Chapitre 66

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Trois jours, avait dit le Veilleur. C'était à la fois long et court. Nicoleï ne savait pas trop s'il devait se réjouir de l'arrivée prochaine de son Messager. Ishim aurait certainement des remontrances à lui faire... et il se sentait toujours coupable de la capture d'Axel.

Réussirait-il à le convaincre d'accompagner Axel ? Il voulait y aller, lui aussi, ne plus être relégué en arrière. Il avait espéré, jusqu'à l'annonce de la présence du Messager Itzal. Si Itzal raccompagnait Solerys en cellule avant d'être jugé, il y avait de fortes chances pour qu'il doive l'accompagner.

Solerys fut solidement entravé pour la nuit et le Veilleur annonça qu'il monterait la garde. Un soulagement, parce que savoir l'homme si proche d'eux... Nicoleï frissonna malgré le feu qu'avait allumé la mère d'Axel d'un simple geste. Elle avait bien plus de maitrise que son ami, c'était indéniable.

Pensif, il considéra Axel. Qu'est-ce que ça faisait de naitre au sein d'une famille aussi illustre ? Un père célèbre pour ses exploits guerriers – on racontait quand même qu'il avait terrassé un dragon à mains nues ! – une mère Souveraine, qui avait dirigé la Fédération des Douze Royaumes de longues années avant de transmettre le flambeau à Jodörm, et encore mieux, qui avait obtenu un Traité de Paix de l'ennemi de toujours, l'Empire des Neuf Mondes !

Dire qu'il l'avait envié si longtemps. Maintenant, il comprenait mieux la pression qu'il avait du porter sur ses épaules.

Néanmoins, c'était toujours aussi jouissif de l'asticoter. Il était si sérieux ! D'accord, l'entrainement, tout ça, c'était important, mais il n'y avait pas que ça dans la vie ! La mort était le lot quotidien des Mecers, on le leur rabachait suffisamment à l'Ecole, donc il était important de profiter de chaque jour. Ils avaient déjà perdu des camarades, savaient qu'ils avaient besoin de tisser des liens tout en ayant conscience de leur fragilité.

Il se demandait ce que le Messager Ishim lui reprocherait, en arrivant. Même si lui aussi avait des questions. Comment pourquoi le retirer si tôt de son entrainement chez les Maagoïs impériaux ? Il commençait tout juste à s'y faire des amis !

Enfin, le retour au quotidien serait aussi reposant. Plus de nuit à grelotter dans le froid, à respirer la fumée d'un feu dans une grotte mal aérée, plus besoin de chercher à manger, à boire... en y songeant, il n'avait pas été très performant sur ces points-là. Heureusement que Tabatha avait pris les choses en main.

Et puis il restait la question de ses ailes abimées... il regarda avec consternation les plumes coupées presque à leur base. Il aurait clairement préféré une blessure, moins handicapante.

D'accord, ça aurait été beaucoup plus douloureux et potentiellement plus mortel, aussi. Là, il ne lui restait plus qu'un long, très long chemin jusqu'à la Porte de Niléa, bien plus loin au sud-est.

Un vrai calvaire.

Il se réveilla aux premières lueurs du jour, frigorifié malgré son épaisse couverture, d'humeur maussade. Son premier regard fut pour Solerys, toujours solidement ligoté, puis pour Axel, déjà habillé, qui lui retourna un sourire complice. Où donc avait-il trouvé des vêtements ?

— Bonjour, Nicoleï. Veux-tu du thé ?

Le Veilleur lui tendait déjà une tasse. Avait-il seulement dormi ? Il ne paraissait même pas fatigué. Nicoleï accepta avec reconnaissance et resserra ses doigts autour du récipient délicieusement brûlant.

Tabatha et Maintre Kenog discutaient non loin du campement, apparemment pas d'accord sur la marche à suivre, mais trop loin pour qu'il puisse capter quoi que ce soit.

— Quel est le programme ? demanda-t-il.

Le Veilleur échangea un regard avec son épouse avant de lui répondre.

Les Vents du DestinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant