Chapitre 5

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Avant

Si la plupart des jeunes à l'université passent leurs jeudi soir à boire, à sortir ou bien même à réviser pour les plus studieux, ce n'était pas le cas de Naël et moi la semaine qui suivit ma dernière nuit avec Oscar.

- Tonton Naaaaaaaël, je veux PAS manger.

Nous devions garder Théo, son neveu âgé de 4 ans parce que ses parents étaient sortis pour la soirée. J'avais beau l'avoir maudis trente fois, les choses restaient les mêmes, ce garçon était insupportable et n'aimait rien. Ça aurait été plus drôle de dire que le t-shirt de mon meilleur ami était décoré d'une grosse tâche gluante à cause de la quantité d'alcool que nous avions bu dans la soirée et que son corps avait décidé de tout rejeter mais ce serait faux. Théo avait juste renversé ses pâtes carbonara sur lui.

Pour sa défense, elles étaient vraiment dégoûtantes parce qu'en plus d'être le seul plat dont le blond connaissait la recette, il ne savait pas le réaliser correctement. Plus d'une heure après le début du repas, nous étions toujours autour de la table à essayer de convaincre ce gosse d'avaler au moins les lardons mais il faut croire qu'il était plus têtu que nous deux réunis. Je commençais à essayer de faire preuve d'une réelle autorité en employant des phrases bateau d'adultes :

- Parce que tu crois que tu as le choix?!

- J'abandonne, on le met au lit.

- Il n'a pas mangé!

- Tant pis pour lui!

J'ai levé les bras avant de les refaire tomber sur la table de manière dramatique. Nous étions dans la maison de la petite famille, en plein milieu de la pièce principale. Les lumières du sapin de Noël clignotaient et changeaient de couleurs, tout était devenu calme pendant quelques secondes, jusqu'à ce que le démon se réveille.

- NON MOI JE VEUX MANGER.

Hallelujah! J'ai pris son assiette qui avait été vidée sur la table quelques minutes plus tôt, je l'ai rempli à nouveau et je l'ai placé juste devant lui. Il m'a regardé droit dans les yeux, a pris sa fourchette et de son autre main, d'un geste vif, a giflé le plat pour l'envoyer sur le sol.

Je savais que la violence c'était mal, que ce n'était qu'un enfant, que ses parents lui manquaient probablement et que ce n'était pas forcément le repas qu'on rêve de manger lors de soirées exceptionnelles comme celle-ci donc j'ai pris sur moi en mordant ma lèvre très fort, le poing contre la bouche. Naël a plaqué sa main sur son front, désespéré. Nous étions à deux doigts d'appeler de vrais baby-sitters pour s'occuper de ce truc.

Mon meilleur ami a toujours été d'une nature assez tranquille et j'ai été le premier surpris lorsqu'il s'est levé d'un coup pour cogner ses poings contre la table.

- ÇA SUFFIT THÉO. TU DÉPASSES LES BORNES, MONTE DANS TA CHAMBRE.

Mes yeux sont devenus ronds comme des soucoupes. Je veux dire, il ne s'était autant emporté qu'une fois, lorsque Antoine s'était moqué publiquement de moi à cause de mes chaussures de sport vertes en primaire.

Le gosse est descendu de sa chaise et a couru jusqu'à l'escalier sans protester. Lorsqu'il a enfin disparu de notre champ de vision je me suis levé pour ramasser au maximum ce qui était tombé sur le sol.

- Wow. J'ai commenté après un silence.

- Non mais il est fou Greg de nous laisser un monstre pareil ou quoi? Il y eu un court silence avant qu'il ne poursuive. Oh non! Son exclamation a laissé place à un bref silence, pendant lequel son visage semblait se décomposer à mesure de sa réflexion. Ils ne reviendront pas. C'est pour ça qu'ils nous ont appelés, ils ne voulaient pas le laisser tout seul mais en même temps ils ne voulaient plus de lui.

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