I - 8. "Ouahali"

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Nozikaa ralentit l'allure lorsqu'Isabella arriva à son niveau, le souffle court.

— Et tes parents, ils sont où ? demanda la fillette aux cheveux bouclés, d'une voix forte pour couvrir les bruits de la foule.

Isabella ne sut pas vraiment ce qu'il convenait de répondre.

— En fait, je cherche ma mère.

— C'est pour ça que tu t'es perdue ?

— Euh... En quelque sorte.

— Et ton père ?

Isabella fit un pas de travers.

— Quoi, mon père ?

— Eh bien, il est où ? Si tu ne sais pas où est ta mère, tu ne peux pas juste aller trouver ton père ?

Nozikaa la regarda comme si elle était complètement stupide. Isabella essaya de trouver un moyen de détourner la question.

— Je... Je ne peux pas.

— Pourquoi ? Est-ce qu'il ne veut pas de toi à cause de ta malformation ?

— Quoi ? Non ! Enfin... Je ne pense pas...

— Eh, je plaisantais ! ricana la fillette. Est-ce qu'il a été tué par les Etèleïnènmaliens ?

Le soleil tapait fort. Isabella peinait à suivre Nozikaa, autant dans sa trajectoire - elle marchait très vite et slalomait entre les passants avec agilité - que dans sa conversation.

— Les Etèleï-quoi ?

— Les Etèleïnènmaliens. Tu sais, les habitants du sud. En Etèleïnènma.

— Non... non, il n'a pas été tué par les Etèleï...Etèleïnamèniens.

— E-tè-leï-nèn-ma-liens. C'est pas compliqué.

Nozikaa se retourna brusquement.

— Tu savais que c'est grâce à mon père qu'on leur a mis une bonne raclée ? Mon père est le Capitaine de la Garde, fanfaronna-t-elle, le torse bombé, les yeux étincelants. Il a mené tous les assauts durant la guerre, y'a quatre ans, et ces barbares Etèleïnènmaliens... Ils n'ont rien vu venir !

Isabella leva les sourcils. Le père de Nozikaa devait être quelqu'un de très important.

— Et pan ! Et vla ! s'exclama la fillette en maniant une lance imaginaire. Pam, Pam ! Et hop, Rikdoménèl, vainqueur !

Elle éclata de rire.

—Trop facile. Quand je serai grande, moi aussi je serais Capitaine de la Garde. La meilleure qu'on ait jamais vue. Tu verras.

— Je suis sûre que tu seras fantastique, voulu l'encourager Isabella.

Toutefois, elle avait du mal à concevoir qu'on puisse désirer si fort devenir un soldat et faire la guerre. Elle, ça la faisait frissonner.

— Oui, c'est évident, confirma Nozikaa en reprenant sa marche. Quel âge as-tu, au fait ?

— Huit ans.

— Arrête de te moquer de moi ! Sérieusement, t'as quel âge ?

Isabella était confuse. Elle insista sur son âge, et ce fut au tour de Nozikaa d'avoir l'air perdu.

— Tu ne peux pas avoir huit ans. Tu seras un bébé, sinon !

— Euh... Pourtant tu as l'air d'avoir huit ans, pointa Isabella.

Ce n'était que la vérité, mais Nozikaa parut extrêmement outrée. Sa voix monta encore plus dans les aiguës quand elle lança :

— Je vais avoir quarante-trois ans dans moins d'une saison !

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