71 - Plutôt douleur pour la vie

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Depuis bien longtemps, ma tête reposait sur la table, tentant d'absorber un semblant de fraîcheur tout en essayant d'omettre ce terrible déchirement qui me relançait régulièrement. Mon dos était bien plus qu'en compote. Il semblait avoir été entièrement fracturé tant la douleur était atroce. Pourtant, je retins ma voix. Cela allait passer. Ca me l'avait déjà fait. Je m'étais inquiété pour rien et, finalement, le médecin nous avait renvoyé chez nous après de longues heures à l'hôpital pour une fausse alerte. Je m'étais sentis bien bête. Je ne voulais pas à nouveau faire perdre du temps aux autres. Surtout qu'ils n'avaient même pas pu me soulager. Ce n'étaient que de petites douleurs, ça finirait par passer. En rouvrant les yeux, je tombais sur les regards à la fois perdus et inquiets de personnes qui se trouvaient à proximité. C'étaient des calices, ils savaient ce qui m'arrivait. Peut-être même des vampires, je ne savais pas encore bien différencier les deux, même si j'étais persuadé que ça viendrait. Je me redressais, mes mains crispées sur mon ventre. Tenter de focaliser mon esprit sur autre chose ne marchait pas. La douleur ne passait pas.
Voyant l'un se pencher vers moi, je levai l'une de mes mains en secouant la tête.

-Ca m'est déjà arrivé, ça va passer, assurai-je.

L'attention se détourna alors de moi, même si je sentais encore quelques regards insistants. Ils étaient prêts à intervenir si ça dérapait. C'était bon à savoir. J'aimais plutôt bien cette solidarité chez eux. Je me tordis à nouveau en deux, incapable de supporter cette douleur normalement assis. Pourquoi c'était de plus en plus fort ? Soudainement, je pâlis. Je m'accrochais alors férocement à la table, mon inquiétude dépassant ma douleur. Sous le déplacement soudain de ma table, Allan se retourna, avec son téléphone. Je ne fis pas attention au fait qu'il n'en avait pas le droit, maintenant une pensée dans mon esprit.

-Qu'est-ce que t'as ?

Il leva finalement ses yeux de son téléphone et se figea quelques secondes.

-Oh merde, jura-t-il.
-Ce n'est pas le moment, affirmai-je.

Cependant, il ne me croyait pas. Et je compris parfaitement pourquoi. Je ne devais pas ressembler à grand chose, là, comme ça, le teint pâle, les cheveux en bataille et les yeux douloureux.

-C'est trop tôt, soufflai-je.

La douleur allait jusqu'à m'empêcher de parler. Je l'avais trop longtemps réprimé. Alors, plus forte encore, elle se manifestait.

-Antoine, on s'en fout de quand ça arrive. Ce qui compte, c'est que ce soit entrain d'arriver, me rassura-t-il calmement.

Discrètement, il se glissa à mes côtés. Puis il attrapa ma main et me regarda dans les yeux.

-Depuis combien de temps tu es dans cet état ?

J'haussais les épaules. J'avais perdu toute notion du temps. De ce qui m'entourait et qui était important. Une voix inconnue murmura faiblement et mes yeux que j'avais fermés se rouvrirent soudainement.

-Plus de quinze minutes.

Allan soupira en se tournant vers moi. Mon corps s'était encore une fois plié pour tenter de supporter les pointes régulières qui me torturaient.

-Ca peut pas être le moment, repris-je sans y croire. Il reste trois semaines au moins. Ils ne sont pas encore totalement prêts. Ils vont être en danger si c'est maintenant.

Mon ami caressa ma joue et mon front, dégageant les mèches qui s'y étaient collées.

-Ce sont des jumeaux Antoine, c'est assez fréquent lors de grossesses multiples que l'accouchement ait lieu plus tôt.

Captivant TOME 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant