Le Harfang & Le Loup - T2 - Le Manipulateur d'Énergie

24. Une confession inattendue

Plusieurs fois, je louche vers la somptueuse théière sans pour autant oser me servir. Je finis par décider qu'on ne va quand même pas laisser le thé refroidir... alors si d'ici un quart d'heure je suis toujours seule, j'en prendrai une tasse. 

Mais finalement, après seulement quelques minutes, la porte s'ouvre. Je m'attends à retrouver un empereur accablé, tant par ce qui s'est passé hier soir, que par le fait d'avoir dû faire bonne figure devant ses courtisans. 

Pourtant, dès que Kianshei m'aperçoit, son visage s'illumine, comme si sa fatigue et ses soucis venaient de s'envoler.

Ses yeux ne me quittent plus, subjugués. On croirait que je suis devenue une oeuvre d'art...  je prends alors seulement pleinement conscience de ce que voulait dire Xemtei. J'ai eu tort de lui dire qu'il exagérait ! Mais depuis combien de temps est-ce que l'empereur me regarde comme ça ?

- Je suis désolé de vous avoir fait attendre ! s'excuse-t-il en venant vers moi. 

Évidemment, je secoue la tête pour lui faire comprendre que ça n'a aucune importance.

- Mais non ! C'est déjà bien que vous ayez pu venir.

Il n'hésite qu'un instant avant d'embrasser mon front puis de m'observer. Brièvement, il effleure ma joue avant de retirer sa main.

- Vous êtes superbe.

Je toussote en baissant les yeux sur mes vêtements :

- C'est la tenue...

Il rit, ripostant avec franchise :

- Non ! Vous êtes toujours superbe ! Mais c'est vrai que votre tenue l'est également, je suis heureux qu'elle vous plaise.

- Je vous remercie, mais vous savez, je n'en avais pas besoin...

- Vous, peut-être, mais moi, oui, rétorque-t-il avec amusement.

Gênée, je balbutie :

- Vous êtes... votre tenue est très bien aussi.

Je me sens stupide sitôt que la phrase a quitté mes lèvres. Évidemment que sa tenue est très bien, c'est celle d'un empereur ! Et ça se voit encore plus, maintenant que je peux l'observer autrement qu'en coup de vent, comme lors de la présentation.

Sa tunique principale, rouge, est taillée dans un damas de soie étonnamment fluide. D'ici, je découvre les nuages et rivières, qui la parcourent. C'est la première fois que je vois un tel tissage, si finement exécuté qu'on pourrait croire que les motifs sont peints. Je devine qu'il nécessite une technique aussi coûteuse que complexe.

Les bords du col haut de la tunique ne tracent pas une ligne droite, mais plongent en deux courbes douces, comme des pans de collines, qui se rejoignent au milieu de son cou. Il est taillé dans la même soie fluide que celle de la tunique principale, sauf qu'elle est d'un blanc aux reflets cuivrés. Deux jaspes rouges, rondes et serties dans de l'or ciselé, le ferment élégamment. Sous la tunique, on ne devine une chemise dorée que par son col qui dépasse à peine.

Son vêtement est si long et ample qu'il pourrait passer pour une robe. Il laisse toutefois apercevoir un large pantalon plissé, cousu dans un taffetas épais.

L'empereur porte par dessus le tout un caftan noir, sans manches, qui souligne sa silhouette élancée. Je réalise à présent que la grande broderie au fil d'or qui le parcourt représente un dragon ailé.

Le tout est maintenu par une ceinture, faite d'une large couche de soie dorée recouverte d'une couche de soie blanche plus rigide, elle-même cousue de jaspes rouges et ornée par de grandes décorations métalliques en or, qui en font tout le tour.