La Dame de Fer

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Je marche difficilement dans les rues de Paris, pourquoi Édouard me fait du mal délibérément ? Pourquoi mon cœur la choisit lui ? J'ai tellement mal, j'ai l'impression qu'on m'enfonce des lames de couteau dans tout le corps en insistant très fort à l'endroit qui me maintient en vie...

Pleins de questions me passent par la tête, auxquelles je n'aurais jamais de réponses... Pourquoi continuer de vivre en étant malheureuse ?

Mon enfance a été affreuse, j'ai grandi avec un trou béant en moi, sans amour et seule. Ma vie sentimentale a été un désastre, j'ai été cocue plus qu'un humain n'aurait pu le supporter, le peu de confiance en moi s'est envolée au fur et à mesure des années de vie commune avec Antoine.

Je ne savais plus qui j'étais... c'était tellement dur... je me suis accrochée pour mes filles, pour Clémence et pour Élise. Mais à chaque fois que j'arrive enfin à sortir la tête de l'eau, quelqu'un m'enfonce encore plus profondément dans les méandres de ma dépression.

Parce que, oui, je suis en dépression depuis sept ou huit ans maintenant... et je n'en peux plus.... je ne veux plus souffrir, je suis arrivée au bout... je ne pourrais jamais me relever cette fois....

Cela fait plus d'une heure et demie que je marche, et quand je reprends contact avec la réalité, je me trouve devant la Tour Eiffel. J'ai besoin d'air, j'étouffe !

Je prends un billet et je m'élance par les escaliers de la Dame de Fer à toute allure. Je ne veux plus ressentir la douleur, je continue de monter.

J'attrape un point de côté mais la douleur n'est rien à comparer de ce que je ressens. Les touristes me regardent bizarrement mais je m'en fou....

Ils ne me connaissent pas, ils ne savent pas, je n'en ai plus rien à faire de rien.... Ma vie n'est rien, je ne suis rien, je n'ai jamais été quelqu'un. Je suis faible, je me déteste....

J'arrive à l'avant dernier palier et prends l'ascenseur pour me rendre au sommet. Enfin tout en haut, je prends une grande bouffée d'air et je tombe par terre, à bout de force, physiquement et mentalement.

Je sors mon téléphone de ma poche, j'ai beaucoup de messages d'Élise et de Clémence, elles s'inquiètent... je ne leur ai pas répondu ce matin et elles savent pertinemment que je souffre en ce moment...

Il y a des messages d'Édouard. Je supprime la conversation sans lire ses messages et je bloque son numéro dans mon téléphone.

Je n'ai pas remarqué que mes larmes coulent à flot depuis que je suis arrivée en haut de la structure métallique. J'aurai voulu sauter, et tout oublier, ne plus jamais ressentir quoi que ce soit. Je suis tellement perdue. Ces pensées qui s'insinuent en moi me perturbent mais c'est peut être la solution à tous mes problèmes...

J'aurai voulu veiller sur ceux que j'aime d'en haut mais quand je m'approche du bord, il y a des grillages sur les quatre côtés...

Je m'assois à nouveau, pleurant de plus belle. Je ferme les yeux et tente de respirer correctement mais je n'y arrive pas.

Il me faut de la musique. Elle seule pourra me calmer. Je prends à nouveau mon téléphone et un message de Clémence apparaît. Il s'agit d'un lien Deezer.

Je mets mes écouteurs et j'écoute la musique. C'est U-turn Lili de Aaron. Je traduis les paroles pendant que le son se diffuse dans mes oreilles.

Je serai ton ange gardien, enlève ces idées noires de ta tête, dans toutes tes vies je serai là. Ne deviens pas un fantôme sans couleur. Tu es la plus belle peinture que la vie a créé....

Je pleure, pas de douleurs, non, parce que je n'ai pas le droit de mettre fin à mes jours. Mes sœurs, mes filles ne se relèveraient pas. Je suis égoïste putain....

Élise m'envoie également un message. Elle m'explique ce qu'elle a ressenti quand elle a perdu son papa, des choses qu'elle ne m'avait jamais dites... Et je me souviens dans l'état cadavérique dans lequel elle se trouvait après l'enterrement, j'avais tellement mal pour elle... Je ne peux pas partir... Ça l'a tuerait....

Je réponds à ma sœur que j'étais partie courir. Que je n'ai pas le moral mais que ça passera comme toujours.

J'envoie mes coordonnées GPS à Élise. Je n'arrive pas à me relever. Je n'ai plus d'énergie, jai vraiment besoin d'elle... Je vais attendre qu'elle vienne me chercher....

Elle me répond qu'elle se dépêche. Je reste assise et j'écoute à nouveau la chanson que Clémence m'a envoyée. Elle m'a empêché de faire une connerie sans qu'elle le sache...

Je reçois une dizaine de minutes plus tard un lien Deezer d'Élise. Je clique sur le lien et Palladium des Brigitte résonne à présent dans mes oreilles.

Qu'est ce que je ferai sans elles deux ? Élise arrive au sommet, elle s'assoit à mes côtés et me prend dans ses bras.

Je chiale comme jamais je n'ai pleuré avant, comme si j'évacuais toutes mes peines depuis ma naissance. Elle me caresse les cheveux, elle me fait la promesse d'être toujours à mes côtés.

Elle m'a ramené du sucre et une bouteille d'eau. J'avale le tout, j'essuie mes larmes qui sont dures à stopper.

Je lui explique mon rendez vous avec Édouard, et le jeu auquel il joue avec sa future femme. Je pleure de plus belle... Elle me dit qu'elle est désolée pour tout. Mais qu'elle sera là pour m'aider à remonter à la surface...

Je m'excuse de l'avoir dérangée et elle m'engueule. Elle me dit qu'elle est contente au contraire que je lui ai demandé de venir.

Je la prends dans mes bras et la remercie. Je la sers aussi fort que je le peux pour lui exprimer ma reconnaissance. C'est ma force ce petit bout de femme...

Nous redescendons doucement, j'ai une gueule affreuse... elle me dépose chez moi en me demandant si ça va aller.

J'aquiesce, je ne veux pas la déranger trop longtemps. Et puis, j'ai honte d'avoir été faible. Quand nous étions jeunes, c'est moi qui me battait pour la protéger, qui faisait des menaces à ses nouveaux petits amis...

Elle me fait un gros bisou sur la joue et je sors de la voiture. Je rentre dans mon appartement. Mon cerveau est en surchauffe, il fait que répéter en boucle ce que m'a dit Édouard.

J'envoie un snap à Antoine, lui demandant s'il peut m'apporter du shit  histoire que je mette mon cerveau en off...

Il m'écrit trois heures après en me disant qu'il a déposé ce que je lui ai demandé dans ma boîte aux lettres.

Je descends à toute vitesse récupérer l'enveloppe. Je remonte et l'ouvre. Il a géré, il m'a roulé six pétards, de quoi tenir toute la semaine.

Je lui renvoi un snap pour le remercier et il m'incite à fumer doucement...

J'allume la télé et mets SouthPark, cette série, c'est de la tuerie quand tu as fumé ! Je rigole comme une conne toute seule quand Cartman dit Je vous emmerde et je rentre à ma maison !

Je commence à m'endormir, le corps et l'esprit à peu près apaisés. Je file dans mon lit et j'écoute Talking To the Moon de Bruno Mars.

Je traduis les paroles :

.... La nuit quand les étoiles éclairent ma chambre,
Je massieds seule,
Je parle à la Lune,
J'essaie de t'atteindre,
En espérant que tu es de l'autre côté,
A me parler aussi,
Où est ce que je suis une idiote,
Qui s'assoit toute seule,
A parler à la Lune....

Des larmes roulent sur mes joues, tant on dirait que Bruno Mars a écrit cette chanson pour moi...

Je sèche mes larmes et je m'endors en espérant ne jamais me réveiller...

Coup de foudre à ParisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant