Mahiru n'eut accès à ses antihistaminiques que le lundi suivant au matin, à savoir le jour de la rentrée. Difficile de dire cependant si elle était soulagée que ce jour soit enfin arrivé ou si elle n'aurait pas préféré souffrir encore quelques jours de plus... Car hormis le fait que le retour au lycée ne l'enchantait que moyennement, c'était surtout le souvenir de la mine déconfite de Miya Atsumu, alors dégoulinant de jus de fruit tropical, qui ne la rassurait guère. Deux nuits s'étaient écoulées depuis leur altercation, et aussi porteuses de conseils fussent-elles, les insomnies au clair de lune avaient surtout nourri ses angoisses : avait-elle eu raison de se laisser emporter par sa colère avec quelqu'un d'aussi redoutable que le volleyeur ? N'y aurait-il pas de représailles ? Et puis, avait-ce été seulement justifié ? La mélodie du regret commençait à siffler doucement dans le vent printanier, si bien que l'adolescente prit des mesures exceptionnelles pour ce premier jour en troisième année, à savoir ; arriver en avance.
Le lycée privé Inarizaki incarnait l'enseignement élitiste japonais à la perfection : pas moins de mille deux cent étudiants tout niveau confondu s'y bousculaient chaque jour, les cours étaient cadencés à la minute près pour des résultats toujours astronomiques, et près de vingt-cinq clubs différents se disputaient les nouvelles recrues à chaque rentrée. C'est également pour cette dernière raison que Mahiru venait plus tôt ce jour ; en début d'année, on comptait sur le club de journalisme pour vendre toutes les autres activités dans le petit hebdomadaire du lycée, et il fallait donc s'y mettre au plus vite pour ne pas se laisser submerger par le travail.
— Oï, Mahiru ! Allô la lune, ici la terre !
L'interpellée tressaillit au son de cette voix doucereuse qu'elle côtoyait chaque jour depuis maintenant deux ans, avant de se tourner vers sa propriétaire, à savoir la responsable du club de journalisme, rédactrice en chef du Inarizaki Today et – accessoirement – son amie de longue date ; Suzuno Kinako. Elle haletait, signe d'une course toute récente qui avait emmêlé ses jolis cheveux noirs.
— Ça fait trois fois que je t'appelle, je commençais à croire que tu me faisais la tête, lâcha-t-elle dans un souffle, en s'appuyant sur l'étagère à chaussures du genkan pour retrouver sa respiration.
— Ah non non, je réfléchissais juste, t'en fais pas pour ça.
— À l'accroche de ton article sur le match de samedi ? Ça s'est bien passé d'ailleurs ? J'ai entendu dire que l'équipe féminine avait gagné.
Mahiru ne répondit pas tout de suite, la regardant plutôt troquer ses mocassins en cuir contre les chaussons de l'établissement, pour se relever si vite que la reporter se prit une gerbe de cheveux dans le visage, et elle grogna de protestation. Kinako s'excusa dans un gloussement.
— Alors ? insista-t-elle, tandis qu'elles se mettaient en route vers le local de leur club. T'as pas répondu.
— Oui, l'équipe féminine a gagné. De pas grand-chose, à vrai dire.
— Ah ? Il paraît que Miya Atsumu était super stressé, c'est vrai ?
— Hum, acquiesça Mahiru à contrecœur, il a foiré son service sur le dernier point.
— Bon sang, le pauvre, il devait tellement s'en vouloir ! En plus, c'était son premier match en tant que capitaine, non ?
Nouvel hochement de tête prudent, et même si elle ouvrit la bouche pour ajouter quelque chose, Mahiru ne prononça pas le moindre mot. Elles étaient arrivées devant la porte de leur local, où des hiragana sur un tableau de bois annonçaient humblement « Club de journalisme ». En tant que responsable, Kinako dégaina sa clé pour en ouvrir l'accès, avant de s'engouffrer dans la pièce sans plus attendre. Son accompagnatrice lui emboîta le pas avec un entrain un peu moindre.
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Salade de Fruits |HQ!!|
FanfictionMahiru ne s'est jamais intéressée à Miya Atsumu. Elle ne le déteste pas, elle ne l'admire pas non plus, rien d'extrême. Il ne lui inspire que les sentiments qu'on a habituellement à l'égard d'un camarade de lycée un peu mignon et populaire : un ou d...