47 - Peine profonde

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La vie était belle par ici. Bien qu'elle soit fade. La vie avait toujours été fade en réalité. Ce n'était que lorsqu'il l'avait rencontré que ça avait changé. Et encore, il s'était mal comporté. Il avait brutalisé l'être qui lui était destiné. Tout ça pour satisfaire ses besoins primaires et qui le suppliaient de compléter le lien. C'étaient aussi ces besoins, ces pulsions qui l'avaient poussées à la dérision. Il avait été ridicule. A cause de l'insignifiance de cette femme, il avait blessé celui qu'il devait impérativement protéger. Il l'avait piégé, sans même y avoir pensé. Il avait gâché sa vie, et ce, depuis qu'il l'avait rencontré. Il l'avait forcé, il l'avait collé, l'avait surveillé. Il l'avait privé de son entière liberté. Alors le voilà, ici, éloigné, privé de la présence de cet être qu'il aimait. Ah ça oui, il l'aimait. Malgré tout le mal qu'il lui avait fait. Il était amoureux de l'homme. Certains vampires se sentaient piégés par leur calice, leur attirance proviendrait du lien selon eux. Mais, c'était faux. Entièrement faux. Il n'aimait pas cet homme parce que c'était son calice. Il l'aimait parce qu'il brillait. Il était foutrement têtu, complètement attirant. Sa jeunesse le rafraichissait et, à ses côtés, il se sentait redevenir jeune, vivant. Il ne l'avait plus été depuis bien longtemps. Ses gamineries étaient aussi exaspérantes qu'hilarantes. Et les situations improbables dans lesquelles ils le retrouvaient l'inquiétaient autant qu'elles le faisaient marrer. Pourtant, il avait été différent. Il y avait de cela longtemps. Il avait changé. Il s'était renfermé et avait souffert en silence. Sans qu'il ne puisse l'aider. Et, à peine reconstruit, les blessures pas encore complètement refermées, il arrivait et lui infligeait ce que tantôt, il avait tenté d'oublier. Il ne le méritait pas. Il ne l'avait pas épargné. La vie ne l'avait pas épargné. La justice l'avait ignoré. Alors, cette fois-ci, même si ça faisait mal. Bien qu'il ait été tenu à l'écart, il allait assister au procès et, il s'assurerait de voir le coupable payer pour toutes les peines qu'il leurs avaient causées.
Pourtant, lui aussi devait payer pour ce qu'il avait fait. Il était condamné par les regrets. Bien qu'il voulait tout changer, il se savait impardonné, pour l'éternité. Il n'osait même plus croiser son regard ou bien même celui de sa famille. La honte le submergeait à chaque fois. Mais, le pire, c'était lorsque ses yeux croisaient ceux bleus de l'homme qu'il aimait. Il les revoyait tremblants, remplis de larmes. 
Ses yeux se fermèrent, il finissait toujours par y repenser, et se condamner lui même. Mais, ne l'avait-il pas déjà été lorsqu'Allan avait coupé le lien ? Lorsqu'il les avait séparés ? Son téléphone vibra entre ses doigts. Il fut obligé de rouvrir les yeux, et là, son reflet fit face à l'écran noir. Il lui exposait la faiblesse de ses traits et ses larmes qui le menaçaient. Elles le quittèrent lorsqu'il décrocha, ravalées.

-Adrien.

L'inquiétude les remplaça. Le ton froid de sa mère le guettait. Il se sentait examiné.

-Oui maman ? Tout va bien ?

-Comment se passe ce second jour ?

Son inquiétude ne le quitta pas, mais, elle se tut loin de là. Ses yeux divaguèrent sur le paysage en face de lui. Il se sentait indécis. Parler était devenu étranger dans l'immensité de la solitude.

-Je ne sais pas maman.

Il l'avait avoué. Et, il attendait, le souffle coupé. La légère brume ne l'apaisa pas cette fois. Elle le tira même dans la noirceur de ses tourments.

-Antoine nous a appelé.

Il reprit vie, soudainement. Son esprit se ranima, son cœur battait une nouvelle fois.

-Comment va-t-il ?

-Ce serait plutôt à toi de me le dire.

Il se redressa, il ne comprenait pas.

Captivant TOME 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant