La partie d'échecs

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Whickam

La vie est un jeu d'échec, dans tous les sens du terme.
Le but étant bien évidemment que l'échec soit pour son adversaire.

Je pensais la partie pliée, que j'avais joué mon dernier coup et que je pouvais me retirer vainqueur sans trop de mérites. Cependant le jeu s'est avéré beaucoup plus amusant que je ne l'avais escompté.

J'avais fait mon baluchon et pris la poudre d'escampette en laissant derrière moi cette sotte de Lydia seule avec mes dettes. Je suis ainsi, je ne m'embarrasse jamais de remords qui ne font qu'encombrer l'esprit de ceux qui pensent avoir tort.

Mais à peine m'étais-je éclipsé de l'auberge par la porte arrière afin que personne ne me voit, qu'un messager me héla. Il avait une lettre que je n'attendais plus, Caroline m'avait répondu.

Ses quelques mots écrits précipitamment exprimaient des sentiments discordants. En premier lieu, elle m'informait que notre petit stratagème avait fonctionné car Miss Elisa s'en était retournée prestement auprès de ses parents, laissant comme nous l'avions fomenté Mr D en pleine contrariété.

Mais la suite du courrier me surpris fortement, car ce dernier ne décida pas de rester auprès de ses invités, ce qui semblait fort ennuyer mon amie et je la comprends. Elle me mettait en garde et me priait de fuir car l'homme qu'elle espèrerait consoler était parti en toute hâte en direction de Londres. À n'en point douter, il venait me chercher.

Je suis allé me rincer le gosier à la première taverne venue afin de cogiter à cette nouvelle inattendue. Ainsi donc le fier Darcy aurait-il l'idée de venir sauver cette petite dévergondée?

Qu'il l'ait fait en son temps pour Georgiana n'avait rien d'étonnant. Sa sœur était la cible toute trouvée pour me venger. Cette jolie petite oie blanche fut si facile à duper ! Oh, si j'avais pu concrétiser mon projet, je l'aurai épousé et serais devenu habitant permanent de Pemberley, quoi qu'il en aurait pensé.

Mais cette Lydia? Qu'à t'elle donc ? Elle n'a aucune tenue, jacasse comme un dindon et a une haute estime de sa personne. Bien qu'elle ait une douzaine d'années de moins que moi, elle n'en est pas moins polissonne. Il ne me fallut pas insister pour toucher la demoiselle, à croire qu'elle n'était déjà plus pucelle !

Certes, nos parties charnelles sont des plus énergiques et l'emprise que j'ai sur elle attise ma gourmandise. Mais je me lasse vite lorsque le jeu est trop facile. Je pensais être resté auprès d'elle bien plus longtemps que nécessaire mais il semble que j'ai trouvé une raison pour prolonger notre relation.

Avant de retourner auprès de cette idiote il me fallait rencontrer celle qui pouvait nous héberger de manière plus prolongée. Je me rendis donc à Whitechapel afin d'y trouver ma grande amie Miss Younge qui y avait ouvert récemment un établissement.

Me revoir après tout ce temps ne l'enchanta guère et je cru un instant qu'elle allait me faire des misères. Mais je sais faire preuve de persuasion et me montrer têtu lorsque je souhaite arriver à mon but. Elle changea d'idée devant un verre de brandy et scella notre accord dans un bon lit.

Retourné auprès de Lydia tard dans la nuit, elle me fit une scène avec beaucoup de bruit sous prétexte que je sentais l'alcool et le mauvais parfum. Ce qui la mettait dans cet état était surtout qu'en mon absence l'aubergiste était venu réclamer son dû. Il était temps de déguerpir de ce trou à rats et de m'apprêter à affronter le maître de Pemberley.

Orgueil & TentationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant