Chapitre 26

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Francis avait insisté pour que l'une de nous deux s'installât à la place passager avant, à côté de lui ; il disait que, selon lui, deux personnes à l'arrière et le conducteur seul devant, ça faisait trop taxi, qu'il allait s'ennuyer, et que, probablement le sommeil allait le gagner et qu'il dormirait alors au volant, pour enfin finir sa route au fond d'un ravin, tout ça parce qu'on ne voulait pas se mettre à côté de lui. Évidemment, Zooey ne s'était pas retenue de se moquer de lui, gentiment, en lui insinuant – sans aucun détour – que son petit jeu de drama queen ne marchait pas !

— Boh allez ! insista-t-il. Ne me laissez pas seul, quoi !

— Roh, bougonna Zooey qui avait déjà verrouillé sa ceinture.

Francis regarda dans le rétroviseur, fronça des sourcils et passa ses yeux perçants sur nous deux, l'une après l'autre. Toujours sur un ton de prière désespérée, pareil à une supplication, il ajouta :

— Mais allez, quoi ! Puis, vous allez vous bécoter pendant tout le voyage ! C'est très gênant comme situation... autant pour moi que pour vous !

— Le chauffeur, demanda Zooey, pleine de sagesse, n'est pas censé regarder la route, quand il conduit ?

— Et la musique ! répliqua l'autre. Qui va s'occuper de la musique ?! Ha !

Elle se tourna vers moi, une moue amusée accrochée aux lèvre, roulant des yeux :

— Bon, ça ne te dérange pas, que j'aille devant ?

— Non, non, dis-je en rigolant. Puis c'est pas très loin, le Wine note.

— Une vingtaine de minutes quand même ! nota Francis. D'ailleurs, on est presque en retard ! faut y aller, là ! hop hop, devant ma Zoo'zoo' !

— « Ma Zoo'zoo' », répéta-t-elle, faussement indignée, en se faufilant entre les sièges, avant de se poser lourdement sur la place vacante.

Francis mit le pied aux planchers, d'un coup d'un seul, après avoir quelque peu bataillé pour démarrer la voiture ; puis, en moins de deux, il fit vrombir le moteur, et nous filâmes sur les chapeaux de roue.

Il nous avait romancé l'histoire de cette voiture, de sa voiture, que c'était son père qui lui avait donné, et que depuis, c'était une longue et belle relation entre lui et elle. Francis, c'était le genre de gars à toucher à tout, par curiosité surtout, mais jamais en profondeur malheureusement ; il avait des petites bases de mécanique, qui lui avaient permis d'économiser un peu d'argent ; il était fier, principalement, de l'installation sonore de Francine, c'était le nom qu'il avait donné à sa voiture. Et il pouvait l'être, on y entendait comme dans un casque.

Zooey se trémoussait sur la musique. De la pop au punk, en passant par le rock, il y en avait pour tous les goûts ; des chansons qui parlaient de course à l'armement, de gospel et d'appel à chanter jusqu'à ne plus avoir de poumons, mais aussi de baiser curieux à une inconnue, d'acte par erreur qu'aime avoir fait ; l'ambiance dans la voiture était folle ; et Zooey gardait ce même balancement de tête et d'épaules qui descendait le long de son dos et roulait ses hanches dans un mouvement circulaire et hypnotique ; de temps en temps, elle se tournait vers moi, m'appelait de sa main qui faisait des vagues, comme pour m'inviter à la rejoindre dans cette danse enjouée. C'était drôle de la voir comme ça, sans barrière, sans timidité ; et j'eus compris, à ce moment-là, qu'elle se lâchait seulement quand elle était à l'aise, quand elle était entourée de personnes qu'elle appréciait beaucoup.

Notre retard, se comptait en minutes, et sur les doigts d'une main, la faute à Francine, disait Francis, pour un caprice dont on ne connaissait pas l'origine ; on s'était arrêté, quelques minutes à peine, sur le bas-côté, et après un bon coup de pied sur le pare-chocs, elle était repartie de plus belle. C'était, tout naturellement alors, avec la plus grande des indiscrétions qu'on s'était stationné devant le Wine not ; imaginez-vous, une voiture vieille voiture, avec son charme de rafistolé, débouler en pleine ville, au milieu de tous ces gens, trop peu habitués à voir ce genre de bolide de fortune.

Toi, Moi, La fin des temps. (GxG)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant