PRINCIPE N° 24 : SI J'ÉCLATE EN MILLE MORCEAUX, JE ME RECONSTRUIS PLUS SOLIDE ENCORE
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— D'habitude, je cherche à savoir ce que les miséreux de ton espèce ont commis pour se retrouver ici, mais toi... Toi, tout le monde le sait.
Le jeune soldat dévisageait Nozikaa depuis le début du trajet, une main sur le menton, comme s'il essayait de la percer à jour.
— C'est dingue. C'est complètement taré, même. La plupart du temps, c'est du meurte, du trafic, un bon gros braquage parfois, tu sais, les choses classiques. Mais ça ! Que la Fortune m'entende, ça, c'est du jamais vu.
La façon qu'il avait d'hausser un sourcil méprisant convainquit Nozikaa qu'elle avait affaire à un homme n'ayant jamais brisé un ordre de sa vie.
— Au roi Tahalanor, en plus ? Ah ! Je l'ai rencontré, un jour. Je lui ai parlé et tout. Le pauvre homme ne méritait pas ça, non, non. Je suis sûr qu'au fond, tu sais que ce que t'as fait, c'est pas bien. Tu sais que la Mauvaise Fortune va abattre son doigt sur toi, hein ?
Il croisa les bras
— Pff, de qui je me moque. Les hors-la-loi comme toi, vous ne voulez juste pas comprendre. Je fais ce travail depuis des années, je sais comment votre cerveau malade fonctionne.
Comment donc ce type a-t-il pu exercer pendant des années sans jamais être assassiné par un de ses prisonniers ?
Il se tut un moment et Nozikaa retrouva le calme de ses pensées. Elle regarda les arbres couverts de mousse défiler devant la vitre. Ils avaient quitté Erzik depuis peu.
La jeune fille ne désirait qu'une seule chose : commencer à être curieuse quand à ce qui l'attendait ; excitée de sauter à pieds-joints dans une nouvelle aventure. Seulement, le cratère ouvert par les griffes tranchantes ne voulait pas se refermer. Elle avait éclaté en mille morceaux ; à présent, il lui fallait se reconstruire plus solide encore, mais elle n'y parvenait pas. Elle savait pourquoi et refusait d'y penser. Ça ne faisait qu'agrandir sa blessure.
— Et si jeune, en plus ! reprit de plus belle l'enquiquineur. Je le jure, c'est de pire en pire. Bientôt, j'escorterais au portail des bébés sortis du berceau ! La jeunesse de mon époque, on était bien plus discipliné. Je ne le comprendrais jamais. Vous avez la vie devant vous et vous choisissez de la foutre en l'air ? Bon sang, je ne comprendrais jamais. Et puis, quand j'y pense... Avec un père tel que le tien ? Non, non, c'est dingue. Je ne comprends pas. Ça doit être quelque chose d'inné, un genre de pourriture présent depuis la naissance, où alors...
— Si tu ne la fermes pas, tu vas découvrir très vite ce que la pourriture en moi peut provoquer.
Il s'arrêta, choqué. À l'évidence, elle l'interrompait dans son activité favorite.
— Qu'est-ce que tu viens de me dire ? aboya-t-il. Qu'est-ce que tu viens de me dire ?
— De fermer ton clapet.
— Ah, écoute-moi bien, petite vermine ; t'es plus chez toi ici, ok ? Maintenant, c'est moi qui commande. C'est moi qui fixe les règles. T'as compris ?
— Oh, très bien.
Nozikaa s'installa bien en face de lui. Elle ne bougea pas alors que la calèche grimpait une colline.
— Pourquoi tu me regardes ? Arrête-ça. Arrête de me fixer comme ça, détraquée. Oh, tu souris maintenant ? Pourquoi tu souris ? Arrête de sourire ! Tu sais que tu ne peux rien me faire, hein ? Arrête-ça !
Nozikaa était bien décidé à le rendre assez mal-à-l'aise pour qu'il se recroqueville dans un coin, le pouce en bouche.
Mais tout à coup, la lucarne du véhicule attira son regard. Quelque chose venait de les dépasser par la droite. La seconde suivante, une forte secousse traversa la calèche qui s'arrêta. Le soldat cogna du poing la paroi derrière lui.
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Erzik
FantezieDu haut de ses huit ans, Isabella est plus seule que jamais. Son père, impitoyable, lui interdit presque tout. Il vient juste de renvoyer sa tendre nourrice ! La fillette ne sait plus où trouver du réconfort. Un soir, pourtant, en fouillant dans un...