Chapitre 18

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Elle soupira finalement en rouvrant les yeux, calmée, et jeta un bref coup d'œil à Drago, qui l'observait le front plissé. Elle lui adressa une légère grimace d'excuse, et se frotta le visage d'une main tremblante, continuant de caresser son chat de l'autre, craignant de perdre pied une fois de plus.
— Désolée.

Elle se frotta de nouveau le visage, puis de nouveau maîtresse d'elle-même, elle répondit doucement, sans la moindre hésitation.

— Je ne... j'aime Harry oui, mais comme un frère. Il n'y a rien de plus. Et il n'y aura jamais rien de plus.

Drago hocha la tête prudemment et murmura, soudain curieux.
— Et Weasley ?
Hermione soupira et haussa les épaules, rougissant légèrement.
— Pareil. Il est comme ma famille aussi. On a cru que... qu'on pouvait être plus, mais c'était une mauvaise idée. Je m'inquiète aussi pour lui, mais... lui il a sa propre famille qui prend soin de lui et qui l'entoure. Je sais qu'il n'est pas seul comme... Harry et moi... nous sommes seuls. Nous n'avons plus personne d'autre.

Drago fronça les sourcils, avant de murmurer, hésitant.
— Tes parents sont... ?
Hermione se redressa et secoua la tête, sourcils froncés comme pour s'empêcher de se remettre à pleurer et prit une grande inspiration en baissant la tête, incapable d'avouer ce qu'elle avait fait en le regardant dans les yeux.
— Ils sont en vie. Ils vont bien. Enfin... je crois. Je... avant de partir avec Harry, je leur ai... lancé un oubliette. J'ai effacé chaque trace de mon existence de leurs mémoires et je les ai convaincus d'aller s'installer en Australie. Je voulais qu'ils soient en sécurité.

Drago retint une exclamation de stupeur, dévisageant la jeune femme devant lui avec tristesse et une pointe d'admiration. Il aurait aimé avoir son courage pour protéger les siens. Lui, il avait juste stupidement suivi les ordres. Il avait aveuglément fait confiance à son père, cet homme cruel et exigeant qui ne lui avait jamais offert le moindre compliment ou le moindre câlin. Ce monstre d'égoïsme qui l'avait éduqué à la dure, à coup de cannes pour lui faire intégrer les préceptes sacro-saints de leur famille.

Face à son silence, Hermione soupira et se tendit, détournant la tête et se ramassant sur elle-même, agrippant toujours les poils de Pattenrond. Sa voix était un peu trop rauque, exposant ses émotions.
— Tu dois me trouver monstrueuse.


Drago la fixa un long moment. En quelques mots, il pouvait briser l'esprit si brillant d'Hermione Granger. Il avait juste à acquiescer, à lui dire qu'effectivement elle était un monstre d'avoir supprimé ses parents de sa vie. Il pouvait s'écarter d'elle et la blesser profondément.
C'était une chose qu'il aurait fait sans la moindre hésitation autrefois, lorsqu'il s'imaginait meilleur qu'elle, plus pur.

Il voulait croire qu'il avait changé, qu'il n'était pas si mauvais, qu'il avait appris de ses erreurs. Il était désormais capable d'admettre que cette fille était intelligente et puissante. Que son sang moldu ne changeait rien, puisqu'elle avait prouvé à de nombreuses reprises sa valeur. Elle avait arraché le respect de tous par la force, elle s'était battue comme la lionne qu'elle était. Aucune fille sang-pur de sa connaissance n'aurait été capable de ce genre de chose... loin de là.

Calmement, il déboutonna le poignet de sa chemise et roula la manche avec lenteur, exposant la marque des Ténèbres dont il avait si honte. Il ne regardait pas sa peau, il n'en avait pas besoin pour savoir qu'elle était toujours là, preuve indélébile de sa stupidité. Il ferma les yeux un instant pour se donner du courage, réprimant la vague de nausée habituelle, la brûlure amère des regrets.
Puis, il murmura, la gorge sèche.
— Tu n'es pas monstrueuse. Et je sais de quoi je parle. Ça, c'est monstrueux. Tu les as juste protégés.


Hermione se tourna vers lui, accrochant ses yeux. Puis, elle baissa lentement la tête, jusqu'à son bras dénudé.

En voyant le bras de Drago, elle laissa échapper une exclamation horrifiée. Elle ne voyait même pas l'ignoble tatouage qui avait pâli à la mort de Voldemort, mais plutôt les cicatrices encore rosâtres, boursouflées, les traces de ce qu'il avait tenté de faire pour effacer ses erreurs.

Elle tendit la main pour effleurer la peau abîmée du bout des doigts, le faisant frémir, puis elle secoua la tête, la voix rendue rauque par l'émotion, les yeux écarquillés.

— Par Merlin... pourquoi as-tu fait ça ? Pourquoi te mutiler comme ça ?

Il haussa les épaules, sans répondre. Hermione le dévisagea longuement et elle rosit légèrement, en posant son doigt sur son bras sur la marque elle-même. Elle retraça légèrement le contour du tatouage, juste un effleurement délicat, une caresse.

Drago frissonna violemment, son souffle accélérant, mais il laissa la jeune fille continuer, sans protester, sans chercher à s'éloigner. Puis, Hermione murmura, enfin, d'un ton tranquille.
— Ça ne te définit pas. Ce n'est pas toi. C'est juste... une erreur de parcours, une erreur de jugement.

Cette fois, le Serpentard grogna.
— Une erreur ? Ça me suivra toujours, jusqu'à ma mort. Même si je change de nom, de visage... cette trace ne permettra à personne d'oublier ce que j'ai fait.

Hermione renifla.
— Ne sois pas si dramatique. Tu peux aller te promener en manches courtes dans le monde moldu et personne ne fera attention ! Certains vont se faire tatouer n'importe quoi en étant ivre. Tu serais surpris de voir ce qui existe en matière de tatouages ! Tu sais qu'il est possible de le recouvrir par un autre tatouage ? Tu pourrais... trouver un motif que tu apprécies, quelque chose qui t'aiderait à tourner la page.

Drago grimaça.
— Tu dis ça comme si c'était simple.
— Mais ça l'est ! C'est terriblement simple ! Ta vie n'est pas terminée. Tu as une seconde chance... Profites-en ! Tu es en vie, en bonne santé. Bien évidemment, tu devras faire face parfois à des gens qui te reprocheront ton passé, ou tes actes. Mais ils oublieront. Ils oublieront vite.

Cette fois, il laissa la colère l'envahir et il siffla, les yeux plissés.
— Tu en sais quoi ? Toi, tu es du bon côté ! Tu es une foutue héroïne !

Loin de s'énerver, elle eut un rire moqueur, un peu amer.
— Et pourtant, j'ai parfois des réflexions sur mon ascendance. Bien sûr, ce n'est pas explicitement dit. Mais quelques mots suffisent. Comment pourrai-je avoir un avis, moi qui ne connais rien du monde magique ? Moi qui ai grandi chez les moldus...


Se reconstruireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant