nourrit... ça va tout de suite mieux.
Rien de tel qu'un peu d'action pour se revigorer, songé-je en m'étirant.
Faël dort à côté de moi, marquée par l'empreinte de mes crocs, couverte de mon luith. Elle en a pris dans tous ses orifices, et il y en a même dans son œsophage. Sa matrice en est infusée. Elle luit telle une statue d'or, ses traits détendus comme un bébé, sa chevelure blanche plus fournie que jamais. Toutes ses cicatrices ont disparu. Il est fort possible qu'elle vive un ou deux siècles, avec tout ce que je lui ai mis... mais je ne vais pas la garder en vie.
Trop dangereux. Si la prophétie d'Alyz était vrai... Honnêtement, je n'y crois pas – après tout, l'extase que j'ai ressenti en baisant cette humaine était purement sexuelle -, mais on ne sait jamais.
Mes crocs glissent hors de leur gaine. Non plus pour marquer une femelle consentante, mais pour tuer une proie. Où vais-je la mordre ? Au ventre, sur sa peau blanche et ferme, au-dessus de cette toison si odorante ? Non. Il ne faudrait pas que j'ai envie de la prendre à nouveau. Ça recommence, d'ailleurs : une douce douleur, contre laquelle je m'arme comme un sidhe enchaîné face à une femelle qu'il ne peut pas toucher. Je l'entends pousser un doux gémissement dans son sommeil : le même gémissement que celui qui a fait vibrer sa gorge quand j'enfonçais mes crocs dans sa cuisse tendre, et que je m'enfonçais, plus tard, dans son paradis de velours rouge. Rouge comme son sang, qui traçait sa ligne écarlate sur sa peau comme la neige des palais engloutis de la Cour d'Hiver. Rouge comme mes yeux apparaissaient dans le miroir des siens. Rouge comme le lien, la passion et la vie. Je ne voyais plus que cette couleur, alors que ses jambes m'enserraient à me briser les reins et qu'elle hurlait mon nom. Des fleurs de ténèbres, voraces et noires de sang, s'ouvraient et se refermaient tel un tourbillon de couleurs dans mon esprit, alors que j'étouffais ses cris à coups de langue.
Ah, cette femelle m'a rendu poète...
Ça suffit. Tue-la. Maintenant.
Je me penche sur sa jugulaire. Un coup de canine, et c'est fini. Terminé. Plus de menace, plus de honte. Plus de faiblesse.
Mais j'en suis incapable. Je me redresse, la regarde.
De toute façon, elle mourra, seule, sur ce satellite perdu au milieu de l'espace. Avec le concours de mes fluides vitaux, elle survivra sans manger quelques semaines, peut-être plus. Elle résistera au froid, aussi. Mais il y a d'autres prédateurs, sur ce caillou. Ils ne tarderont pas à la trouver.
Ces créatures blanches la tueront à ta place. Et tu pourras toujours rêver : est-elle vivante ? Vais-je la revoir ? Laisse Amarrigan décider.
Je sens l'air autour de moi vibrer. Ils sont là. Je n'avais pas rêvé tout à l'heure : j'avais bien senti leur présence.
Vite, je sors de la grotte, drapé de ma chevelure pour cacher ma nudité. Juste à temps pour voir les lignes agressives d'un croiseur à la coque parsemée d'éclats d'impacts et de peintures de guerre. Le glyphe des neuf lunes en croissant, la pointe effilée dirigée vers le centre... Le symbole héraldique de Dorśa, la Neuvième Cour d'Ombre.
Lathelennil. C'est donc lui qui est venu.
J'attends que le croiseur se pose, sans m'en approcher davantage. La haute silhouette de Rizhen en émerge, suivie de celle de mon cousin, immédiatement reconnaissable à sa chevelure bicolore courte et non tressée, réunie en queue haute à l'arrière de son crâne.
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LA CHAIR ET LE MÉTAL (Ne me mords pas)
Science-FictionLa proie : "On l'appelle Obscur, incarnation vivante des ténèbres. Un cœur plus noir que la nuit elle-même. Cœur ? Ce monstre n'en a pas." Le chasseur : "Je l'appelle Faël, celle à la blanche chevelure. La proie la plus appétissante que je n'ai eu s...