Chapitre 63 : Le père Noël est (vraiment) une ordure

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PDV CINQ

Comme tout le monde semble absorbé par les différents pouvoirs revenus et que je commence à être fatigué, je propose à Abby qu'on aille dormir. Elle hoche la tête, je lui prends la main et la téléporte en haut. Ses jambes tremblent et elle s'effondre sur le bord du lit, et c'est alors que je réalise qu'elle n'est pas du tout habituée aux téléportations.

- Euh, ça va ?

- Je crois, dit-elle en se retournant sur le dos, sa mince poitrine se soulevant puis retombant suivant sa respiration. J'ai juste un peu le tournis.

Il y a un blanc. Puis, elle semble réaliser ce qu'on vient de nous dire, que sa mère vient de mourir, et elle fond en larmes. Je la prends dans mes bras, ne sachant pas trop quoi faire. Abby pleure longtemps puis est prise d'une irrépressible crise de hoquet. Je lui fais boire un verre d'eau, elle se couche sans se changer et se blottit contre moi sans un mot.

PDV ABBY

Dans le noir, on s'embrasse quelques fois, troublés et épuisés. Je ne m'attends pas à dormir ; pourtant je sombre peu à peu dans le sommeil, nos jambes et nos bras emmêlés.

Puis, je me réveille dans un grand sursaut en me redressant d'un seul coup. Cinq se réveille lui aussi en m'entendant m'agiter.

- Qu'est-ce qu'il se passe ? fait-il d'un ton paniqué.

- Euh, je...

Trouver quelque chose à dire. Vite.

- J'ai fait un cauchemar. J'ai rêvé que je me noyais, je réponds enfin.

Son visage se détend un peu.

- Ah.

- Désolée de t'avoir réveillé, je murmure.

- C'est pas grave. Tu vas pouvoir te rendormir ?

- Oui. Je pense.

Mais je garde les yeux grands ouverts le restant de la nuit.

Le lendemain matin, après avoir un peu somnolé, j'entends Cinq se réveiller doucement. Je le regarde et lui sourit.

- Tu as vraiment des yeux incroyables, je commente, le menton calé sur ma main.

- Ah bon ? marmonne-t-il.

- Oui. On dirait de la labradorite, avec des tons de verts, et de bleu, aussi. C'est magnifique, cette pierre.

Cinq sourit et m'embrasse.

- Bon, j'ajoute avec un enthousiasme forcé. On va manger ? Je meurs de faim.

- Avec plaisir.

* * *

Powell et sa clique ont donc décidé de nous envoyer au bal de Bell Row. Bon... ça ne me plait pas tellement car, a) c'est chiant, b) on voulait fêter Noël ensemble, et ça m'empêche de coucher avec Cinq et je suis assez frustrée, et c) on risque nos vies à un putain de bal masqué pour, je pense, absolument rien.

Ce n'est pas pour autant que l'on nous donne les ordres d'aller nous dégoter des vêtements appropriés pour le bal de demain soir, plus des masques. Super.

Je me morfonds toute la matinée dans ma chambre, dans le brouillard. Je sais que je suis obligée d'aller à ce bal mais je n'en ai vraiment aucune envie. En fait, je n'ai envie quasiment de rien, à part être avec Cinq, dormir, et manger, quand j'ai de l'appétit. J'ai envisagé de me défoncer mais je dois rester fidèle envers ma promesse à Cinq, alors je n'en fais rien.

Je contemple le plafond, me demandant ce que je vais bien pouvoir faire de ma journée. Peut-être que je suis comme ça juste parce que je suis fatiguée, et que demain, ça ira mieux. Ça se trouve, ce bal va être assez marrant.

Ma mère vient de mourir le même jour où je venais de la rencontrer, putain.

Je soupire en plongeant ma tête dans mon oreiller.

Je m'ennuie. Cinq est parti aider les gens du bunker, pour des trucs scientifiques et mathématiques, je crois. J'ai proposé de les aider car j'ai un QI bien supérieur au sien, mais ils n'ont pas voulu et m'ont demandé de me reposer. Je crois que mon bracelet évaluant ma « santé mentale » présente aussi des inconvénients... Je pourrais aller parler aux autres, mais je n'en ai aucune envie.

D'ailleurs, on toque à ma porte et Lila entre en la refermant derrière elle. Elle s'assoit sur le bord du lit et parcourt la pièce du regard.

- Salut.

- Salut.

- Tu ne vas pas bien. C'est une affirmation, pas une question.

- D'accord, je réponds simplement.

- Je suis vraiment désolée pour toi, Abby. En fait, on est tous aussi dévastés que toi, même si on n'a pas l'air.

Je perçois ses sous-entendus. Il n'y a pas que moi dans le monde, je ne suis pas la seule à être atteinte par certaines choses.

- Je sais, je mens. Pourquoi tu es là ?

- Je ne sais pas. Pour te remonter le moral, je suppose. On est peut-être coincés dans ce trou merdique, sans lumière du jour, sans Noël, sans amusements, mais bon. Déjà, on devrait voir le bal comme une perspective de distraction, non ?

- Avec quelques gouttes de sang, un peu de pression et une espérance de vie limitée derrière ? Oui, pourquoi pas.

Lila soupire en lissant les plis de la couette banche.

- Tu veux que je te fasse les ongles ?

J'ai la sale manie de les ronger et mon vieux vernis bleu foncé est bousillé. Mais bon.

- Si ça te fait plaisir, je réponds.

Elle sourit et part chercher des flacons dans la salle de bains.

Je passe le restant de la journée avec elle. Ça me fait du bien. Sloane vient nous voir elle aussi. C'est horriblement cliché et ça me donne la gerbe de dire ça, mais on a passé un après-midi entre filles, et je me suis bien amusée. Et reposée. Je me sens mieux, et je vois les jours qui vont arriver sous un meilleur angle. Après que, entre autres, Lila ait peint mes ongles en argenté et que Sloane m'ait coupé les pointes abîmées de mes cheveux et épilé mes sourcils, Klaus débarque dans ma chambre sans ménagement avec l'intention de regarder un film car il s'ennuie. On opte pour Le père Noël est une ordure. Les seuls qui parlent français ici sont moi, couramment, et Klaus, un peu, donc on traduit pour Lila et Sloane, mais je finis par tellement pleurer de rire que j'abandonne. Klaus prend laborieusement le relais. Ben et Viktor nous rejoignent, puis Diego revient de la Salle d'armement, où il testait de nouveaux couteaux, et Cinq refait surface lui aussi.

On passe donc la soirée ensemble. Quand le générique défile, je fixe les noms de Thierry Lhermitte, d'Anémone et Gérard Jugnot en essayant de ne pas pleurer. En voyant que l'hilarité générale commence à retomber et que la tristesse refait surface, Klaus se lève d'un bond en nous proposant de préparer un klug. Je ne peux m'empêcher de rire. Luther fronce le nez :

- Ca va puer dans toute la maison.

- Je propose que l'on prépare des sandwichs chamallows-beurre de cacahuètes, déclare Viktor.

- Ça me va, répond directement Cinq.

- Ca a l'air absolument dégueulasse, mais je ne pense pas que ça puisse l'être plus que les truffes au chocolat de Mr Preskovitch, dit Lila. Alors, pourquoi pas.

Quand je me couche ce soir-là (toujours dans les bras de Cinq, vous vous en doutez bien), je me sens beaucoup moins triste que ce matin. En fait, je me surprends même à sourire.

To be continued...

Erlar || TUA 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant