4. Les lettres disparues

1.3K 238 67
                                    

Sans doute à cause de ce que je lui ai confié tout à l'heure, Rinsheng me libère bien plus tôt que d'habitude. Aussi, dès qu'elle me laisse dans le hall de l'école, je me dépêche de filer vers mon dortoir.

Aujourd'hui, les filles sont occupées dans une salle commune, à broder des décorations pour la Fête de la Montagne qui aura lieu dans quelques jours. Je devrais donc être tranquille pour sortir le bijou et contacter l'empereur. Mais qui sait pour combien de temps encore avant qu'elles ne me rejoignent ?

Je suis en chemin vers ma chambre, perdue dans mes pensées, quand une voix me lance d'un ton fâché :

- Pourquoi tu l'ignores comme ça ?

Je relève la tête pour découvrir Jihanei, une huitième année. Bras croisés, assise dans l'alcôve de la fenêtre du couloir qui donne sur la porte de mon dortoir, elle m'adresse un mélange d'incompréhension et de reproche. Ce n'est pas possible... elle ne peut pas être elle aussi dans le secret pour l'empereur et moi ?!

Prudemment, je demande :

- De quoi tu parles ?

- Tu sais bien de quoi je parle, répond-elle d'un air sévère. Tu pourrais au moins lui répondre. Rien que pour lui dire de te laisser tranquille, s'il te dérange tant que ça ! Tout ce que tu fais en l'ignorant, c'est lui manquer de respect. Il ne mérite pas d'être méprisé comme ça ! T'avais pas l'air d'être du genre à te croire supérieure pourtant, alors pourquoi tu fais ça ?

Battant des paupières, perdue, je m'exclame :

- Mais de qui et de quoi tu parles ?! Je ne comprends rien...

- De mon frère ! De ses lettres !!

- Quelles lettres ?

Mon expression est si surprise qu'elle m'observe un instant en silence, avant de répliquer :

- Mais celles qu'il t'a envoyées !

Mais de quoi elle parle ?

- Depuis que je suis ici, je n'ai reçu aucun courrier à part celui de mes cousins.

- T'es sûre ?

- Mais oui !

Est-ce que c'est ça qui me valait ces curieux regards de Semkei les dernières fois au temple, puis son air abattu ? Il m'aurait écrit, mais je n'aurais rien reçu ?

- Ça t'ennuie si je vérifie ? me demande-t-elle en indiquant le dortoir d'un coup de menton.

- Euh... je croyais qu'on n'avait pas le droit de faire entrer d'autres élèves dans nos dortoirs ?

Si les surveillantes ont une clé spéciale pour totalement verrouiller nos chambres la nuit, de jour elles ne sont fermées que par un petit loquet. Cela suffit cependant, en théorie, à empêcher d'autres élèves d'y accéder.

Nous le débloquons en appuyant sur certains boutons intégrés à la serrure, dans un ordre précis. Les filles m'ont montré dès le premier jour comment faire, même s'il est rare que l'une d'entre nous regagne son dortoir seule.

- Tu vois une surveillante quelque part ? rétorque Jihanei avec ironie.

- Non...

- De toute façon, pour un truc comme ça, ça ira. C'est pas comme si on allait faire la fête dans ton dortoir ou je ne sais quoi ! Bon, ouvre-moi la porte.

Je n'ai pas envie de me faire encore une nouvelle ennemie. Je lui donne donc aussitôt accès à la chambre.

- Où est ton lit ? demande-t-elle.

Le Harfang & Le Loup - T2 - Le Manipulateur d'ÉnergieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant