Un court silence s'en était suivi ; on s'était souri tout simplement, et, une fois la séance de photo terminée, elle m'invita une fois de plus à la rejoindre sur son lit. C'était resté très cordial comme échange. Et l'on continua de parler de tout et de rien, prit plaisir à nous raconter, au risque de se répéter, les mêmes histoires encore et encore ; car ce qui a de bon dans l'entretien des souvenirs, c'est la nostalgie qu'ils procurent, c'est de sentir les mêmes émotions qu'auparavant, c'est de savoir que, malgré tout, malgré le temps et la distance, elles sont restées fidèles, ces émotions, à elles-mêmes.
— Dis-moi, soufflai-je après un rire, me mordant la lèvre inférieure.
— Oui, rétorqua Zooey.
Elle était assise en tailleur, à l'autre bout du lit, en face de moi. Elle avait sur son visage cette euphorie calme et douce, diffuse dans ses lèvres étirées subtilement d'une oreille à l'autre, sans jamais monter ne serait-ce qu'une dent, et, simplement, pliait les coins de ses yeux, creusait joliment les fossettes de ses joues. Ses grands yeux bleus, si clairs cette fois-là, me regardaient d'une envie hardie, de cette audace qu'ont les gens dont la honte ni la gêne ne touchent pas. Et, comme je ne lui répondais pas, elle, dans un rire contenu :
— Qu'est-ce qu'il y a ? Tu veux me demander quoi ?
— Ah, oui, désolée, j'étais... ailleurs ! balbutiai-je sur le même ton.
Et, après une courte pause, reprenant avec une petite pointe d'hésitation :
— Ça te dit de passer la nuit chez moi, demain ? Enfin, la nuit, ce sera une petite soirée tranquille, tu sais, toi, moi...
— Ça me dit bien, oui ! rétorqua-t-elle sans même réfléchir.
— Alors, on se dit à demain ?
— Demain !
Il était tard et je ne voulais pas abuser davantage de leur hospitalité ; tout naturellement, après cet agréable moment seul avec Zooey, j'avais décidé de partir, puis, on s'était donné rendez-vous ; c'était là le début, je l'espérais, d'une toute nouvelle amitié, voire plus – en réalité, je voulais bien plus qu'une simple amitié. Et toute sa famille – même Owen, fidèle à sa bougonnerie d'adolescent qu'on dérange en pleine activité – m'avait accompagnée jusqu'à l'entrée. Après, de longs au revoir, à répéter les mêmes bouts de politesse, ils avaient fini par nous laisser en tête-à-tête, avec Zooey...
— Je vais préparer la maison, dis-je. Pour toi, demain. On pourra faire un tour dans le jacuzzi, si j'arrive à le faire marcher, mais je pense que ça ne doit pas être si compliqué que ça !
— Et si jamais il y a une fuite, je pourrais régler ça, rétorqua-t-elle sur le ton de la blague.
Puis, elle regarda derrière elle, s'assurait de je-ne-savais-quoi, s'avança vers moi et prit mes mains dans les siennes. Une douce chaleur m'était montée aux joues, aux épaules ; j'écarquillais mes yeux en esquissant un sourire, qu'avait elle comme idée derrière la tête ? voulait-elle réitérer l'expérience, tenter une fois de plus sa chance ? J'étais toute prête pour accueillir son baiser !
Mais, elle ne le fit pas, non. Elle me prit dans ses bras, délicatement et me serra d'une étreinte grandissante. Je sentais son souffle me caresser le dos, au rythme de sa respiration lente et rassurante, alors je lui rendis son embrassade. Pourquoi diable, on ne l'avait pas fait avant ce câlin ?! Était-ce de la pudeur ? de la timidité ? je ne le savais pas ; ce que je savais, à ce moment-là, c'est qu'il me procura un bonheur absolu ; c'était ce genre d'union qui réchauffe l'âme, qui fait du bien au cœur, de loin en loin.
On se salua, une dernière fois, et j'enfourchai mon vélo ; je me sentais toute légère, comme sur un petit nuage. Et, un sourire niais aux lèvres, je revins chez-moi, très-heureuse de cette soirée surprise, doublée de la prochaine qui s'annonçait tout aussi bien !
La matinée d'après s'était résumée à faire le ménage, à préparer le terrain afin d'accueillir Zooey comme il se devait ! En réalité, je n'avais pas grand-chose à faire, monomaniaque que j'étais parfois, il m'était facile de garder un endroit propre et arrangé ; j'avais alors passé de longues heures à attendre tout simplement, à me retenir de ne pas lui envoyer de message, à fabuler sur le déroulement supposé de la soirée avec elle. Et je m'imaginais déjà des scénarios complément sulfureux, des ébats passionnés aux tendresses absolues, sans connaître les envies et les intentions de Zooey.
Attendre, c'est horrible, et c'est la fin, quand les secondes vous paraissent des heures ; j'étais dans le salon, silencieuse, l'attendant, mettant ma patience et ma libido grandissante à rude épreuve ; le désir à ce de vicieux qu'il augmente sur la longueur, d'une manière exponentielle, sans jamais vouloir atteindre un seuil ; je trépignais à l'idée d'être seule avec elle ! Et quand, enfin, elle frappa à la porte, je m'étais précipitée dessus, comme une enfant surexcitée dont le sucre coule à flots dans son sang ; j'ouvris la porte d'un coup d'un seul, créant dans le même mouvement brusque une petite bourrasque de vent ; bourrasque qui fit virevolter les courtes de mèches de Zooey ; moi, le souffle court :
— Hey...
— Salut ! rétorqua-t-elle avec un petit rire, très surprise de me voir aussi enthousiaste.
Je l'avais prise dans mes bras, de toute manière, ils agissaient de leur propre gré ; je voulais ressentir de nouveau la même étreinte que la veille, sans attendre davantage. Et je n'étais pas déçue, elle sentait si bon, Zooey ; elle me fit ressentir un réconfort absolu, apaisa le désir qui brûlait en moi, le ménageait d'une sorte qu'il soit plus exquis encore, une fois titillé par des tendresses partagées. Alors je l'avais relâchée, l'invitais à entrer. Alors, sur le chemin du salon, je lui dis, un peu gênée d'abord :
— Si tu veux, on peut faire trempette vite fait, j'ai réussi à préparer le jacuzzi !
Elle fit oui de la tête, sans une seule seconde de réflexion, se retourna vers moi en se mordant la lèvre inférieure, puis, sur la même lancée, continua d'ouvrir le pas ; elle connaissait le chemin ; après tout, elle avait passé beaucoup de temps, elle aussi, dans cette maison.
Une fois dans le jardin, devant cette piscine à bulle encore au repos, je m'étais abaissée au niveau des commandes pour l'actionner. La première fois, et je ne l'avais pas dit à Zooey, c'était pas un pur hasard que j'avais réussi à l'allumer ; et comme je ne lui avais pas totalement dit la vérité pour me faire mousser, je ne voulais pas lui avouer sur le fait accompli. Alors, comme la première fois, j'appuyais au petit bonheur la chance, un peu anxieuse.
— Ça va, tu y arrives ? me demanda-t-elle.
— Oui, oui, ne t'inquiète pas ! Dans moins d'une seconde, tu vas voir !
Je m'étais relevée pour voir si elle venait vers moi, et l'arrêter au cas où. Mais je ne m'attendais pas du tout à voir ce que je voyais. Elle ne portait plus sa salopette en jeans, ce dernier, en effet, se trouvait à ses pieds, en boule. Et je remontais avec mes yeux la courbe de ses jambes, les formes fines et pleines de volupté de ses cuisses, puis ce palais interdit qui n'était séparé de ma vision que par la fine toile de son maillot de bain ; ce petit sillon, source de passions les plus folles ; puis, juste au-dessus, les traits fuyants que dessinait son nombril, tout ce charme et ce luxure firent monter en moi une vive chaleur.
Zooey cambrait son dos, était en train de retirer son tee-shirt d'une sensualité involontaire, et je me sentais un peu coupable de l'épier comme ça. Alors, quand elle se fut dévêtu son haut, que sa gorge s'était finalement dévoilé à moi, j'avais détourné le regard, les joues et les pommettes rouges d'excitation.
— Bon, tu l'allumes ce jacuzzi ou pas ? demanda-t-elle de nouveau, sur un ton faussement impatient.
L'instant d'après, je l'entendis rentrer dans l'eau, et, au moment de me relever, nos têtes se trouvèrent l'une en face de l'autre, à quelques centimètres à peine. Il eut un blanc, et l'on se regardait droit dans les yeux, sans rien dire. Zooey me bisa le nez, subrepticement, avant de se reculer, toute joyeuse. Les bulles arrivèrent la seconde d'après, par je-ne-savais-quelle magie...
— Allez, tu viens ? m'invita-t-elle d'une voix cristalline.
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Toi, Moi, La fin des temps. (GxG)
RomancePar un concours de circonstance malencontreux, Leah doit passer ses vacances d'été dans sa ville natale. Loin de l'agitation de la capitale, elle va séjourner, seule, dans la grande maison de sa mère. D'abord bougonne, pestant contre tout le monde...