Chapitre 19 : Une fenêtre très étroite

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💊⚠ TW: Drogues

A mes 12 ans, Robby s'était encore battu avec Miguel et, cette-fois ci, il était vraiment, vraiment, vraiment mal. Un médecin est venu et lui a prescrit du fentanyl. 

Alors que je veillais à son chevet, mon regard a glissé sur les comprimés blancs. Robby était allongé dans son lit, complètement groggy. Alors, très rapidement, j'ai pris un comprimé de fentanyl et je l'ai avalé. Et je l'ai fait à chaque fois que je suis venue chez lui. Je suis vite devenue addict. J'en volais des sachets remplis aux médecins, et je cachais ma réserve dans mon matelas. Personne n'était au courant, même pas Lyra. Ca l'aurait dévastée de l'apprendre, je pense. Le cannabis, c'était autre chose. J'ai vite sifflé les 30 grammes que m'avait vendu Eddie, mais je n'étais pas accro. Surtout que c'était mille fois moins discret de fumer un joint que de prendre des comprimés discrètement. Quand Eddie a été renvoyé de Phoenix, j'ai été privée de mon dealer, mais il me restait le fentanyl. J'en prenais vraiment énormément et, bien sûr, je me suis évanouie une ou deux fois, mais rien de bien méchant, ça ne durait pas longtemps. J'avais aussi quelques hallucinations. Pour venir ici, j'ai caché un sachet dans la doublure de mon sac. C'est pour ça que Cinq n'a rien trouvé.

Je vais dans la cuisine et prend discrètement le sachet dans mon sac. Je sors un, deux, trois, quatre comprimés. Je prends une bouteille de whisky dans un placard et je les fais passer avec.

Je ne me suis jamais renseignée comment il fallait vraiment les prendre. Peut-être que ça se sniffe mais je n'ai jamais essayé. Je les ai toujours pris avec de l'alcool quand je pouvais, ou de l'eau.

 Il m'en reste encore beaucoup dans le sachet. Pourquoi s'emmerder à toutes les économiser ? Ça se trouve, avec toutes ces histoires de dictature, de police et de toutes les conneries que je fais, je ne pourrai jamais les finir, car je serai en prison, ou morte. C'est très joyeux, tout ça. 

Je vide la moitié du sachet sans compter. Je crois que je n'en ai jamais pris autant. Je me sens flotter, comme d'habitude, mais moins agréablement. J'essaie de me rattraper à la table pour ne pas tomber, mais elle est trop loin. 







Les drogues sont plutôt cool. Je veux dire, elles sont cool avant de détruire ta peau. Et ta vie. Et ta relation avec tes amis. C'est à ce moment-là qu'elles ne sont pas cool. C'est en fait une fenêtre très étroite de fraîcheur et de bonheur.








Je me réveille en soins intensifs. Je le comprends vite car je ne suis pas dans une chambre individuelle, ça bipe de partout et je suis seule. Une perfusion est branchée à mon bras. J'entends des pleurs dans le couloir. Certainement le gosse de je ne sais pas qui qui vient de mourir. 

Je ne sais pas ce que j'ai fait, mais c'est certainement mal.

J'appuie sur le bouton d'appel. Deux secondes plus tard, une infirmière entre. 

- Salut, je dis. 

- Bonjour, Abigail. Je m'appelle Emmanuelle, je suis ton infirmière. 

- Salut, Emma' mon infirmière. 

Elle sourit mais redevient vite sérieuse. 

- Tu te souviens de ce qu'il t'est arrivé ? 

Des souvenirs me remontent en tête. 

- Non, je mens. 

- Tu as fait une overdose de fentanyl. 

- D'accord. 

Je n'ai aucune idée de ce qu'elle va me dire. Un sermon ? Une menace ? Une mauvaise nouvelle ? Un discours à la con sur les addictions ? 

- Je suis fatiguée, j'ajoute pour éviter tout ça. 

- Repose-toi. On t'expliquera tout plus tard.

J'hoche la tête et cale ma tête dans les oreillers. 

- Tu ne demandes pas des nouvelles de ton petit ami ? 

- Je n'en ai pas. 

- Un jeune homme n'a pas quitté la salle d'attente depuis ton arrivée. Avec quelques personnes un peu étranges. 

Ah... 

- Il ne m'a pas vue comme ça ? 

- Non. 

J'hoche la tête, ferme les yeux et sombre dans un sommeil aqueux.

Erlar || TUA 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant