Chapitre 41

40 8 1
                                    

Avant

Plusieurs mois auparavant je pensais que l'été serait enclin aux festivals, à la fête, à l'alcool et aux voyages. C'était pour moi une façon idéale de passer du temps avec ses amis, de profiter du soleil et de notre temps libre. Les évènements qui ont précédés cette pause estivale ont largement entravés nos plans avec Oscar mais finalement ce n'était pas plus mal. On est restés la plupart du temps ensemble. Lorsqu'il ne travaillait pas on allait se baigner, on écrivait des chansons qu'il me chantait à la guitare, je lui ai appris à faire du skateboard, on est allé camper un jour ou deux, on se racontait des secrets au coin du feu, on s'est aimé si fort. Sur son avant-bras il s'était même fait tatouer une rose, celle du Petit Prince, et il m'a donné le courage de sauter le pas pour me faire mon premier dessin intemporel. J'ai choisi un buste de cerf, sur le biceps, c'est un détail qui m'avait marqué dans le restaurant où nous avions dîné après ma découverte du Cloud91. Je voulais symboliser ce moment où pour la première fois j'ai pu remonter le moral d'Oscar et l'entendre rire toute la soirée sans se soucier de ce qui nous entourait.

A la fin de l'été, avec toute ses économies, Oscar m'a offert un clavier, pour que je continue de composer. Je rêvais d'un et puisque sa dette était épongée il a profité de l'argent qu'il a gagné pour me faire un cadeau précieux.

Tout était parfait. C'était cliché mais je ne pouvais pas trouver un seul défaut à notre relation. Il continuait de me montrer plein de films ennuyants à mourir, moi je continuais de l'embêter en m'étalant sur lui, on formait un équilibre idéal.

Quand on est adolescent on pense souvent que la personne avec qui on est on l'aimera toute notre vie, que rien ne pourra nous séparer et que nous sommes des sortes d'âmes-sœurs. Avec du recul, quand tout et fini et qu'on grandit on se rend vite compte que c'était naïf et trop précipité. Ma relation avec Oscar, je l'admirai tant que je ne voulais pas imaginer une possible fin. C'était entièrement réciproque de son côté d'ailleurs. On faisait des projets d'avenir ensemble, il s'installait de plus en plus chez moi, on dînait parfois chez Anne comme des adultes, ou bien on allait voir mes sœurs, mon frère et ma mère.

Et puis comble de tout, à la rentrée j'ai été sélectionné pour entrer dans l'équipe de foot de la faculté. Les joueurs était assez sympathique, on ne m'a jamais fait une quelconque réflexion sur ma sexualité, bien que je ne l'exposais pas particulièrement. Naël était redevenu un grand supporter, mais il ne dépassait jamais l'assiduité d'Oscar. J'adorais cette période de ma vie, épanouie, insouciante. On ne réfléchissait pas au lendemain, on ne s'abandonnait jamais si ce n'est l'un à l'autre.

Pour le premier match qui marquait l'ouverture de la saison, je courrais pour lui. Je jouais en position attaquante, la balle restait collée à mon pied à chaque coin du terrain. Je suis tombé, comme tout le monde, mais je me suis toujours relevé pour foutre une raclée à nos adversaires. Je jouais à 200%, en pleine forme, je m'amusais comme un gamin. Quand le souffle me manquait je n'avais qu'à tourner la tête vers lui pour retrouver toute l'énergie dont j'avais besoin.

A la fin du chrono le coach était plus que fier de notre toute première victoire de la saison, peut-être presque autant que Oscar. Je m'apprêtais à le rejoindre dans les gratins qui se vidaient, bien que j'étais dégoulinant de sueur et épuisé, lorsqu'un homme m'a interpellé un peu plus loin. Il était au premier rang, et contrairement aux autres spectateurs il portait une chemise. Sa tête me disait étrangement quelque chose. Je me suis approché prudemment.

-         Bonsoir Monsieur Page, félicitations pour votre match.

-         Appelez-moi Isaac, mais merci beaucoup !

COLORFULOù les histoires vivent. Découvrez maintenant