La rumeur de trop

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Oyé, les chapitres se suivent mais ne se ressemblent pas !
Ces vacances m'ont permis au moins d'être productive !

Charlotte

J'étais installée, tranquille, dans le jardin à l'ombre du cerisier.
Je regardais au loin mon mari biner ses rangées de radis et de navets.
Je profitais de cette pose bien méritée pour ouvrir discrètement le courrier que ma mère venait de m'envoyer.

Sa précédente lettre avait fait bondir mon époux lorsqu'il apprit que Lydia, sa jeune cousine, s'était mariée avant ses aînées. Une rumeur courait à Meryton qu'elle serait revenue l'anneau au doigt au bercail bien après l'avoir quitté.

J'en veux encore à mon mari de n'avoir pas gardé cela secret, et à Lady Catherine avoir tout raconté. Pourquoi diable s'entêter à salir sa propre famille en divulguant des propos infondés?
Mais cela eut l'entonnant effet de me distinguer. Car la lady fit le compliment que son choix d'épouse avait été finalement bien avisé.

J'espérais que cette missive qui venait d'arriver m'annoncerait des banalités, le dernier livre que Maria aurait lu, l'avancée des récoltes ou le nombre de chatons de la dernière portée. Au lieu de cela une très bonne nouvelle, le mariage de Jane Bennet avec Mr Charles Bingley !

Cette information était toute aussi étonnante qu'inespérée. La brave Jane allait enfin avoir l'union qu'elle désirait ! Je souris à cette idée. Je les revois tous deux se tourner autour sans oser se l'avouer.

Je fis signe au loin à Mr Collins pour l'en informer. 
Après tout, chaque fille Bennet de mariée est un poids qui allège leur destinée. Mais la suite de la missive me fit aussitôt regretter de l'avoir appelé.

Lors d'un repas gargantuesque que Mrs Bennet avait organisé, ma mère et plusieurs de ses amies auraient remarqué des regards que se seraient donnés Lizzie et un certain Mr Darcy ! Et d'arriver à la conclusion qu'un autre mariage serait probablement célébré dans la foulée !

D'ordinaire, je ne suis pas encline à écouter les billevesées que Meryton a l'habitude de colporter. Mais, connaissant les deux intéressés, cela devenait plus que plausible. Cela me ramenait à des situations déjà vécues, des conversations déjà lancées.

Ma chère Lizzie, je souris à l'idée de vous voir un jour liés. Vos caractères si semblables, vos intelligences si affûtées...

C'est alors qu'apparut devant moi mon époux, intrigué, pensant que j'avais quelque nausée. Je refermais vivement la lettre et lui annonçais les fiançailles de l'aînée. Il eut l'air étonné, pensant que cela était déjà fait. Du moins c'est ce que Mrs Bennet avait déclaré lorsqu'à Longbourn il séjournait.

Curieux de nature, il me prit des mains le courrier. Saisie, je ne pus l'en empêcher. Il lut d'une traite les mots que mère avait couchés et sur son visage je vis toute sa contrariété.

Comment? Qu'est-ce donc? Cela ne se peut ! Votre mère n'est-elle donc pas informée que Mr Darcy est déjà fiancé ?

J'ai tenté de calmer son indignation sans y parvenir. Il clamait qu'il voulait sur le champ se rendre à Rosing et en informer Lady Catherine. Mais il ne lui fut pas nécessaire de se déplacer car derrière lui se tenait la concernée.

Nous étions trop occupés à nous quereller que nous n'avions pas entendu la calèche arriver et, alertée par nos cris, la Lady avait contourné la maison.
Je fis une révérence d'usage avec la contrition qu'il sied à cette situation. Mais elle n'en eut que faire et se mêla directement à la conversation.

Qu'est-ce donc tout ce bruit ? Et de quoi dois je être informée?

C'est ainsi, et contre mon gré, qu'elle prit connaissance du contenu du courrier. Ébahie, outrée, choquée, je n'ai pas de qualificatif pour exprimer son mécontentement. Elle vociféra quelles insultes à l'encontre de mon amie et de sa famille et partit avec précipitation dans la direction opposée de sa propriété.

Orgueil & TentationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant