Satellite Europe, orbite de Jupiter, système de Solaris
En attendant d'en découdre avec ces orcanides qui n'attaquaient toujours pas, Varma avait fait installer la flotte amirale, les Aigles de l'Empyrée, au large de Jupiter, sur le satellite militaire Europa. Europa n'était pas le meilleur endroit pour une villégiature. Si on passait outre le message envoyé à tout vaisseau frôlant d'un peu trop près son orbite (« Site militaire. Ne tentez aucun atterrissage ici. »), encore fallait-il être un excellent pilote et posséder un corps résistant au froid. La lune de Jupiter était une masse d'eau abritant une forme de vie exogène, sous une couche de glace et de roche silicatée. Bien que l'atmosphère soit respirable, la surface à 130° kelvin rendait toute sortie impossible sans combinaison intégrale. Le satellite était pourtant habitable sans qu'il y ait besoin d'adjoindre à la colonie militaire qu'il accueillait un dôme géothermique.
L'Amirale nous ayant fait installer dans un baraquement plutôt confortable de la base, je passais la majeure partie à l'intérieur de la structure surchauffée avec mes enfants, pendant que Ren arpentait la base et passait en revue la flotte avec Priyanca Varma. Cette dernière avait requis sa science de stratège ældien, et comptait sur lui pour intervenir dans son conseil de guerre. Je me demandai comment l'état-major et les hommes de la flotte recevaient cette nouvelle excentricité de leur Amirale... Mais je n'osai pas interroger Ren à ce propos. Je préférai qu'il reste ignorant de l'image désastreuse que les humains, y compris ceux de bonne volonté, avaient des ældiens, désormais.
Depuis qu'on était là, Ren rechignait à apparaître devant moi sous sa forme originelle. Et il refusait de me toucher autrement que configuré en humain. Plus d'une nuit, il ne rentra pas du tout dans le baraquement qu'on nous avait alloué. Que faisait-il ? Ren n'était pas programmé pour dormir la nuit. Le connaissant, je devinai qu'il passait tout ce temps en méditation de combat, cherchant la meilleure stratégie pour écraser les ennemis de la République.
— Maman ! hurla Nínim de sa voix pointue dans mes oreilles. Je veux voir la neige ! Vite ! Avant qu'elle ne fonde !
— Elle ne fondra pas, Nim. Il fait moins 140°, dehors.
Les gosses étaient encore petits en taille, mais, à l'instar de Pas Douée et ses sœurs, ils étaient intenables.
Ce n'est qu'une phase, me dis-je en me penchant pour donner à mon fils toute l'attention qu'il réclamait.
— Isolda, lançai-je à notre nouvelle nounou, as-tu mis sa combi de grand froid à Caël ?
La jeune humaine hocha placidement la tête.
— Tu as retrouvé ta colonie ?
Elle secoua la tête par la négative. C'était une fille avare en paroles.
— Bon. Au moins, ce n'est pas l'une de celles qui ont été rayées de la carte.
CosmoNews ne parlait plus que ça. New Eden et Padma : des noms devenus synonymes d'horreur et de martyre. Tous les soldats de la Flotte n'avait que ces noms aux lèvres, impatients de les venger. Les journalistes péroraient sur les ældiens « unseelie », dont ils faisaient des croquemitaines encore pire que les Desséchés. J'avais connu ça, à l'époque.
— On va continuer à chercher, dis-je à Isolda. Et on va trouver, tu vas voir. Dea trouve toujours tout.
— Merci, Rika, dit-elle de sa belle voix calme et grave.
Dans ses bras, Caëlurín tourna la tête vers moi, son petit visage sombre ressemblant à un coing enrobé de plumes.
Mon petit dernier était laid comme un troll. Elbereth avait beau me dire que ce n'était qu'une période chez les perædhil – les semi-ældiens – j'étais inquiète.
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LA CHAIR ET LE MÉTAL (Ne me mords pas)
خيال علميLa proie : "On l'appelle Obscur, incarnation vivante des ténèbres. Un cœur plus noir que la nuit elle-même. Cœur ? Ce monstre n'en a pas." Le chasseur : "Je l'appelle Faël, celle à la blanche chevelure. La proie la plus appétissante que je n'ai eu s...