Cela faisait maintenant dix jours que mon père avait été enterré. Malgré les gens qui continuaient à me présenter leurs condoléances par courrier ou en personne depuis plus d'une semaine, ce matin, je m'étais préparée pour aller lui rendre visite au CHU. Ce n'était qu'une fois arrivée devant la Mustang que je réalisai qu'il n'était plus à l'hôpital. C'était délirant comment mon cerveau refusait de faire certaines connexions, me laissant dans le déni. Je balayai la rue du regard, totalement paumée, avant que des yeux marrons-verts m'accrochèrent pour me guider à lui. Arrivée à sa hauteur, je lançai :
- T'es matinal ou tu t'es pas encore couché ?
- À ton avis ? Répliqua Tarik avec un regard cerné par la fatigue.
- Tu devrais aller te coucher, y'a personne à qui vendre si tôt.
- J'vais pas aller me coucher juste pour une heure.
Je le regardais sans comprendre, ce qu'il remarqua :
- T'as oublié c'est ça ? T'as rendez-vous chez le notaire Lou, me rappela t-il en passant une main derrière son crâne. J'pensais que t'étais descendue pour ça.
- Ah non, pas pour ça non...
- Pourquoi alors, demanda t-il en se levant de sa chaise.
- J'allais le voir au CHU..., murmurai-je honteuse. J'ai capté qu'en arrivant devant la voiture, dis-je tournée vers la Mustang.
- C'est pas grave Lou, tranquille. Laisse-toi l'temps, lança Tarik en posant sa main sur ma nuque. Viens, j'monte prendre une douche et j't'emmène.
Il ouvrit la porte du hall et je m'engouffrai à l'intérieur du bâtiment, agressée par une odeur de pisse. Deux cafards traversèrent devant moi :
- Mais c'est quoi ce délire, m'exclamai-je dégoûtée.
- Ah ils sont comme nous tu sais, ça squatte à la recherche de chaleur pendant l'hiver. C'est vrai, tu venais l'été avant, on les voit moins, remarqua t-il sans plus d'émotion.
J'attendis Tarik sur le canapé du salon en fixant l'écran de la télé pourtant éteinte. L'aîné des Andrieu me sortit de mes pensées un quart d'heure plus tard, grâce à son odeur de gel douche et déo mélangée. Il me regarda un instant avant de lever son bras dans ma direction comme une invitation à venir me blottir contre lui. Je me levai pour entourer sa taille tandis qu'il embrassait mes cheveux.
- J'ai rien préparé du dossier pour le notaire, réalisai-je ma joue toujours plaquée contre son torse.
- Nabil s'en est occupé, regarde.
Tarik se décolla pour aller chercher une chemise cartonnée posée sur la table du salon toujours aussi encombrée de papiers. Il l'ouvrit pour vérifier ce qu'elle contenait avant de me la tendre.
- Putain, qu'est ce que j'ferais sans ton frère, réalisai-je reconnaissante.
- Viens, on va passer à la Madeleine vite fait, on a l'temps pour un fé-ca.
J'acquiesçai avec un petit sourire.
***********
En sortant du notaire peu avant midi, j'étais dorénavant la propriétaire de l'appartement et de la voiture de mon père. Apparemment, une assurance vie allait m'être reversée d'ici quelques semaines. J'étais soulagée car grâce à cette entrée d'argent, j'allais pouvoir régler les factures de l'enterrement. Je ne pensais pas que ça coûtait aussi cher. Tarik me ramena à la maison sans poser de questions, néanmoins, ses coups d'œil discrets montraient l'inquiétude qu'il éprouvait pour moi. Je savais que j'étais sans vie, absolument pas concernée par ce qui m'entourait. J'étais éteinte et je n'avais aucune idée de combien de temps cet état allait durer.
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Sourire à l'envers
FanfictionDe retour par la force des choses aux Tarterêts, Elle va se construire, se détruire entourée des meilleurs comme des pires. Le Zoo tord l'âme, pas que la sienne.