Se reconstruire

Chapitre 29

Petit à petit, ils s'étaient tous dirigés vers les matelas et avaient choisi leur place.

Hermione s'installa près de Drago en rougissant légèrement, incapable d'ignorer qu'ils allaient être collés l'un à l'autre, comme s'ils étaient dans un seul lit.
La jeune femme pensait que Harry s'installerait près de Blaise, mais ce dernier s'était installé avec Pansy et Neville, laissant Harry et Théo côte à côte.

Pour oublier à quel point Drago était proche, Hermione observa avec attention son meilleur ami. Elle préférait ne pas penser qu'elle allait dormir si près du Serpentard, qu'elle aurait juste à tendre le bras pour le toucher...
Harry ne semblait pas étonné de la précipitation de Blaise à s'éloigner, il affichait même un petit rictus satisfait. Elle plissa les yeux en voyant ses joues légèrement rosées, avant de froncer les sourcils pour réfléchir sérieusement au comportement de Harry depuis son retour.

Cependant, elle fut distraite par Pattenrond qui s'approcha d'elle pour attirer son attention, encore et encore, jusqu'à ce qu'elle s'installe pour dormir, permettant au chat de se lover contre son ventre.
Dans cette position, elle était tournée vers Drago. Elle l'observa s'installer à son tour. Il s'allongea sur le dos avec un soupir et fixa longuement le plafond, permettant ainsi à Hermione de détailler ses traits tranquillement.

Une fois encore, elle se fit la réflexion que Drago Malefoy était devenu agréable à regarder. Ses cheveux presque blancs tant ils étaient blonds, ses yeux couleur d'argent — changeant selon son humeur — attiraient invariablement le regard sur lui. Bien évidemment, il avait grandi dans le luxe et il savait s'habiller de façon à toujours se mettre en valeur. Bien qu'il ait arrêté le Quidditch depuis la sixième année à cause de la guerre, Drago avait gardé un physique d'attrapeur. Bien qu'il soit plus grand que Harry — il le dépassait presque d'une tête — il était aussi fin et élancé.
Lorsqu'elle l'avait soigné, Hermione avait eu l'occasion de se rendre compte qu'il avait peut-être perdu du poids, mais qu'il restait musclé.

La jeune fille se rendit soudain compte de la direction que prenaient ses pensées et elle ferma un instant les yeux, essayant de se reprendre. Elle se trouvait stupide d'être autant obsédée par le garçon qui l'avait toujours détestée...

Hermione aimait à croire qu'elle était quelqu'un de rationnel. Elle analysait et décortiquait les faits avant de prendre une décision. Pour elle, tout — y compris la magie — devait avoir une explication, une logique.
Elle était persuadée que la solution à toutes ses questions se trouvait dans les livres : tout était une question de temps pour tomber sur le bon ouvrage.

La guerre avait fait éclater toutes ses certitudes. La bataille de Poudlard l'avait marquée profondément. Ce n'était pas uniquement parce qu'ils avaient dû se battre pour leur survie ou parce qu'elle avait vu beaucoup de camarades ou de connaissances tomber sous les sorts ennemis. C'était aussi voir qu'une simple prophétie prononcée par une femme aimant un peu trop le xérès avait bouleversé la vie de son meilleur ami. C'était de comprendre soudain que toutes ces souffrances, de la mort des Potter jusqu'à la perte de ses parents pour les protéger, venaient de quelques paroles prononcées dans un bar et entendues par la mauvaise personne.

Hermione n'avait jamais cru à la divination. Il lui avait fallu quelques cours seulement pour se rendre compte que ce n'était qu'un ramassis d'idioties et que Trewlanney n'avait rien d'une prophétesse.
Pourtant, il avait fallu que Voldemort y croie pour que l'ensemble du monde magique bascule dans la guerre.

La jeune fille cligna des yeux, essayant de discipliner ses pensées. La seule fois où un garçon avait retenu son attention de cette façon, c'était durant leur quatrième année, lorsque Viktor Krum avait vu en elle plus que la Miss-je-sais-tout toujours plongée dans ses livres. Pour la première fois de sa vie, elle s'était sentie désirable et désirée.

Viktor l'avait invitée au bal et pour une fois, elle avait passé des heures à se faire belle. Le bulgare avait su toucher son cœur. Il ne parlait pas beaucoup, il avait des manières un peu rudes, mais il l'avait regardé avec admiration. Avec adoration presque.
Elle avait aimé cette sensation grisante et elle avait regretté le départ de Viktor lorsqu'il était rentré dans son pays. Ils avaient entretenu une correspondance, mais les lettres s'étaient taries pendant la guerre. Hermione lui avait avoué être en danger et Viktor lui avait écrit d'être prudente. Et il l'avait invité à le rejoindre, en lui jurant qu'à ses côtés elle serait en sécurité.

Même si elle n'aurait jamais pu abandonner son pays et ses amis, Hermione avait gardé cette dernière lettre sur elle en permanence, pour se souvenir que quelqu'un l'aimait assez pour se soucier de la protéger. Elle n'avait plus de parents, mais il y avait quelqu'un qui pensait à elle et qui s'inquiétait pour elle...

Après le départ de Viktor, avant que leurs vies ne basculent dans un tourbillon de dangers, Hermione avait pris conscience qu'elle était tombée amoureuse de Ron. Ça n'avait pas été un coup de foudre, loin de là. Elle avait été agacée, elle avait eu envie de le frapper tant de fois, et un jour, elle se rendait compte qu'il avait fini par se faire une place dans son cœur.
Elle avait gardé cet amour secret. C'était comme une lueur d'espoir au milieu des ténèbres, c'était la force dont elle avait besoin pour ne jamais abandonner.
Hermione avait idéalisé cet amour. Il n'y avait rien de passionnel, rien de spontané. C'était un rêve d'adolescente, l'espoir d'un avenir meilleur. Avec le recul, c'était probablement aussi sa façon d'avoir de nouveau une famille.

La réalité avait fait voler en éclats ses illusions. Ron était égal à lui-même et elle avait pensé qu'elle pourrait le changer. Il y avait eu beaucoup de disputes, de cris et de larmes, avant qu'elle comprenne. Le problème ne venait pas de Ron, mais de son envie de le façonner selon ses rêves.
Ils avaient eu une longue discussion pleine de larmes, avant de conclure qu'ils n'étaient pas faits pour vivre ensemble. Leur brève relation n'avait servi qu'à se faire souffrir mutuellement et mieux valait tout arrêter avant de causer des dégâts irrémédiables à leur amitié...