Mahiru attendit d'être rentrée chez elle pour s'autoriser à pleurer. Peut-être par fierté. Peut-être parce qu'elle n'en avait pas eu la force jusque-là. Peut-être parce que c'est seulement à la maison qu'elle se retrouva seule avec sa tristesse et ne parvint plus à l'ignorer. Toujours est-il qu'à peine avait-elle franchi la porte d'entrée, qu'un soupir tremblotant avait franchi la barrière de ses lèvres et que les picotements dans ses yeux avaient laissé place à un torrent de larmes depuis trop longtemps retenu.
C'était des larmes d'un peu tout : chagrin, déception, remords, colère... De la colère surtout, une colère sourde et aveuglante, qui repoussait les limites de son esprit à chaque fois que la reporter essayait de l'étouffer, si bien qu'elle ne savait plus vraiment contre qui c'était dirigé entre Kinako, Atsumu et elle-même. Surtout contre elle-même, à vrai dire, car elle s'était laissé bêtement aveugler par l'illusion d'une réconciliation heureuse avec sa meilleure amie pour un retour plus que brutal à la réalité. Et puis il avait fallu qu'elle laisse encore une fois libre court à ses émotions avec cet idiot de volleyeur, qui savait toujours la mettre dans tous ses états. C'était rageant que ce soit lui, toujours lui. Et ça l'était d'autant plus que tout cela aurait pu être évité si l'adolescente avait su se montrer plus mature dans ses réactions.
Peut-être que là on l'aurait écoutée. Peut-être que certains détails ne lui auraient pas échappé dans le tumulte des dernières semaines. Peut-être même que toutes les petites choses qui avaient mené à cette situation n'auraient jamais pu se produire et la blesser. Et peut-être qu'avec un peu plus de considération pour son entourage, Mahiru ne se serait pas retrouvée en chaussettes au milieu de son genkan à quatre heures de l'après-midi, à sangloter comme une enfant abandonnée sur le pas d'un orphelinat.
— Ma luciole ?
La brunette sursauta à ce surnom résolument familier qu'elle ne s'attendait pas à entendre aussi tôt dans la journée, et elle leva la tête brusquement. À travers les larmes qui lui innondaient les yeux, elle distingua le visage de sa mère, qui avait passé la tête dans l'embrasure de la porte menant au salon. Et nul besoin de distinguer ses traits pour comprendre qu'ils étaient aussi marqués que sa voix par l'inquiétude de la trouver dans cet état au retour du lycée.
— Il s'est passé quelque chose à l'école ? s'enquit-elle directement sans lui faire l'affront de demander si ça allait, comme la réponse était évidente.
— Non, rien. Il s'est rien passé.
Sa mère n'était pas dupe. Même si elle s'était essuyé rapidement les yeux avec le revers de sa manche, la brièveté de sa réponse ainsi que la vitesse avec laquelle ça avait été dit indiquaient que si, il s'était passé quelque chose. De plus, il restait un brin difficile d'échapper à son œil observateur de maman. Pour autant, Kaoru n'insista pas, subtile comme à son habitude :
— Tu veux un bol de thé ? J'en ai préparé cet après-midi.
Mahiru ne répondit pas, à l'exception d'un tremblement de lèvres qu'elle ne parvint pas à réprimer, miroir de toutes les émotions qui s'entrechoquaient dans sa poitrine. Elle inspira pour les enfouir sous une grande bouffée d'oxygène – sans succès.
— J'ai aussi fait des gâteaux, si tu veux, continua sa mère dans un sourire tendre, et la plus jeune baissa la tête en sentant son cœur se serrer. Tu sais, ceux avec de la pâte de haricots rouges.
Un nouveau silence l'accueillit, quand bien même l'adolescente avait l'impression que sa tête était un capharnaüm où se superposaient les battements de son cœur et les échos de ses conversations successives avec Kinako puis Atsumu. Sa vue se brouilla, comme d'autres larmes commençaient à lui inonder ses yeux en dépit de toute sa volonté de les retenir. Et ces tremblements qui réapparaissaient à la surface de sa peau, incontrôlables, inarrêtables, comme la voix de sa mère qui lui paraissait si lointaine.
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Salade de Fruits |HQ!!|
FanfictionMahiru ne s'est jamais intéressée à Miya Atsumu. Elle ne le déteste pas, elle ne l'admire pas non plus, rien d'extrême. Il ne lui inspire que les sentiments qu'on a habituellement à l'égard d'un camarade de lycée un peu mignon et populaire : un ou d...