II - 15. La vie est toujours plus facile dans sa propre peau

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PRINCIPE N° 15 : LA VIE EST TOUJOURS PLUS FACILE DANS SA PROPRE PEAU

***

- Peut-être que je rendrais une petite visite à ton père !

- Vraiment ?

- Ben, j'aurais pas grand-chose d'autre à faire. Je lui toucherais deux mots sur plusieurs sujets, tiens.

Nozikaa se frotta les mains, réfléchissant déjà à un plan de vengeance. Elle leva la tête vers Izidor, recroquevillée contre les oreillers.

- En plus, je veux voir l'endroit où tu as grandi. Ça a l'air sympa.

- Je suppose...

Nozikaa sauta à plat ventre sur son lit à côté de son amie, qui rebondit plusieurs fois.

- Il ne doit pas déjà être mort, pas vrai ? Quel âge avait-il au juste ?

- J'en sais rien... Pas très vieux.

- Tu parles ridiculement doucement.

- Désolée.

Nozikaa fronça un sourcil. "Désolée" ?

Izidor allait moins bien qu'elle ne le pensait. La Ouahali s'excusait pour rien quand elle était une fillette de huit ans, plus aujourd'hui !

Quatre jours avaient défilé depuis le premier rendez-vous avec Sihimanus. La Saison Rouge avait cédé sa place à la Saison Grise. Izidor était venue tous les soirs. À vrai dire, ça n'était pas très différent d'avant le bannissement, mais il y avait... Comment dire ? Une pression en plus.

Nozikaa savait depuis le début combien la décision de la reine affecterait sa meilleure amie. D'un côté, elle était touchée - savoir qu'il existait toujours une personne l'appréciant au moins un peu sur cette planète n'était pas désagréable - mais la Nartiz ne souhaitait pas passer ses quinze derniers jours sur Izold avec une Izidor déprimée.

Nozikaa aussi s'était senti au bord du gouffre. Il ne servait à rien de le nier ; le seul moment du premier jour dont elle gardait souvenir étaient les mots de son père, sur le banc. Pourtant, depuis son explosion à la suite des paroles de Sihimanus, elle se sentait mieux ; de retour dans sa peau. La vie était toujours plus facile dans sa peau. Et, si elle ignorait l'aiguille lui empalant la poitrine quand elle réfléchissait trop à la signification de cinquante années au loin, elle était presque de bonne humeur.

Le truc, c'est qu'elle avait retrouvé ce qui l'animait : un but. Quelque chose sur lequel focaliser son esprit en éternelle activité - quelque chose de mieux que la colère.

Les leçons avec Sihimanus occupaient tout son temps. Il lui avait fait répéter mille fois toutes les règles et étapes du processus, raconté les histoires d'une dizaine d'exilés ayant mal tourné et expliqué en détail comment elle devrait se dépatouiller une fois là-bas. Par exemple, changer d'identité toutes les décennies serait une bonne idée. Mais la plupart du temps, il rabâchait que les Hommes étaient de "merveilleuses créatures, complexes, imparfaites, mais fascinantes".

- Ils vont si vite, Nozikaa. Tu verras ! Ils sautent d'une chose à l'autre sans te laisser le temps de comprendre. Et ils en veulent toujours plus. Nous, Nartiz, nous contentons de ce qui est. Les humains, eux, poussent plus loin, encore et encore. Tu devrais bien t'entendre avec eux. Oh, et leur technologie - par Erzikaa, il faut que tu vois ça...

Il continuait ainsi jusqu'à la tombée du soir. Un vrai mordu.

Le deuxième jour, Nozikaa s'était excusée auprès de son oncle pour son ouragan de la veille. Après tout, elle lui avait crié dessus seulement car il s'était trouvé là. Rien de personnel. Elle n'était pas nécessairement désolée mais plutôt réticente à le voir s'inquiéter : il valait mieux qu'il croit qu'elle ne pensait rien de son petit discours. Il valait mieux qu'il n'en fasse part à personne. Nozikaa désirait encore moins effrayer ses parents.

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