Il y a des moments dans la vie où nos réactions, face à des situations graves et urgentes, sont dictées par nos plus bas instincts. Il y a aussi des moments dans la vie, souvent les mêmes que précédemment cités d'ailleurs, où l'on se met à penser à des choses que l'on croyait oubliées. Des choses qui rationalisent ce qu'il est en train de nous arriver ; comme si notre cerveau, en plein milieu de ce stress, avait décidé de nous sortir un petit cours de rappel sur le fonctionnement de notre corps.
Tout semblait se ralentir autour de moi. Et je me souvenais très clairement de cette après-midi, fin du mois de juin, où je regardais avec une attention particulière un documentaire animalier. On y voyait un zèbre au milieu de la savane, droit et fier, et la voix suave et articulée du narrateur parlait en détail de « la réponse combat-fuite, » un état de stress absolu où tout se joue en quelques secondes seulement. Le pauvre animal était sur le point de se faire attaquer par une lionne ; et fatalement, il devait fuir ou combattre.
Mais la lionne était plus rapide que lui, et l'animal avait fini sous les griffes de sa prédatrice. Tout me revint, d'un coup d'un seul. Les lumières de la supérette, la voix du caissier qui appelait cette personne, et moi au milieu de tout ça ; à l'instar du zèbre, si je ne voulais pas mourir sous les griffes de la gêne, je devais choisir la fuite. Alors, prenant une grande inspiration, je lâchai mes courses et m'étais carapatée dans un autre rayon. Le cœur battant, le souffle court, je ne savais pas pourquoi j'étais dans un tel état de panique, rien qu'à l'idée de la revoir. Mais finalement, j'avais réussi à me cacher.
Je m'étais retrouvée, la respiration haletante, à quatre pattes, dans le rayon des papiers toilettes et autres fournitures de salle de bain. Au diable mes courses, je pourrais toujours les récupérer plus tard, une fois la tempête dissipée. J'essayai de voir entre les articles où étaient le caissier et l'autre, mais je ne vis que leurs pieds. Soudain, une voix tremblante, un peu vieille, m'interpella :
– Oh, vous tombez bien, mademoiselle, me dit-elle. Vous pourriez m'aider ? Avec mon âge et mon dos, vous savez, la vie n'est plus aussi facile qu'avant.
C'était une petite mamie, du genre à gâter ses petit-enfants, avec un large sourire ridé sur le visage et cette sympathie pittoresque qu'ont les personnes âgées. Elle pointait du doigt quelque chose, un paquet de papiers toilettes, à mon niveau et j'eus peur qu'elle ne trahît ma position, alors je m'étais empressée de lui donner sans attendre ce qu'elle demandait. Puis, après une pause :
– Oh, non, en fait, pas celui-là. Je voudrais bien l'autre, avec les petits chatons blancs dessinés dessus, là, juste là !
– Chut, ils vont vous entendre ! lui murmurai-je en lui donnant l'autre paquet.
– Oh, merci, vous êtes bien aimable mademoiselle, dit-elle en s'en allant d'un pas lent. Bonne soirée à vous mademoiselle.
Après une courte pause, à reprendre mon souffle, je m'étais relevée et tendis mon oreille. Il fallait que je sache où est-ce qu'ils en étaient de l'autre côté :
– Mais je ne comprends pas, elle était là tout à l'heure ! ronchonna le caissier. Elle a pas dû partir bien loin, il y a encore son panier, là.
– De qui tu me parles ? rétorqua l'autre, complètement larguée.
– Mais si, tu sais ! insista-t-il. L'autre là ! Tu sais, elle !
– Ah oui, c'est vrai que dit comme ça, je vois tout de suite mieux de qui tu me parles ! wow ! Merci !
– Tss, non mais si, dès que tu vas la voir, tu vas comprendre, putain, j'ai oublié son nom quoi, ça n'arrive qu'à moi ça !
– Bon, je sais pas où tu veux en venir avec cette blague... mais, sache qu'elle n'est pas drôle...
VOUS LISEZ
Toi, Moi, La fin des temps. (GxG)
RomancePar un concours de circonstance malencontreux, Leah doit passer ses vacances d'été dans sa ville natale. Loin de l'agitation de la capitale, elle va séjourner, seule, dans la grande maison de sa mère. D'abord bougonne, pestant contre tout le monde...