Toi, Moi, La fin des temps. (GxG)

Chapitre 12

Une fois arrivées dans la chambre de Zooey, sans m'en rendre compte, j'étais quelque peu déboussolée. Étrangement, elle ne semblait pas avoir changé depuis tout ce temps ; les quelques instants qu'il avait fallu à ma mémoire pour refaire surface, et mes yeux s'étaient accoutumés à la petite pénombre qu'il y avait là-dedans. Mis à part quelques détails çà et là, la globalité de sa chambre était, en effet, restée la même : son lit, deux places, posé presque à même le sol, surélevé d'une dizaine de centimètres à peine et couvert de ses plaids, de ses oreillers et coussins - beaucoup trop pour un seul lit ; son miroir vertical, parsemé d'autocollants colorés, ses guirlandes accrochées au plafond.

Il y avait toujours cette aura de bazar bohème, de désordre arrangé, d'un cocon où le fatras se mélangeait bien en ordre, où tout, paradoxalement, semblait parfaitement en place dans ce nid chaud et accueillant. Et Zooey se posa dans son lit, nonchalamment, m'invita à faire de même, juste à côté d'elle.

- Ça fait longtemps ! souffla-t-elle dans un murmure, en appuyant sur le "on".

Les jambes allongées, croisées, elle me regardait avec un grand sourire, appuya sa joue contre son épaule. Et moi, m'installant timidement à mon tour :

- Oui, très longtemps, c'est vrai...

Soudain, elle passa derrière moi, comme pour prendre quelque chose sous son oreiller ; et, après un instant à chercher, je ne savais quoi, entre le mur et son lit, elle revint avec un petit livre. Il était vieux, un peu déchiré, c'était ce genre de carnet que l'on garde dans un coin sans trop savoir quoi en faire, que l'on remplit, le plus souvent, de petites notes, de liste de course, et d'autres mots sans grande importance. Pourtant, dans ses mains, il semblait avoir une plus grande valeur ; alors, elle me le tendit, et tout sourire :

- Regarde...

- C'est... quoi ?

- Regarde, répéta-t-elle, regarde ce qu'il y a à l'intérieur !

Intriguée, je l'avais ouvert assez vite, sans trop attendre ou examiner ledit cahier ; alors, c'était une soudaine avalanche de bouts de souvenirs, de photos prises à la dérobée, de petits missives échangées, en somme, tout ce que l'on s'était échangé avec Zooey pendant notre enfance, durant notre amitié profonde et fusionnelle. J'en avais presque les larmes aux yeux, tout ça remontait si vite, que l'émotion m'avait submergée. Je me contenais du mieux que je pouvais, essayais de me donner une contenance en fredonnant des voyelles à chaque page tournée ; et je passais mes mains sur ce papier jauni par le temps, très heureuse de retrouver ces morceaux de vie que j'avais oublié.

- Tu as gardé tout ça ? demandai-je, émue.

- Ouais, je ne voulais pas oublier, je ne voulais pas t'oublier...

Alors on se racontait nos souvenirs communs, ajoutait des détails qui nous revenaient sur le moment ; c'était rattraper des années délaissées et, peu à peu, très naturellement, on se rapprochait physiquement. Nos visages étaient si proches l'un de l'autre que je sentais son parfum, sa chaleur et mon souffle s'accélérait... par moments, l'on se touchait même les mains, les doigts, très doucement.

Mais malheureusement, de l'autre côté des murs, des interférences venaient perturber notre petit havre de paix : Owen et Greg, très concentrés sur leur jeu vidéo, criaient de temps en temps, de joie ou de colère, on ne pouvait pas le distinguer, les murs retenant à moitié ces sons parasites.

- C'est pas très bien isolé, notai-je avec un rire crispé.

- Ça ne l'a jamais été, répliqua Zooey simplement.

Je ne savais pourquoi, peut-être la situation, le rapprochement, mes hormones en ébullition, mais cette pensée me vint à l'esprit : avec ces murs qui ne gardaient que trop peu les bruits, il était alors impossible de tenter quoi que ce soit dans la chambre de Zooey, quand bien même toutes les deux étaient très disposées à la chose. Du reste, je ne savais même pas si elle le voulait, ou si elle l'a voulu un jour ; en réalité, je pense qu'elle le voulait au moins avant mon départ. Sans ça, elle ne m'aurait jamais... embrassé ce jour-là...